Conséquence directe d’une motion de censure qui ferait tomber le gouvernement, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale est plus que jamais menacé. La rapporteure générale de la commission des affaires sociales du Sénat, Elisabeth Doineau (Union centriste), rappelle l’importante de voter une disposition permettant à la Sécu de pouvoir emprunter.
Nuisances sonores des aéroports : le sénateur Rachid Temal souhaite engager le débat sur les vols de nuit
Par Thomas Fraisse
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3 ans. C’est la perte d’espérance de vie, calculée par l’observatoire du bruit en Île-de-France Bruitparif, pour les personnes qui vivent à proximité des couloirs aériens. L’agence gouvernementale de la transition écologique (Ademe) estime même à 6,1 milliards d’euros le coût social lié aux nuisances sonores aéronautiques, qui peuvent engendrer des risques d’hypertension ou de développement de maladies cardiovasculaires.
Face à cet enjeu sanitaire, le sénateur socialiste du Val-d’Oise Rachid Temal a déposé en mai dernier – après une manifestation avec l’association ADVONCAR et une cinquantaine d’élus d’Île-de-France devant le ministère des Transports – une proposition de résolution au Sénat pour appliquer un couvre-feu aux aéroports franciliens afin de limiter les nuisances des vols de nuit. Une proposition de résolution au Parlement vise avant tout à ouvrir un débat et n’engage pas forcément un vote. Le sénateur val-d’oisien se satisfait tout de même de cette étape. « C’est la première fois qu’un texte comme celui-là est déposé. C’est tout le paradoxe. Je suis le premier parlementaire à déposer un texte sur la nuisance sonore des avions. En plus, ce texte vise à trouver une position équilibrée ».
Une explosion des manquements aux restrictions
Depuis six mois, l’autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa) alerte le gouvernement de l’explosion des manquements aux règles en vigueur pour limiter les nuisances sonores. Cinq aéroports français possèdent aujourd’hui des couvre-feux d’ordre réglementaires, c’est-à-dire imposés par l’État : Paris-Orly, Paris-Le Bourget, Bâle-Mulhouse, Beauvais-Tillé et Nantes-Atlantique. En ce qui concerne le hub international de Paris-Roissy Charles de Gaulle, un plafond de mouvements aériens en cœur de nuit a été instauré. En prenant en compte tous ces dispositifs, l’Acnusa a engagé 935 poursuites en 2022 contre des compagnies aériennes qui ne respectent pas les règles en vigueur, soit une multiplication par trois par rapport à 2021. « Des retards ont malheureusement été pris ces dernières années. L’heure n’est plus à jouer de l’inertie pour retarder la mise en œuvre des mesures nécessaires à la survie de l’humanité sur notre planète. Plus les retards s’accumulent, plus difficiles seront les mesures à prendre », tance Gilles Leblanc, président de l’Acnusa. Le rapport estime que les compagnies low-cost sont les plus susceptibles de causer des manquements, avec en tête Volotea et EasyJet. De plus, les aéroports premièrement concernés sont Paris-Roissy (241 poursuites), Nantes-Atlantique (231) où Volotea propose 50 liaisons et Bâle-Mulhouse (202).
Début juillet, l’Acnusa a renchéri sur le cas Paris-Roissy, estimant que les plafonds estivaux s’étendant de mai à octobre pourraient être largement dépassés. « Au total, le plafond réglementaire des mouvements autorisés en cœur de nuit pour l’année 2022-2023 est fixé à 17 562. Au 31 mai dernier, 9 927 « droits » avaient déjà été consommés. Mais, dans un contexte de trafic dense, les mouvements réalisés en juin ont été particulièrement élevés. De fait, c’est mathématique, si aucune mesure n’est prise, le plafond sera bientôt largement dépassé », calcule Gilles Leblanc pour le Parisien.
Un « juste point d’équilibre »
Ainsi, pour l’Acnusa, le constat est clair : la voie réglementaire est indispensable. C’est, justement, ce que Rachid Temal propose depuis le dépôt de sa proposition de résolution. « Je suis un enfant du Concorde, j’ai vécu depuis tout gosse sous un couloir aérien », se confie le sénateur. « Déjà à Taverny, lorsque j’étais élu de la majorité, on proposait l’instauration d’un couvre-feu. Moi je dis, il faut laisser 8 heures de sommeil aux personnes. On nous dit souvent : ‘on s’habitue au bruit’. Non, on ne s’habitue jamais. Il nous faut mettre en place un laps de temps pour laisser dormir les gens en paix ». Toutefois, le sénateur refuse d’être catégorisé dans le camp des « anti-avions » considérant l’aéroport de Paris-Roissy comme une « chance ». « Je suis pour trouver le juste point d’équilibre entre la santé des personnes et les intérêts économiques. Je pense qu’on peut trouver un compromis », estime-t-il. « Nous travaillons pour la santé des gens, la préservation de la faune et la flore mais aussi conserver cette capacité d’emplois qui émane de ce hub. La plateforme Roissy, avec tout ce qu’il y a autour, est l’un des premiers employeurs d’Île-de-France ».
Sa proposition de résolution se calque donc sur le modèle de l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol, qui a officialisé un plan visant à limiter le trafic aérien à 460 000 vols par an et instaurer un couvre-feu strict d’ici à 2025. Concrètement, aucun avion ne pourra décoller entre minuit et six heures et aucun atterrissage entre minuit et cinq heures. Rachid Temal propose d’instaurer un couvre-feu à Paris-Roissy et à Paris-Le Bourget entre 22 heures et six heures ainsi qu’à Paris-Orly entre 23h30 et six heures. Sur le premier aéroport, le sénateur espère limiter les vols annuels à 440 000, 200 000 à Paris-Orly et enfin 50 000 au Bourget. Dans le même temps, Rachid Temal sur un plan ambitieux de réduction des nuisances sonores de jour comme de nuit.
« Un accord transpartisan »
Déposée en fin de session parlementaire, le sénateur socialiste espère pouvoir inscrire rapidement sa proposition de résolution à l’ordre du jour à la rentrée, après les élections sénatoriales. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Rachid Temal a opté pour une résolution, plus souple qu’une proposition de loi, qui pourrait apporter des réponses rapides. De plus, le sénateur ne se limite pas forcément aux aéroports franciliens. « J’engage le débat. Je propose d’élargir le texte à tous ceux qui veuillent le rejoindre et à tous les aéroports », affirme-t-il. « Je ne me sentais pas de mettre tous les aéroports dedans sans en parler à mes collègues. Tous ceux qui voudront inclure l’aéroport de leur territoire, on en discutera à la rentrée. Je suis dans une démarche collective ».
Faut-il craindre un énième débat polarisé au sujet des avions ? Rachid Temal ne l’espère pas mais surtout ne le conçoit pas : « Il y aura forcément des parlementaires qui vont essayer de mener le débat ‘pro’contre ‘anti’. Pour moi, ça n’est pas le débat et je serai là pour le recentrer. Je pense qu’on peut trouver un accord transpartisan au-delà de ce combat binaire. Plutôt qu’être pour ou contre les avions, je dis aux parlementaires : ‘soyons pragmatiques ! Améliorons la vie des gens’ ».