Santé : Le Sénat va lancer une mission d’information sur les mutuelles

Le Sénat va lancer une mission d’information sur les mutuelles

Au cœur de l’actualité en raison de l’augmentation importante à venir des cotisations de leurs assurés, les complémentaires santé sont dans le viseur des sénateurs de la commission des affaires sociales. Des travaux se pencheront sur leurs missions ou encore leurs coûts de fonctionnement.
Guillaume Jacquot

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L’idée avait germé cet automne, bien avant l’annonce d’augmentations record des tarifs d’au moins 8 % en moyenne. La commission des affaires sociales du Sénat va engager des travaux de réflexion sur les complémentaires d’assurance maladie, parmi lesquels les mutuelles. Cette mission d’information, qui n’a pas encore été officialisée, va dresser un état des lieux de ces organismes qui assurent une fraction des dépenses de santé en France, en appui de l’Assurance maladie.

« La difficulté aujourd’hui, c’est qu’on a un problème de lisibilité sur qui fait quoi, qui finance quoi, entre l’État et les complémentaires », note le sénateur Philippe Mouiller (LR). L’un des meilleurs exemples reste celui de la prévention, un poste de dépenses beaucoup moins cadré que celui des paniers de soins. Pas une année au Sénat sans que les complémentaires ne soient évoquées au moins une fois lors des débats sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, le nouveau président de la commission des affaires sociales veut en faire un des axes du programme de travail de ses collègues pour l’année 2024.

Nouvelle hausse importante des cotisations pour les adhérents des mutuelles

Comme cette année, une hausse importante attend les assurés des complémentaires santé l’an prochain. Les mutuelles prévoient une hausse moyenne de 8,1 %, après 4,3 % cette année. La Mutualité française justifie cette trajectoire par celle de l’évolution des dépenses de santé. Sur les 8 premiers mois de l’année 2023, les prestations versées par les mutuelles ont augmenté de 6 %. Les organismes mutualistes insistent également sur le fait qu’ils ne peuvent présenter un budget en déficit. « Si nous augmentons les tarifs des mutuelles, c’est que nous n’avons pas le choix pour continuer à couvrir les dépenses de santé de nos adhérents », s’est défendu Éric Chenut, président de la Mutualité française.

Autre donnée mise en avant : la prise en charge à hauteur de 40 % des soins dentaires depuis novembre, contre 30 % auparavant pour les mutuelles et 70 % pour l’Assurance maladie. Ce changement est évalué à 500 millions d’euros par an pour les complémentaires santé.

À titre de comparaison, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam), dans la dernière loi de financement de Sécurité sociale, augmente de 3,2 % sur un an. Le 15 décembre, le ministre de la Santé Aurélien Rousseau (qui a depuis quitté ses fonctions en raison de l’adoption du projet de loi immigration) avait appelé les organismes complémentaires à faire preuve de « transparence », après avoir mis en cause le niveau de la hausse des cotisations. « Si l’on peut expliquer une hausse de 5 ou 7 %, ce qui est déjà important, les augmentations annoncées par certains organismes qui peuvent aller jusqu’à 12 % sont inacceptables », avait-il fait savoir dans un communiqué.

Les mutuelles « exagèrent largement », accuse le sénateur Alain Milon

Au Sénat, Alain Milon (LR), le président de la Mission d’évaluation et de contrôle de la Sécurité sociale (Mecss) dit partager les critiques de l’ancien ministre. « Je suis d’accord avec l’ancien ministre. Je pense qu’elles exagèrent largement et que les augmentations dépassent largement l’inflation. Ça me scandalise », fait savoir le sénateur de Vaucluse, qui plaide pour des changements législatifs « le plus rapidement possible ». « Je serai assez favorable à ce que la cotisation minimale, dans le cadre d’un panier de soins de base, soit défini par le Parlement », détaille-t-il.

Mais dans ce contexte de forte hausse des cotisations, la question des dépenses des complémentaires, hors remboursements de soins, resurgit. « Ouvrons tous les sujets en effet, y compris ceux des frais de gestion des complémentaires », déclarait encore le 19 décembre, le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, à la veille de son départ.

Baisse de la part des complémentaires dans les dépenses globales de santé

Selon un rapport de la DREES (direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques) publié le 21 décembre, le poids des charges de gestion dans les cotisations collectées est resté stable depuis 2015, à environ 20 %. Ces frais comprennent les frais de gestion des feuilles de soin, les frais d’administration, mais aussi les frais d’acquisition, c’est-à-dire les moyens engagés pour attirer de nouveaux clients, la publicité par exemple. S’agissant des mutuelles, la part des frais d’acquisition dans les cotisations est passée de 5 % en 2011 à 7 % en 2022, selon les années de la DREES. « Je trouve anormal qu’elles puissent faire payer des publicités par des augmentations de cotisation », s’exclame le sénateur Alain Milon.

Outre le coup de gueule ministériel, le directeur général de l’Assurance maladie, Thomas Fatôme est lui aussi montré au créneau pour réfuter l’idée d’un « désengagement » de la Sécurité sociale, pointé du doigt par certaines patrons de complémentaires. « Entre 2012 et 2022, la part de l’Assurance maladie obligatoire dans la consommation de soins et de biens médicaux est passée de 76 % à 79,6 % tandis que celle des organismes complémentaires de 13,6 à 12,6 % », épinglait-il dans une tribune sur le site des Echos.

Les travaux de la commission des affaires sociales arrivent à point nommé alors que le ton montre entre l’État et les complémentaires santé.

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