Dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, les sénateurs ont débattu d’une série d’amendements visant à accroître la taxation sur l’alcool. Tous ont été rejetés, provoquant la colère d’une large partie de la gauche de l’hémicycle. De son côté, avec le soutien de la ministre de la Santé, la rapporteure générale de la commission des affaires sociales promet de travailler à une proposition de loi transpartisane sur le sujet.
Le Sénat accélère le rythme de la hausse du prix du tabac l’an prochain
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Après avoir voté un durcissement de la fiscalité sur les boissons les plus sucrées, le Sénat a fait de même sur le tabac. L’amendement inséré dans le budget de la Sécurité sociale (PLFSS 2025) ce 21 novembre vise à approcher dès 2025 le prix du paquet de cigarettes qui aurait dû être atteint en 2027 sans hausse de la fiscalité.
Par rapport aux hausses observées ces dernières années, l’augmentation reste mesurée. Sans modification parlementaire, le prix du paquet de cigarettes aurait dû atteindre 12,30 euros l’an prochain, et 12,60 en 2027. Avec l’amendement adopté au Sénat (par 241 voix contre 2), le prix du paquet approchera 12,70 euros dès 2025 et restera à ce niveau en 2027. Rappelons que le plan national de lutte contre le tabac 2023-2027 prévoyait une cible d’un paquet à 13 euros à l’issue de la période. Les sénateurs espèrent que cette nouvelle hausse se traduira par une baisse de la consommation d’un produit jugé responsable de 73 000 décès prématurés chaque année. La hausse des taxes adoptée pourrait ramener 200 millions d’euros supplémentaires dans les caisses de la Sécurité sociale, pour qui le coût direct du tabagisme est compris entre 1 et 5 milliards d’euros.
Pour être appliqué, ce coup d’accélérateur doit cependant être conservé dans la version finale du projet de loi, étape qui passera par la recherche d’un compromis la semaine prochaine avec les députés. Après s’être basée sur les débats à l’Assemblée nationale, la rapporteure générale de la commission des affaires sociales, Élisabeth Doineau (Union centriste), estime que sa modification « raisonnable » peut aboutir. « La proposition que nous faisons sera acceptée, elle aboutira », a-t-elle affirmé.
La ministre de la Santé veut s’en tenir à la trajectoire actuelle
La ministre de la Santé, Geneviève Darrieussecq, s’est en revanche opposée à l’amendement, rappelant que tous les différents acteurs s’étaient déjà entendus sur une trajectoire dans le dernier plan national de lutte contre le tabac. Revenir sur les objectifs à venir, serait selon elle, « prématuré » et « un petit peu compliqué ». L’ancienne maire de Mont-de-Marsan (Landes), guère éloignée de la frontière espagnole, a en outre rappelé que les prix étaient loin d’être harmonisés au niveau européen.
Le sénateur Bernard Jomier (groupe socialiste, écologiste et républicain), mais également Florence Lassarade et plusieurs de ses collègues du groupe LR, ont défendu en vain la cible d’un paquet de cigarette à 16 euros à l’horizon 2027. « Ce qui est proposé par le gouvernement et la commission n’aura probablement aucun impact sur les comportements. C’est de la fiscalité pure. Si on veut que ça décroche, il faut reprendre une trajectoire beaucoup plus forte », a insisté ce médecin généraliste.
Le Sénat veut fiscaliser les sachets de nicotine, le gouvernement les interdire
Quelques minutes auparavant, le Sénat a adopté un autre amendement de Brigitte Devésa (Union centriste) et de Xavier Iacovelli (Renaissance) qui fiscalisera les sachets de nicotine. L’amendement interdit par ailleurs toute commercialisation de sachets de nicotine qui excéderait la limite de 16 mg. Et surtout, la vente de nicotine, sous forme de sachet ou de billes, sera interdite aux mineurs, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, contrairement au tabac de combustion. Elle sera réservée au réseau des buralistes. Déplorant l’absence de cadre légal de ce type de produit, la rapporteure générale a estimé qu’il était urgent de les réglementer. Depuis plusieurs mois, les « pouches », les sachets de nicotine aromatisés, qui font fureur chez les adolescents, sont le viseur des pouvoirs publics.
Les amendements ont été jugés trop timides par la ministre. « J’ai décidé que nous allions interdire purement et simplement ces produits, pour tous. Ils n’ont aucun intérêt, sinon d’être dangereux pour la santé publique. Je préfère interdire que taxer. Je vais préparer des décrets », a-t-elle annoncé. Elle en avait fait l’annonce en octobre.
« L’interdiction d’un produit entraîne souvent le développement d’un marché parallèle et peut se révéler contreproductive », mettait en garde juste avant la sénatrice Nadia Sollogoub (Union centriste).
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