Le combat du sénateur Gilbert Bouchet, atteint de la maladie de Charcot

Plus connue sous le nom de maladie de Charcot, la sclérose latérale amyotrophique (SLA) est une maladie rare contre laquelle il n’existe pas de traitement. Diagnostiqué il y a deux ans, le sénateur de la Drôme Gilbert Bouchet en a fait son combat. Pour soulager le quotidien des malades, et récolter des fonds pour la recherche.
Fabien Recker

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C’est un voyage que Gilbert Bouchet continue de faire tous les mois, coûte que coûte. « J’aurais pu me cacher chez moi » reconnaît le sénateur (LR) de la Drôme, en gare de Valence TGV, où il attend son train pour Paris. « Mais je préfère divulguer ma maladie, afin de dire aux autres malades qu’il faut garder espoir ».

Gilbert Bouchet est atteint de sclérose latérale amyotrophique (SLA), plus communément appelée maladie de Charcot. L’ancien maire de Tain-L’Hermitage ne se déplace plus qu’en fauteuil roulant et avec l’aide d’un respirateur. Accompagné de Jean Hernandez, infirmier à la retraite et ami de longue date, Gilbert Bouchet se rend malgré tout au Sénat pour assister aux questions au gouvernement.

Trois à cinq ans d’espérance de vie

« Aller au Sénat, cela représente presque la moitié de son traitement, ça le motive », assure Jean Hernandez. « Les transferts sont de plus en plus difficiles, mais on se débrouille. La date est marquée d’une croix dans son calendrier, c’est une journée très importante pour Gilbert ».

La SLA est une maladie neurodégénérative, qui touche environ 8000 personnes en France chaque année. Elle entraîne une paralysie des muscles qui empêche progressivement de marcher, de parler et de respirer.  Une fois le diagnostic posé, l’espérance de vie moyenne ne dépasse pas trois à cinq ans.

Une proposition de loi pour aider les malades

Pour Gilbert Bouchet, le diagnostic est tombé en avril 2023. « Comme bon nombre de Français, je ne connaissais pas cette maladie. Ce sont des symptômes qui évoluent très vite » témoigne-t-il. « C’est pour cela qu’avec Philippe Mouiller (président de la commission des Affaires sociales du Sénat, ndlr) nous avons rédigé une loi afin d’accélérer la procédure pour les malades en attente d’une aide ».

Adoptée à l’unanimité au Sénat puis à l’Assemblée nationale, la proposition de loi de Gilbert Bouchet marque une avancée importante pour les malades de la SLA et leurs aidants. Elle met fin à une injustice : auparavant, seuls les malades atteints avant l’âge de 60 ans avaient droit à une compensation financière.

Un fauteuil électrique reçu après la mort du patient

« Une absurdité » pour Bettina Ramelet, directrice adjointe de l’Association pour la recherche sur la maladie de Charcot (ARSLA). Car « la SLA concerne d’abord les plus âgés. Ces personnes ne touchaient aucune allocation liée au handicap. Toute l’aide reposait sur les aidants, puisqu’il est impossible de financer soi-même une aide humaine à domicile. »

Face à l’évolution rapide de la maladie, le texte vise également à raccourcir le délai de réponse des Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). « À l’heure actuelle, quand on fait une demande à la MDPH, ça peut prendre des mois avant d’avoir une réponse »,  poursuit Bettina Ramet. « Parfois, les malades reçoivent leur fauteuil électrique quand ils sont déjà morts. L’accélération de ces délais va permettre de mieux répondre aux besoins ».

L’immense combat des aidants

Et ceux-ci sont immenses. Trouver le bon fauteuil, faire des travaux dans sa maison, adapter le véhicule, jusqu’aux aides techniques à la communication quand le malade ne peut plus parler… « La France n’arrive pas à avancer au même rythme que la maladie » regrette Laura Rovere, aidante de son mari Christophe, atteint de SLA à seulement 37 ans. « Cela oblige les familles à inventer des plans B ». Et à compter sur la solidarité de leurs proches. « Sans nos amis, nous n’aurions pas pu réaliser les travaux nécessaires pour aménager une chambre au rez-de-chaussée » poursuit Laura.

Malgré la maladie qui le condamne, son mari Christophe Rovere s’estime chanceux d’être entouré. « Quand le diagnostic vous tombe dessus, c’est tout votre monde qui s’écroule. Or c’est justement à ce moment-là qu’il faut tout enclencher, faire les dossiers qui sont très compliqués… J’ai eu la chance d’avoir Laura à mes côtés ».

Dans l’attente d’un traitement

Pour les malades isolés, les situations vécues sont cruelles. « Exemple tout bête, on est seul à la maison et une mouche vient se poser sur votre bras ou votre nez » décrit Bettina Ramelet, de l’ARSLA. « On a aucun moyen de s’en débarrasser, sachant qu’il va falloir attendre l’auxiliaire de vie qui ne viendra peut-être que dans plusieurs heures. Les malades âgés et isolés vivent seuls chez eux avec beaucoup d’angoisse ».

L’urgence est donc à la recherche pour trouver un traitement. « Il n’y a jamais eu autant de recherche, ni de pistes prometteuses à explorer, donc autant besoin de financements pour les explorer toutes », explique le docteur Emilien Bernard, neurologue et directeur du centre de référence sur la SLA de Lyon. « C’est enthousiasmant du point de vue de la recherche, mais pour un patient malade aujourd’hui, c’est frustrant de voir la lenteur de développement d’un traitement potentiel ».

Financer la recherche : le nouveau combat de Gilbert Bouchet

Car si l’on dit de la maladie de Charcot qu’elle est « la moins rare des maladies rares », elle n’en est pas moins restée longtemps dans l’angle mort des programmes de recherche, faute des subsides nécessaires. « Il faut de l’argent, rien d’autre », insiste le docteur Bernard. « Il n’y pas d’obstacle technique à ce que l’on découvre un traitement pour cette maladie ».

C’est là le nouveau combat de Gilbert Bouchet. « Je vais me bagarrer pour faire connaître la maladie, afin que la recherche avance » assure le sénateur. Avec l’espoir qu’un jour, d’autres malades que lui puissent bénéficier d’un traitement.

 

Le reportage « Maladie de Charcot, le combat de Gilbert Bouchet » est à voir vendredi 11 avril à 16h30 sur Public Sénat

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