C’est un amendement déposé régulièrement par la droite au Sénat. Les sénateurs ont adopté un amendement de la commission des finances le 7 décembre, pour porter le délai de carence des fonctionnaires d’État à trois jours, alignant ainsi la durée de l’arrêt maladie non indemnisé sur le régime de base des salariés du privé. « Compte tenu du dynamisme des effectifs de la fonction publique d’État depuis 2018, cette économie est estimée à 220 millions d’euros pour l’année 2024 », a motivé le rapporteur spécial Claude Nougein (LR). Le sénateur de la Corrèze s’est appuyé sur l’économie générée par la réinstauration d’un jour de carence en 2018.
Sans surprise, le gouvernement a opposé un avis défavorable à l’amendement, qui devrait donc disparaître dans la suite de l’examen, probablement à la faveur d’un nouveau 49.3 à l’Assemblée nationale. Thomas Cazenave, le ministre des Comptes publics, a notamment fait valoir qu’il était « difficile » de comparer le public et le privé sur cette question de l’indemnisation des congés maladie. « Vous savez que dans le secteur privé, un certain nombre de salariés voient leurs jours de carence couverts par leur complémentaire. Donc, ceux qui ont un vrai jour de carence, ce sont bien les agents publics, pour lesquels ce jour institué en 2018 s’applique strictement. »
S’il a reconnu que la réinstauration d’un jour de carence en 2018 avait été « très efficace », avec une « baisse de plus de 40 % des arrêts d’une journée », le ministre recommande d’agir via la prévention « et l’organisation du travail » pour réduire la durée globale d’absentéisme.
« Une fausse bonne idée » selon le groupe PS
La sénatrice Colombe Brossel (PS) s’est aussi opposée à l’amendement, qu’elle a qualifié de « fausse bonne idée » et de « mesure trop simpliste ». « On a moins d’absences courtes et on a plus d’arrêts longs […] Vous allez, de manière certaine, faire baisser l’absentéisme de courte durée mais les économies que vous allez faire sur cette baisse, vous les perdrez doublement sur les absences de longue durée », a-t-elle argué, s’appuyant sur les travaux de l’Insee.
Une étude de 2017, centrée sur les effets de jour de carence de 2012 à 2013, est effectivement parvenue à ce constat. Les arrêts maladie d’une durée d’une semaine à trois mois ont augmenté de 25 %, sous l’effet de la mesure. Diverses explications avancées. Premièrement, les agents avaient intérêt à attendre d’être sûr de leur rétablissement, pour éviter une nouvelle retenue sur salaire. Autre cas de figure : le fait de ne pas s’arrêter pourrait contribuer à dégrader l’état de santé et donc à allonger la durée d’arrêt au bout du compte. Enfin, les fonctionnaires pourraient prolonger leur arrêt par réaction, ayant le sentiment d’être mis à contribution.
Une étude plus récente de l’institut statistique a noté que les arrêts de plus d’une semaine, contrairement aux arrêts courts, étaient « peu sensibles » à l’application du jour de carence.