En 2 022, au moins 1 244 médecins ont été agressés en France, soit 23 % d’incidents supplémentaires en un an. Un chiffre publié, ce mardi 23 mai, par le recensement annuel des incidents du Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM). « C’est un triste record, soupire Jean-Jacques Avrane, délégué du CNOM à l’Observatoire de la sécurité des médecins. Un record, qui est d’autant plus triste après le drame d’hier ». Lundi, au CHU de Reims, deux infirmières ont subi une attaque au couteau durant leurs heures de travail. L’une d’entre elles, a succombé à ses blessures ce mardi matin. Une minute de silence sera observée mercredi dans tous hôpitaux a annoncé le ministre de la Santé, François Braun.
Si les 120 000 médecins libéraux et 60 000 praticiens hospitaliers français sont confrontés majoritairement à des violences verbales et des menaces (73 % des incidents observés), les médecins subissent aussi des vols, des actes de vandalisme mais aussi des coups et agressions physiques. Un incident à l’aide d’une arme automatique a même été recensé en 2022.
Toutefois, tous les médecins ne sont pas logés à la même enseigne selon leur spécialité ou la zone géographique d’exercice de leur métier. Ainsi, au cours de l’année 2 022, 71 % des violences ont touché les médecins généralistes. De plus, ces incivilités touchent d’abord les médecins situés dans les Hauts-de-France et en Île-de-France. Le département du Nord concentre à lui-seul 15 % des agressions.
Un rapport aux « résultats sous-évalués »
Si plus de 1 200 médecins ont accepté de témoigner, de nombreuses autres agressions sont passées sous silence. « Beaucoup de médecins hésitent à signaler des incidents » déplore Jean-Jacques Avrane. « Ils éprouvent de l’empathie pour leurs patients et espèrent que les choses s’arrangeront ».
Ainsi, depuis le premier rapport de l’observatoire en 2 003, le CNOM travaille d’une part pour sensibiliser afin de limiter les incidents et d’autre part dans l’intention d’accompagner les médecins à signaler leurs agressions verbales ou physiques subies. « Les résultats sont sous-évalués mais nous donnent une image du type d’incivilités », admet le médecin de l’Observatoire de la sécurité des médecins.
Peu de plaintes déposées
En octobre 2022, le sénateur Les Républicains du Calvados, Pascal Allizard, posait une question écrite concernant les mesures du gouvernement « pour lutter contre les agressions envers les médecins ». Le ministère de la Santé et de la Prévention répondait alors que : « L’ensemble des professionnels de santé bénéficient de dispositions pénales spécifiques leur permettant de bénéficier d’un régime de protection renforcé ». Cette protection pénale, qui existe également pour les magistrats ou toute personne dépositaire de l’autorité publique, est rappelée sur le site du Ministère sous la forme d’une échelle de sanctions pour chaque agression potentielle.
Cependant, les médecins n’ont que très rarement recours aux dépôts de plainte. En 2022, moins d’un tiers des médecins agressés – qui ont accepté de témoigner – portent effectivement plainte. « La portée d’une plainte, c’est marquer l’importance de ce que représente une agression, mais c’est aussi travailler pour que la situation s’améliore », explique Jean-Jacques Avrane. Le médecin martèle la nécessité de « faire comprendre aux médecins les raisons de porter plainte ».