Une nouvelle loi de santé vient d’être adoptée au Parlement. Une semaine après les députés, les sénateurs ont adopté à leur tour (241 voix pour, 81 contre), ce 18 décembre 2023, la proposition de loi « relative à l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels ». Le texte est donc définitivement adopté. Les deux assemblées s’étaient mises d’accord préalablement sur une version commune (relire notre article).
En huit mois de navette parlementaire, le texte s’est étoffé, avec un nombre d’articles triplé par rapport à la version initiale. Déposé par le député Frédéric Valletoux, le texte était soutenu par le gouvernement. Il s’est notamment appuyé sur des promesses exprimées par le président Emmanuel Macron, lors de ses vœux aux soignants, en début d’année.
Gardes dans les établissements de santé : soulager l’hôpital et mettre à contribution les cliniques
La loi Valletoux va permettre de rééquilibrer l’effort dans la permanence des soins entre les établissements de santé, actuellement assurée à 82 % par l’hôpital. Le texte doit permettre une réduction de la pression sur l’hôpital et une meilleure implication des cliniques privées. Le principe est celui d’une approche graduée. Les directeurs des agences régionales de santé (ARS) pourront intervenir en cas de carence.
Le texte vise également à encourager l’installation pérenne des soignants sur un territoire. Pour y répondre, il interdit l’intérim en début de carrière pour les professions de santé. Toujours dans l’optique d’éviter les cas de « nomadisme médical », la loi va limiter à une fois tous les dix ans le bénéfice de certaines aides à l’installation pour les médecins ou certaines exonérations.
Développement du cumul emploi-retraite dans un contexte de pénurie de médecins
Une autre disposition est inscrite pour mieux organiser la continuité de l’offre de soins sur un territoire donné. En cas de cessation d’activité, un professionnel libéral conventionné devra respecter un préavis de six mois. Les centres de santé, qui emploient des médecins, des dentistes ou des sage-femmes, devront, quand à eux, prévenir l’ARS qu’un professionnel a l’intention de cesser son activité. Le texte repousse à 75 ans, jusqu’en 2035, l’âge limite d’exercice en cumul emploi-retraite pour les médecins qui exercent dans les structures publiques. Une façon de colmater les brèches, en attendant que la fin du numerus clausus ne produise ses effets.
Plusieurs évolutions sont notables pour la médecine de ville. Une disposition va notamment bénéficier directement aux assurés sociaux, dans un contexte de pénurie de médecins généralistes. La loi Valletoux va neutraliser la majoration du ticket modérateur pour les patients qui n’ont pas de médecin traitant. Le texte poursuit par ailleurs une tendance déjà amorcé depuis plusieurs années, à savoir la mutualisation des rôles et la délégation de tâche. Il élargit l’expérimentation de la réalisation des certificats de décès par les infirmiers à l’ensemble du territoire.
Dans les Ehpad, la loi vient aussi renforcer le rôle du médecin coordinateur. Elle par ailleurs un statut d’infirmier référent, dans la prévention et le suivi du patient.
Attirer les étudiants en médecine dans les zones sous-dotées
Autre mesure importante de la loi Valletoux : l’extension des contrats d’engagement de service public (CESP), mis en place en 2009. Ce contrat, conclu avec des étudiants en médecine, consiste à leur verser une allocation mensuelle de 1200 euros brut, en échange d’un exercice, pendant une durée équivalente à celle du versement, dans des zones marquées par une offre insuffisante en matière de professionnels de santé. Le texte va même plus en ouvrant cette disposition aux étudiants de maïeutique et de pharmacie et en permettant aux étudiants d’en bénéficier dès la deuxième année du premier cycle.
Si beaucoup de mesures devraient aller dans le sens d’une amélioration sur le terrain, beaucoup de parlementaires ont insisté pendant les débats sur le fait que ce texte ne constituerait pas une « baguette magique » pour le système de santé. Au Sénat par exemple, la commission des affaires sociales estime que « seul projet de loi ambitieux pourrait répondre efficacement aux multiples fractures de notre système de santé ».