Photo illustration Passeport.

Projet de loi immigration : les grévistes de l’Ofpra devant le Sénat 

Alors que le Sénat vient d'adopter le projet de loi immigration, les agents de l’Ofpra entament leur deuxième journée de grève, après celle du 26 octobre. Aux revendications de réorganisation interne et de baisse des objectifs chiffrés auxquels sont tenus les agents, s’ajoutent des demandes liées au projet de loi, comme la suppression des pôles France Asile.
Mathilde Nutarelli

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Alors que, dans l’hémicycle du Sénat, les sénateurs adoptent le projet de loi « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration », les agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) tiennent leur deuxième journée de grève et manifestent en face de l’entrée du Palais du Luxembourg.

Un deuxième jour de grève à l’Ofpra

Deux syndicats, sur les trois que compte l’office, ont appelé à la grève : la CGT-Ofpra et l’ASYL (Action syndicale Libre/Ofpra). Si à 15 heures, début de la manifestation devant le Sénat, les chiffres ne sont pas définitifs, il semblerait que la grève soit aussi suivie que la précédente, le 26 octobre dernier. « Nous n’avons pas encore les chiffres exacts, mais au piquet de grève devant l’Ofpra ce matin, on comptait jusqu’à 150 agents, soit un chiffre similaire à celui du 26 octobre, ce qui représente un quart des personnels de l’Office », explique à Public Sénat Anouk Lerais, co-secrétaire générale de la CGT-Ofpra.

« Vu que la loi nous paraît dangereuse pour l’asile, il fallait qu’on se positionne dessus »

Si, au départ, les revendications des grévistes de l’Ofpra ne concernaient pas le projet de loi immigration, il s’y est naturellement invité, et ce d’autant plus après son passage au Sénat. Pour rappel, ce texte qui se veut « gentil avec les gentils et méchant avec les méchants », selon l’expression du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, a été durci par la majorité de droite et du centre du Sénat, avec des ajouts comme la suppression de l’AME ou la suppression de l’article visant à régulariser les travailleurs sans-papiers des métiers en tension, au profit d’une régularisation au cas par cas à la main du préfet. « Au départ, le projet de loi n’était pas contenu dans les revendications, mais vu le timing et vu que la loi nous paraît dangereuse pour l’asile, il fallait qu’on se positionne dessus », explique Henry de Bonnaventure, un des responsables de l’ASYL.

« On ne peut pas imaginer que ça devienne encore pire »

Parmi les dispositions adoptées par le Sénat dans le projet de loi immigration, plusieurs sont donc dénoncées par les salariés mobilisés de l’Ofpra, comme la création de pôles France Asile réunissant les services du préfet et de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), qui organise l’accueil des demandeurs d’asile et des réfugiés en France, à ceux de l’Ofpra. D’après les grévistes, cette mesure serait susceptible de réduire l’indépendance de l’Office, pourtant inscrite dans la loi, et de le soumettre à une pression plus forte pour accélérer l’instruction des demandes.

Ils s’opposent aussi à la généralisation des audiences à un juge unique au sein de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA), adoptée par les sénateurs au prétexte de l’accélération des procédures. Anouk Lerais explique également que les salariés mobilisés se montrent « inquiets » de la suppression de l’AME, qui risquerait de « précariser un public qui vit déjà dans une situation précaire ». « On ne peut pas imaginer que ça devienne encore pire », se désole-t-elle.

La faiblesse du volet « intégration » du projet de loi est également pointée du doigt. L’Ofpra, qui remplit le rôle de « mairie des réfugiés » en leur permettant d’obtenir des actes administratifs, doit composer avec de trop faibles effectifs et des délais d’obtention des documents trop longs, selon les grévistes. Une illustration de « l’hypocrisie du projet de loi », pour la co-secrétaire générale de la CGT-Ofpra.

Quelques victoires

Depuis leur première journée de mobilisation, les grévistes ont néanmoins obtenu la satisfaction de certaines de leurs revendications par leur direction, notamment des mesures de réorganisation interne. « C’est dommage qu’il ait fallu faire la grève pour obtenir ces mouvements-là », regrette Henry de Bonnaventure.

Ils continuent cependant à se mobiliser pour obtenir plusieurs changements structurels, dont la baisse des objectifs chiffrés de traitement des demandes pour tous les agents et davantage de recrutements dans les services administratifs et à la protection.

 

 

Par Ella Couet et Mathilde Nutarelli

Dans la même thématique

Marine Le Pen, présidente du groupe Rassemblement national à l’Assemblée, pendant le vote de la motion de censure contre Michel Barnier.
3min

Politique

Sondage : après la motion de censure, Marine Le Pen toujours en tête des intentions de vote pour l’élection présidentielle

Une semaine après la censure du gouvernement Barnier par la gauche et le Rassemblement national, un sondage Ifop pour Le Figaro Magazine et Sud Radio révèle que Marine Le Pen améliorerait son score au premier tour de l’élection présidentielle. En fonction des candidats face à elle à gauche et chez les macronistes, elle recueille entre 36 et 38 % des intentions de vote.

Le

Projet de loi immigration : les grévistes de l’Ofpra devant le Sénat 
3min

Politique

La consultation des partis à l’Élysée marque « le retour de l’UMPS », estime Thomas Ménagé (RN)

Emmanuel Macron a réuni mardi les responsables de plusieurs partis politiques à l’Élysée pour les consulter avant la nomination d’un nouveau Premier ministre pour remplacer Michel Barnier. Pour le député RN Thomas Ménagé, invité de la matinale de Public Sénat ce mercredi, cet échange marque « le retour de l’UMPS » sous la forme d’un « parti unique qui va du PS jusqu’à Laurent Wauquiez ».

Le

Projet de loi immigration : les grévistes de l’Ofpra devant le Sénat 
4min

Politique

Archive. Quand Jean-Luc Mélenchon justifiait les bombardements sur les rebelles syriens

Depuis la chute de Bachar Al-Assad, certaines déclarations de responsables politiques conciliant avec le régime dictatorial refont surface. En octobre 2015 par exemple dans l’émission « Preuves par 3 » sur Public Sénat, Jean-Luc Mélenchon estimait que les bombardements russes et syriens faisaient partie d’une guerre nécessaire contre les rebelles.

Le

La sélection de la rédaction

Projet de loi immigration : les grévistes de l’Ofpra devant le Sénat 
5min

Politique

Divisions à droite sur la loi immigration : les sénateurs LR demandent aux députés « de lire le texte »

En ce jour de vote solennel au Sénat sur la loi immigration, l’unité affichée des Républicains depuis des mois, sur ce texte, se fissure. Le député LR, Aurélien Pradié estime que le texte remanié et durci par la droite sénatoriale n’est finalement qu’une « reculade ». « Dans ce texte, nous avons fait passer les marqueurs de la droite », répond le président du groupe LR de la Haute assemblée, Bruno Retailleau.

Le