La porte-parole du gouvernement Maud Bregeon a assuré ce mercredi à la sortie du Conseil des ministres qu’Emmanuel Macron a acté qu’il n’y avait pour le moment pas « de socle plus large que celui qui est en place aujourd’hui » pour gouverner. Mais, après les consultations des responsables de partis mardi, « le président continue à écouter et à tendre la main ».
Après le rejet du projet de loi immigration à l’Assemblée, quelles sont les options pour le gouvernement ?
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C’est un véritable coup de tonnerre pour le gouvernement. En fin d’après-midi ce 11 décembre, les députés de gauche et de droite – jusqu’au Rassemblement national – ont uni leurs voix pour adopter une motion de rejet préalable. Avant même d’entrer dans le cœur des débats, le très décrié projet de loi immigration est donc rejeté.
L’avenir du texte de loi est désormais entre les mains du gouvernement, qui devra trancher entre trois options. Le texte pourrait ainsi être renvoyé devant le Sénat, dans la version qui y a été votée en novembre, ou bien poursuivre son parcours législatif en commission mixte paritaire, où sept députés et sept sénateurs devront plancher sur une version de compromis. Enfin, le gouvernement peut choisir de le retirer, actant son désaccord avec les parlementaires.
« C’est un peu un 49.3 à l’envers »
Peu importe l’issue de cette séquence, pour le professeur en droit public Paul Cassia, elle aura au moins permis au Parlement de retrouver « la plénitude de ses fonctions délibératives ». « C’est un peu un 49.3 à l’envers, le Parlement a pris ses responsabilités face au gouvernement », ajoute-t-il. Alors qu’ils dénoncent régulièrement leur perte de pouvoir, les parlementaires se retrouvent ici au centre du jeu, analyse Paul Cassia : « Que le texte soit renvoyé au Sénat, ou en commission mixte paritaire, il sera aux mains de parlementaires majoritairement à droite. Ce serait alors un texte tout autre que celui élaboré par la majorité gouvernementale qui serait adopté. »
Troisième option possible, le gouvernement peut décider de retirer son texte. « Cette option est d’autant plus envisageable que, au vu du rejet préalable du texte à l’Assemblée, le voter en utilisant un 49.3 semble très risqué », indique Paul Cassia. « Pour le gouvernement, le choix se résume donc à accepter son échec politique aujourd’hui, ou bien à l’accepter demain », conclut-il.
Face à ce qui semble être une impasse, une dissolution de l’Assemblée est-elle envisageable ? Pour le maître de conférences en droit public Benjamin Morel, rien n’est moins sûr : « Ce qui est battu ici, c’est la stratégie de Gérald Darmanin. Mais cela ne veut pas dire pour autant que le pays est ingouvernable. La plupart des textes parviennent à faire leur chemin législatif, les budgets pour 2024 sont en train d’être votés… Le gouvernement n’est pas en nécessité de dissoudre ».
La méthode Darmanin « vole en éclats »
Si l’issue de cette séquence politique est encore incertaine, son grand perdant est évidemment Gérald Darmanin. Pour Benjamin Morel, le ministre de l’Intérieur paye son trop grand investissement personnel pour faire adopter ce texte. « Gérald Darmanin s’est identifié à son texte, en assurant qu’il ne passerait pas par un 49.3 et que ce serait sa victoire politique », analyse le constitutionnaliste.
Dans la soirée, le ministre a ainsi présenté sa démission à Emmanuel Macron, qui l’a refusée. « Le principal problème de ce quinquennat pour Emmanuel Macron, c’est l’absence de majorité parlementaire. Elisabeth Borne cherche à construire des majorités ad hoc sur chaque texte, ce qui fonctionne tant bien que mal. Gérald Darmanin a voulu prouver qu’il était capable de construire une alliance stable avec la droite. Il a fait face, d’entrée de jeu, à un non cinglant. Cette méthode, qui pouvait faire la valeur ajoutée de Gérald Darmanin, vole en éclats », analyse Benjamin Morel.
Pour le ministre de l’Intérieur, difficile de s’appuyer sur des Républicains, eux-mêmes divisés. Mercredi dernier, leur chef de file Olivier Marleix avait également déposé une motion de rejet du texte immigration, sans consulter son groupe, suscitant immédiatement des désaccords. La députée LR Michèle Tabarot avait par exemple confié avoir « un souci à voter avec la gauche ». « À l’Assemblée, les LR sont des survivants, ils ont été élus dans des circonscriptions avec des candidats Renaissance face à eux. C’est un groupe très déstructuré, qui ne doit rien à personne, il ne peut pas être un partenaire fiable pour le gouvernement », explique Benjamin Morel. Divisés, les 62 députés du groupe l’ont été jusque dans leur vote de cette motion de rejet : si 40 ont voté pour, deux s’y sont opposés et 11 se sont abstenus.
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