« Plutôt que de faire des meetings où des gens vous applaudissent parce qu’ils sont déjà convaincus, je préfère le débat avec les Français, c’est ce que je leur dois », affirmait ce lundi Emmanuel Macron à Poissy. Roland Lescure nous confiait ainsi hier « qu’avoir 12 candidats qui débattent sur un plateau, avec 11 contre 1 [n’était] pas la meilleure manière d’avoir du temps utile », et François Patriat de confirmer : « Il n’y aura pas un débat avec les 12 candidats, non. Ça n’aurait pas de sens. »
» Pour en savoir plus sur le début de campagne d’Emmanuel Macron : Présidentielle : Macron préfère débattre avec les Français plutôt qu’avec les autres candidats
Le cas de figure s’est présenté 5 fois sous la Vème République : le général de Gaulle en 1965, Valéry Giscard d’Estaing en 1981, François Mitterrand en 1988, Jacques Chirac en 2002, et Nicolas Sarkozy en 2012. Avant 2012, jamais un débat regroupant l’ensemble des candidats avant le 1er tour n’avait été envisagé. Il est donc vrai qu’en 1965, 1981, 1988 et 2002, aucun des présidents sortants n’avaient eu à se positionner directement face à d’autres candidats avant le débat d’entre-deux-tours, tradition de l’élection présidentielle depuis 1974.
Nicolas Sarkozy avait été représenté par Nathalie Kosciusko-Morizet avant le 1er tour en 2012
Mais depuis 10 ans, la donne a un peu changé. Face à la médiatisation croissante des campagnes électorales, et la montée en puissance des chaînes d’infos, France 2 avait pensé en 2012 à un « débat à 10. » L’initiative s’était heurtée au refus du Président sortant, Nicolas Sarkozy, mais aussi à celui de son principal concurrent, François Hollande. Finalement, c’est un format différent qui avait été retenu avec 10 interviews successives des candidats, sans jamais qu’ils se confrontent directement. Quelques jours plus tard un « débat à 10 » est bien organisé sur France 2, mais les 5 principaux candidats y sont représentés par des proches : Nicolas Sarkozy par Nathalie Kosciusko-Morizet, François Hollande par Jean-Marc Ayrault, Marine Le Pen par Florian Philippot, Jean-Luc Mélenchon par François Delapierre et François Bayrou par Marielle de Sarnez.
En 2017, les primaires ont habitué les citoyens au format du débat télévisé à plusieurs candidats, et deux débats – avec les 5 « gros » candidats sur TF1 et avec les 11 candidats sur les chaînes d’information en continu – sont organisés avant le 1er tour. Il est vrai que le Président sortant, François Hollande, avait alors décidé de ne pas se représenter, mais l’organisation de ces débats créée un précédent que ni le général de Gaulle, ni Valéry Giscard d’Estaing, ni François Mitterrand, ni Jacques Chirac n’avaient eu à prendre en compte. La politique se faisait alors plus dans les partis, les meetings et les réunions publiques. Dans le « nouveau monde » qu’il a participé à faire advenir, le Président de la République peut-il s’affranchir d’un exercice qui paraît beaucoup plus un passage obligé aujourd’hui qu’il y a 10, 20 ou 60 ans ?