Sociologie du vote : une France coupée en deux

Sociologie du vote : une France coupée en deux

Le vote au premier tour de cette élection présidentielle dessine une France coupée en deux entre Est et Ouest, centres urbains et campagnes, classes populaires et aisées.
Alexandre Poussart

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Si on analyse le vote du territoire français, on observe une France coupée en deux entre une partie pour Marine Le Pen et une autre pour Emmanuel Macron. Marine Le Pen remporte le nord, l’est et le sud-est de la France. Emmanuel Macron s’impose dans l’ouest de la France, en Île-de-France et en Savoie. « Depuis dix ans, le Front national est très fort dans les régions désindustrialisées touchées par la crise », rappelle Thierry Vedel chercheur au CNRS et membre du Cevipof.

Jean-Luc Mélenchon récolte des succès dans 6 départements : 3 d’outre-mer, la Seine-Saint-Denis, la Dordogne et l’Ariège. A noter que François Fillon arrive en tête dans la Sarthe, la Mayenne et l’Orne, une zone autour de son fief de Sablé-sur-Sarthe, mais aussi en Haute-Savoie et en Lozère.

Marine Le Pen en tête dans le monde rural

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Selon le sondage Ipsos Sopra Steria pour France Télévisions, Radio France et LCP/AN et Public Sénat sur la sociologie du vote, la candidate du Front National arrive en tête dans le monde rural (23% des voix) et dans les communes de moins de 20 000 habitants. Emmanuel Macron reprend l’avantage dans les villes moyennes (26%) et les grandes villes (24%) même si Marine Le Pen réalise des scores significatifs dans ces deux catégories d’agglomération : 24% dans les villes moyennes et 21% dans les grandes. A noter que les voix de la présidente du Front national s’écroulent à Paris (14%).

Même si la différence de vote entre les zones rurales et les villes n’a jamais aussi été importante, « la situation est plus complexe qu’une opposition campagnes/centres urbains » analyse Laurent Bouvet, professeur de sciences politiques à l’université de Versailles. « On peut prendre l’exemple de la Bretagne, qui a voté massivement pour Emmanuel Macron, soutenu par Jean-Yves Le Drian », un président de région ayant une forte popularité en Bretagne.

Les jeunes captés par Jean-Luc Mélenchon

Chez les votants âgés de 18 à 24 ans, 30% ont voté Jean-Luc Mélenchon et 21% pour Marine Le Pen. Emmanuel Macron se rattrape chez les 25-34 ans en récoltant 28% de leur voix, juste devant Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen (24%).

Marine Le Pen en tête chez les quadras et quinquas

La candidate du Front National est nettement en tête chez les 35-59 ans (28%) alors qu’Emmanuel Macron récolte 21% de leur voix. Le fondateur d’En Marche est plus plébiscité chez les plus de 60 ans (27%) alors que François Fillon récolte 45% des voix chez les plus de 70 ans.

Emmanuel Macron remporte le vote des cadres

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33% des cadres ont voté pour Emmanuel Macron et 20% pour François Fillon. Marine Le Pen a recueilli 14% des voix parmi cette profession. « Le vote Macron représente une France de la réussite, alors que les électeurs de Le Pen sont touchés par une sortie du système de formation », constate Laurent Bouvet.

Les scores sont assez homogènes parmi les professions intermédiaires : 26% pour Emmanuel Macron, 22% pour Jean-Luc Mélenchon et 19% pour Marine Le Pen.

Les employés et les ouvriers avec Marine Le Pen

Marine Le Pen remporte le vote des employés (32%) nettement devant Jean-Luc Mélenchon (22%) et Emmanuel Macron (19%). La candidate du Front national réalise son meilleur score parmi les ouvriers (37%) devant la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon (24%). Emmanuel Macron ne recueille que 16% du vote ouvrier. « Le vote pour Marine Le Pen concerne les catégories populaires au sens large du terme, pas simplement ouvrier », analyse  Laurent Bouvet.

Le vote pour François Fillon repose sur les retraités

Le candidat des Républicains a recueilli 36% des voix des retraités, dix points devant Emmanuel Macron (26%). Ce score contraste avec ces faibles performances dans d’autres professions (8% des employés, 13% des professions intermédiaires). Le score global de François Fillon obtient des résultats plutôt homogènes dans les différentes professions.

Près de la moitié des électeurs d’Hollande en 2012 ont voté Macron

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Comment les électeurs du premier tour de la présidentielle en 2012 ont-ils évolué dans leur vote ? Parmi les électeurs de François Hollande, 47% ont voté Macron à cette élection, 24% pour Jean-Luc Mélenchon et seulement 15% pour le candidat socialiste Benoît Hamon. Chez les électeurs de Nicolas Sarkozy au premier tour en 2012, on observe également une dispersion : 59% ont voté François Fillon, 17% Emmanuel Macron, et 14% ont rallié Marine Le Pen. Cette dernière a conservé son électorat de 2012 (85%) tout comme Jean-Luc Mélenchon (80%).

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