« Le gouvernement a finalement changé de politique et décidé de rapatrier collectivement toutes les femmes et les enfants des djihadistes retenus en Syrie. Pourquoi ? », c’est la question, inhabituellement brève, du sénateur LR, Roger Karoutchi, adressée au garde des Sceaux, lors des questions d’actualité au gouvernement.
Le vice-président du Sénat semble faire ici référence au rapatriement en France de quinze femmes et de quarante enfants la semaine dernière depuis des camps de prisonniers jihadistes de Syrie.
Roger Karoutchi semble sous-entendre également que l’ensemble des ressortissants Français détenus en Syrie ont été rapatriés. Or, auditionné sur ce sujet au début du mois d’octobre par la commission des lois du Sénat, Éric Dupond-Moretti avait estimé à 200, le nombre de Français encore incarcérés sur l’ancien territoire de Daesh. « Pour les enfants, c’est encore plus compliqué car certains sont nés sur place et n’ont pas d’état civil donc ils ne sont pas répertoriés chez nous », avait-il concédé.
>> Lire notre article. Retour des enfants de djihadistes : Éric Dupond-Moretti défend une position conciliant « humanité et grande prudence »
« Notre doctrine n’a pas bougé d’un millimètre »
Ce mercredi, le ministre de la Justice a d’abord fait un trait d’humour en répondant « parce que » à son « pourquoi » avant de inviter à lire de compte rendu de cette audition. Sur le fond, le garde des Sceaux a également dû rappeler la position de la France vis-à-vis du retour des familles de djihadistes. Rappelons qu’en septembre, la France avait été condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme, pour ne pas avoir motivé son refus de rapatrier des familles de djihadistes en Syrie.
« Nous rapatrions à chaque fois que c’est possible en termes de sécurité pour nos agents. Deuxièmement, notre doctrine n’a pas bougé d’un millimètre », a-t-il assuré. « Il faut que les femmes demandent le rapatriement. Troisièmement, il y a une judiciarisation systématique. Toutes les femmes ont fait l’objet d’un mandat de dépôt sauf une pour des raisons médicales », a-t-il expliqué.
L’une de ces femmes a été mise en examen pour crimes contre l’humanité et génocide.
En ce qui concerne les enfants, le ministre a rappelé « le devoir d’humanité et de vigilance ». « Nous devons veiller sur eux parce que les laisser là-bas, c’est prendre le risque qu’ils reviennent ici pour commettre des abominations ».
Déchéance de nationalité en question
Une réponse qui n’a pas convaincu le vice-président du Sénat, qui dans une réplique bien plus longue que sa question, prend l’exemple du Royaume-Uni qui a déchu de leur nationalité les djihadistes britanniques « ce qui lui permet de ne pas récupérer les gens détenus en Syrie ».
Il rappelle aussi que sa prédécesseure, Nicole Belloubet avait émis une préférence pour que les procès se tiennent en Irak. Roger Karoutchi rappelle aussi qu’Emmanuel Macron s’était, par le passé, opposé au retour des djihadistes car c’était « trop dangereux pour la sécurité des Français ».
Éric Dupond-Moretti avait aussi été questionné sur l’exemple anglais par la commission des lois. Il avait répondu : « La ligne rouge qu’on n’essaye de ne pas dépasser, c’est l’exécution d’une peine de mort parce que, qu’on le veuille ou non, ils sont Français ».