A quelques jours d’une série de visites au Gabon, en Angola, au Congo et en RDC, le président de la République a présenté les grandes lignes de sa politique africaine pour les prochaines années.
A cette occasion, Emmanuel Macron a annoncé la présentation d’ « une loi-cadre dans les prochaines semaines par la ministre de la Culture », Rima Abdul Malak. « Cette loi-cadre permettra de fixer à la méthodologie et les critères pour procéder à des restitutions au profit des pays africains qui le demandent », a-t-il indiqué.
Un calendrier qui a surpris le sénateur LR, Max Brisson qui avec Catherine Morin Desailly (centriste), et Pierre Ouzoulias (communiste) ont fait adopter une proposition de loi en ce sens. « Dans les derniers échanges que j’ai eus avec la ministre en janvier, il était convenu de trois textes. Un texte sur la restitution des restes humains, un texte sur la restitution des biens des juifs spoliés et enfin une loi-cadre mais dans un calendrier beaucoup plus lointain. Ces déclarations présidentielles qui viennent perturber les relations entre le Parlement et le gouvernement, c’est insupportable », s’agace-t-il.
Une proposition de loi déjà votée en 2022
Le 10 janvier 2022, le Sénat avait adopté la proposition de loi des trois élus. Le texte instaurait d’un « Conseil national » des restitutions pour engager une réflexion sur les demandes formulées par les États étrangers. Les élus dénonçaient la propension du gouvernement à disposer de biens culturels inaliénables à des fins diplomatiques, sans passer, au préalable, par le Parlement.
« Le but de cette proposition de loi n’est pas de s’opposer au principe de restitution, mais de proposer un cadre et des mécanismes de contrôle, afin que les décisions de restitution soient prises en dehors de tout arbitraire », expliquait, à l’époque Catherine Morin-Desailly.
Deux ans plus tôt, les sénateurs avaient eu du mal à accepter « le transfert en catimini » de la couronne de Ranavalona III à Madagascar, au lendemain du vote d’une loi d’exception autorisant la restitution des biens culturels au Sénégal et au Bénin.
En effet, le principe d’inaliénabilité des collections françaises impose de passer par le Parlement, via une loi d’exception, pour restituer un bien culturel conservés dans des établissements culturels nationaux, comme des bibliothèques ou des musées à un pays qui en fait la demande.
Mais, les œuvres peuvent sortir du territoire temporairement via une convention de dépôt passé entre deux pays. Une manière d’organiser à travers des dépôts de très longue durée un transfert de propriété déguisé, avant une éventuelle consultation des parlementaires.
« Contournement du Parlement » et « cadeau diplomatique »
Lors de la mission d’information qui avait précédé la proposition de loi, Catherine Morin-Desailly avait reproché à l’exécutif de « contourner le Parlement » pour sortir des objets des collections françaises « en guise de cadeau diplomatique ».
Raison pour laquelle, la proposition prévoit l’instauration d’un « Conseil national de réflexions sur la circulation et le retour de biens culturels extra-européens ». Cette instance, composée de douze membres, historiens d’art, ethnologues, juristes, nommés par le gouvernement, serait saisie pour toute réclamation de biens culturels formulée par un État étranger. Elle émettra un avis public sur la question avant que les autorités françaises ne donnent leur réponse.
« Ce qui est important, c’est de savoir comment une œuvre est arrivée dans nos collections. Le gouvernement et le Parlement ont besoin de cette analyse objective, d’une méthodologie », insiste Max Brisson.
Leur texte n’a pas été inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.
Ce lundi, le chef de l’Etat a précisé que la restitution des œuvres aux pays qui en feront la demande reposerait « sur un partenariat scientifique et culturel pour accueillir et conserver ces œuvres ».