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Recours 49.3 : un gouvernement de « front républicain » peut-il succéder à Michel Barnier ?

Michel Barnier s’est finalement résolu à déclencher le 49.3 sur le budget de la Sécurité sociale. Le gouvernement pourrait donc chuter dès mercredi, car malgré les concessions faites au RN, Marine Le Pen a confirmé que son camp se joindrait aux voix de la gauche lors de l’examen de la motion de censure du NFP. Pointée du doigt par le camp macroniste, la gauche refuse d’assumer toute part de responsabilité dans cette situation d’instabilité et prépare l’après Barnier.
Simon Barbarit

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Pris en étau entre deux forces politiques depuis sa nomination à Matignon, Michel Barnier n’a semblé se préoccuper que d’une seule mâchoire, celle du Rassemblement national. C’est en tout cas le sentiment des parlementaires socialistes qui ont pris la plume dimanche 1er décembre. « Vous voici désormais engagé dans des discussions avec le Rassemblement national qui, loin de se borner aux questions budgétaires, cèdent aux plus viles obsessions de l’extrême droite », constataient dans un courrier à l’adresse du Premier ministre, le président du groupe à l’Assemblée, son homologue au Sénat, Patrick Kanner et le Premier secrétaire du PS, Olivier Faure.

« Le gouvernement va subir la censure, mais aussi le déshonneur »

Après de nouvelles concessions faites à l’extrême droite dans le budget de la Sécurité sociale, Michel Barnier s’est résolu à déclencher à l’article 49.3 de la Constitution sur ce texte, prenant ainsi le risque de l’adoption d’une motion de censure qui pourrait le faire tomber, à moins d’un dernier geste vers le Rassemblement national qui le conduirait à renoncer à la désindexation des retraites. « Nous voterons cette motion de censure et en premier lieu la nôtre » a finalement tranché Marine Le Pen. « Le gouvernement va subir la censure mais aussi le déshonneur », a commenté au micro de Public Sénat, le président du groupe socialiste du Sénat, Patrick Kanner qui constate que le « gouvernement n’a négocié qu’avec l’extrême droite ».

Dans leur motion, les députés NFP indiquent que « la gauche ne s’est jamais située du côté de l’instabilité ou du chaos ». « Mais l’absence de dialogue, le mépris pour les propositions formulées et pour le travail parlementaire rendent cette censure nécessaire », considèrent-ils.

Et si certaines concessions faites à l’extrême droite recoupent celles demandées par la gauche, comme la suppression du déremboursement des consultations médicales et des médicaments ou la suppression de la hausse de la taxe sur l’électricité, c’est le sentiment d’un gouvernement allant à rebours de « l’élan démocratique du Front Républicain » des dernières législatives qui domine pour les élus de gauche. Pour Patrick Kanner, il y a d’ailleurs « une grande différence ». « Nos demandes étaient basées sur un renforcement des recettes sur les plus aisés de nos concitoyens […] et ça, le RN n’en veut pas », a-t-il insisté.

« Nous devons trouver une coalition à l’allemande où on se met d’accord sur des compromis »

« Nous n’avons pas attendu le RN pour faire de propositions progressives. Des mesures qu’ils ne votent d’ailleurs pas quand elles arrivent dans l’hémicycle. La réalité c’est que nous avons un gouvernement qui est minoritaire. Sa propre majorité lui tape dessus, ce qui l’a conduit à composer avec le RN. Mais est-ce que Michel Barnier voulait sauver son gouvernement ou est-ce qu’il voulait sauver la France ? Il faut accepter le résultat des urnes. Le 7 janvier, les Français n’ont donné de majorité à personne. Nous devons trouver une coalition à l’allemande où on se met d’accord sur des compromis, pas des compromissions, car tout gouvernement minoritaire tombera », prévient le sénateur socialiste, Rachid Temal.

Dimanche, alors que le Sénat votait la fin de la première partie du projet de loi de finances, le gouvernement et le rapporteur général du budget, le sénateur LR Jean-François Husson, ont demandé 27 secondes délibérations pour revenir sur plusieurs votes du Sénat. « Le gouvernement et la majorité sénatoriale sont revenus sur des mesures de justice fiscales, la hausse du taux de la taxe sur les transactions financières (TTF) ou le renforcement de l’exit tax. Je ne peux pas croire que ça n’a pas été négocié avec l’assentiment de l’extrême droite. Mais on voit bien que cette stratégie ne fonctionne pas. Marine le Pen a continué de jouer au chat et à la souris avec l’exécutif », observe le président du groupe écologiste, Guillaume Gontard.

A l’Assemblée nationale, le président du groupe Ensemble pour la République, Gabriel Attal a rejeté la responsabilité de l’instabilité politique et financière sur les élus NFP. « Ce qui se joue devant nous, c’est une situation où les socialistes avec les Insoumis, le Rassemblement national, les communistes et les écologistes, vont mêler leurs voix pour plonger notre pays dans l’inconnu. Ce n’est pas responsable », a-t-il fustigé.

« On sait très bien qu’on ne pourra pas appliquer tout notre programme en l’absence de majorité absolue »

« La responsabilité, elle est d’abord celle du président qui a choisi de dissoudre sans consulter. Notre objectif n’est ni le blocage, ni le chaos mais la construction d’un projet de gouvernement texte par texte », répond Cécile Cukierman, la présidente du groupe communiste du Sénat. « Nous sommes déjà dans une situation d’instabilité puisque les composantes du gouvernement ne s’entendent pas entre elles. Les élus NFP veulent sortir par le haut de cette situation », indique Guillaume Gontard. « Il y a deux solutions. Soit les macronistes décident d’assumer une alliance avec le RN et dans ce cas il s’agirait d’une trahison des électeurs qui n’ont pas donné de majorité à l’extrême droite aux législatives. Soit, ils font le choix de la stabilité et laissent le NFP gouverner par un pacte de non-agression. Le NFP aura aussi une responsabilité. Nous proposerons une ligne mais on sait très bien qu’on ne pourra pas appliquer tout notre programme en l’absence de majorité absolue », poursuit l’élu de l’Isère.

Une perspective rejetée par les Insoumis, a présidente du groupe là l’Assemblée, Mathilde Panot avait d’ailleurs jugé en août que les programmes du Nouveau Front populaire et des macronistes étaient « incompatibles ». C’est pourquoi, les élus LFI continuent d’espérer une présidentielle anticipée. « Il ne faut pas faire semblant que croire qu’on peut continuer dans cette situation. Le président de la République ne souhaite pas nommer un gouvernement du Nouveau Front Populaire, Il ne souhaite pas nommer la coalition qui est arrivée en tête », a souligné dans les couloirs de l’Assemblée la présidente du groupe, Mathilde Panot rappelant son souhait de voir Emmanuel Macron démissionner.

« Je ne suis pas sûre que remettre du présidentialisme dans l’actualité sera de nature à répondre à l’urgence sociale. Le fait majoritaire n’a pas fonctionné en 2022. Les institutions ne peuvent pas être un palliatif », estime, pour sa part, Cécile Cukierman. La semaine dernière, le secrétaire national du PCF, Fabien Roussel avait appelé à « un pacte social » appliqué par « un gouvernement qui soit en capacité de construire des majorités », laissant entendre qu’il ne devrait pas se limiter au Nouveau Front populaire mais pouvant aller jusqu’aux macronistes. « En tout cas, nous serons autour de la table pour en discuter », confirme la sénatrice.

« Il faut donner vie au front républicain qui s’est manifesté à l’occasion des élections législatives […] Ce front républicain va plus loin que le Nouveau Front populaire […] Nous sommes prêts à ce que les macronistes discutent avec nous », avait également encouragé, Patrick Kanner.

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