Premier ministre : qui pour succéder à Michel Barnier à Matignon ?
Après la large censure de son gouvernement, Michel Barnier présente, ce jeudi, sa démission à Emmanuel Macron. Le chef de l’Etat s’exprimera à 20 heures. En attendant, les tractations vont bon train sur le nom de son ou sa successeur(e). Qui sont les favoris ?
Cette fois-ci pas de trêve olympique qui tienne, le chef de l’Etat va devoir nommer rapidement le successeur de Michel Barnier dont le gouvernement a été largement censuré hier soir. Au moins une certitude pour aujourd’hui. Michel Barnier ne sera pas nommé de nouveau chef du gouvernement. « Qu’est-ce que cela (aurait) comme sens ? », avait-il balayé lors du 20 heures de TF1 et France 2.
Quelles options s’offrent désormais à Emmanuel Macron qui s’exprimera ce soir à 20 heures ? Le Président peut, d’abord, choisir de reconduire « le socle commun » entre macronistes et LR, misant sur le fait que le RN ne pourra se permettre de multiplier les votes de censure, sous peine d’être accusé par une partie de son électorat d’être responsable de l’instabilité.
Sébastien Lecornu
Parmi les noms qui circulent si cette option était privilégiée, celui de Sébastien Lecornu, ministre des Armés, revient de nouveau. C’est un fidèle d’Emmanuel Macron, membre de tous les gouvernements depuis 2017. Il a l’avantage de pouvoir ménager, au moins pendant un temps, le Rassemblement national. Selon les informations de Libération, il avait rencontré au printemps dernier, lors d’un dîner, la cheffe de file du parti d’extrême droite en compagnie de Thierry Solère, conseiller politique à l’Elysée.
François Bayrou
L’option François Bayrou tourne également ces derniers jours. Allié de la première heure d’Emmanuel Macron, le président du Modem pourrait avoir la capacité de trouver des soutiens au sein de la gauche sociale démocrate. Il a été relaxé en janvier dans une affaire de détournement de fonds via des assistants parlementaires européens, une affaire semblable à celle qui menace Marine Le Pen d’une peine d’inéligibilité. Il avait, d’ailleurs, jugé sévèrement les réquisitions visant la présidente du groupe RN, de quoi permettre, pendant un temps, un pacte de non d’agression en provenance des bancs d’extrême droite.
Bruno Retailleau
L’actuel ministre de l’Intérieur a fait acte de candidature. Ces trois derniers mois, le Vendéen a occupé son portefeuille en affichant son volontarisme contre l’immigration illégale ou encore le narcotrafic. S’il a soutenu avec Michel Barnier, un plan massif de réduction de la dépense publique, sa position très droitière sur les questions régalienne rendrait plus délicate le vote d’une motion de censure par le RN.
François Baroin
C’est un peu l’Arlésienne à chaque remaniement. Le maire de Troyes, ancien président de l’Association des maires de France, qui a exercé des mandats de députés, de sénateurs et a occupé le poste de ministre du Budget et des Comptes publics, est également cité. Malgré le départ d’Éric Ciotti des Républicains, il a gardé de bonnes relations avec le patron des députés UDR. « C’est un homme de consensus, qui a des liens avec les syndicats, les partis politiques », soutenait Roger Karoutchi, le sénateur LR des Hauts de Seine, à Public Sénat, ces derniers jours.
Emmanuel Macron peut aussi faire le choix d’élargir sa majorité très relative, par une coalition gouvernementale qui s’étendrait sur la gauche. Même si la présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot a annoncé qu’elle censurerait « bien sûr » tout Premier ministre qui n’est pas issu du Nouveau Front populaire. Depuis quelques jours, dans les couloirs du Parlement et des partis, l’idée d’un pacte de non-censure qui irait du PS au LR, en passant par l’ex-majorité présidentielle, fait son chemin. Elle vient du Parti socialiste, ou plus précisément du président du groupe PS de l’Assemblée nationale, Boris Vallaud qui a proposé « à tous les présidents de groupes de l’Assemblée et du Sénat, de l’arc républicain, de poser la question des conditions d’une non-censure »
Bernard Cazeneuve
L’ancien ministre de l’Intérieur ne fait plus partie du PS après l’accord passé avec LFI en 2022. Il incarne « la gauche de gouvernement » et était cité parmi les favoris à Matignon cet été. Il aurait l’avantage de « cornériser » LFI au sein de l’Assemblée nationale tout en pouvant obtenir le soutien du centre et de la droite modérée. Toutefois, Olivier Faure, le Premier secrétaire socialiste, a jugé paradoxal de nommer l’ancien socialiste « au nom d’une victoire, celle du NFP, à laquelle il n’a pas voulu contribuer ».
Laurent Berger
L’ancien patron de la CFDT avait été sollicité à gauche notamment, par Raphaël Glucksmann, pour revêtir les habits d’homme providentiel après la dissolution. L’intéressé avait déclaré au Monde que « le nom de la personnalité qui ira à Matignon est le cadet de (s) es soucis, aujourd’hui », soulignant que « la première urgence, c’est d’éviter le Rassemblement national ».
François Villeroy de Galhau
Sans accord de « non-censure » du côté de la gauche, le chef de l’Etat pourrait être tenté par un gouvernement « technique ». Le nom du gouverneur de la banque de France revient parmi les profils, qui sur le papier, pourraient correspondre. Cet été, l’intéressé avait décliné estimant qu’il « se ferait broyer dans l’arène de l’Assemblée nationale, notamment face aux hurlements des Insoumis », selon un proche, cité dans le Figaro.
Après avoir été présenté en conseil des ministres ce mercredi 11 décembre, le projet de loi spéciale sera examiné à l’Assemblée nationale à partir du 16 décembre et au Sénat en milieu de semaine prochaine. Cet après-midi, les ministres démissionnaires de l’Economie et du budget ont été entendus à ce sujet par les sénateurs. « La Constitution prévoit des formules pour enjamber la fin d’année », s’est réjoui le président de la commission des Finances du Palais du Luxembourg à la sortie de l’audition.
Au moment où le chef de l’Etat s’apprête à nommer un nouveau premier ministre, Emmanuel Macron a reçu ce mercredi à déjeuner les sénateurs Renaissance, à l’Elysée. Une rencontre prévue de longue date. L’occasion d’évoquer les collectivités, mais aussi les « 30 mois à venir » et les appétits pour 2027…
Olivier Faure, le Premier secrétaire du PS, réclame un Premier ministre de gauche, alors que LFI refuse de se mettre autour de la table pour travailler sur la mise en place d’un gouvernement, préférant pousser pour une démission du chef de l’Etat. Ce mercredi, députés et sénateurs PS se sont réunis alors que le nom du nouveau chef de gouvernement pourrait tomber d’un instant à l’autre.
Si une semaine après le renversement du gouvernement Barnier, Emmanuel Macron est sur le point de nommer un nouveau Premier ministre, la situation politique française inquiète particulièrement les eurodéputés à Bruxelles que certains comparent à celle en Allemagne.