Pêche : « A terme le chalut n’a plus sa place » en mer, affirme Nicolas Fournier de l’ONG Oceana

Pêche : « A terme le chalut n’a plus sa place » en mer, affirme Nicolas Fournier de l’ONG Oceana

Après une forte mobilisation, les pêcheurs français ont obtenu gain de cause auprès de la Commission européenne dimanche 2 avril. L’interdiction de la pêche de fond ne sera pas imposée dans les aires marines protégées. Mais est-ce une victoire pour l’environnement et nos fonds marins ? Cette semaine, « Ici l’Europe » ouvre le débat.
Marie Bremeau

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Les pêcheurs et le gouvernement français ont obtenu de la Commission européenne qu’elle renonce à interdire d’ici 2030 le chalutage de fond dans les aires marines protégées. Un bras de fer remporté après des semaines de protestation. En France, selon le comité national des pêches, une telle mesure aurait fait disparaître près « d’un tiers de la flotte ».

Face à la fronde organisée notamment par le gouvernement français, Bruxelles a fait marche arrière. Les pêcheurs français pourront donc continuer à chaluter, c’est-à-dire à trainer de lourds filets sur le fond marin pour tenter d’attraper un maximum de poissons, sans distinction entre les espèces, y compris dans, les aires marines protégées. « On parle d’aires marines protégées, donc les zones les plus fragiles de nos océans, et de la technique la plus destructrice, la plus climaticide », s’insurge Nicolas Fournier, directeur de campagne de l’ONG Oceana, qui milite pour la protection de l’habitat marin. « Donc en fait, il y a une incompatibilité qui est reconnue au niveau international. En France, on essaie d’avoir cette compatibilité avec une aire marine protégée. C’est faux, tous les scientifiques vous le diront ! »

« Une incohérence écologique et climatique »

Environ 10 % du territoire marin de l’UE est composé d’aires marinées protégées, des espaces déterminés qui regroupent une variété de milieux naturels regorgeant d’espèces de la faune et de la flore aquatique, pour beaucoup en voie de disparition. « Les eaux européennes sont les plus chalutées au monde et on est complètement en décalage par rapport à nos ambitions climatiques ou de protection de l’environnement. A terme le chalut n’a plus sa place, il va devoir disparaître. On va devoir déchalutiser nos flottes. Il faut le faire progressivement car il y a des enjeux sociaux et économiques, mais commencer par les aires marines protégées, ça fait sens, ce sont des endroits qu’on a désignés pour protéger la biodiversité. Donc chaluter dans ces zones, c’est une incohérence écologique et climatique », ne cesse d’alerter Nicolas Fournier.

« Engager les pêcheurs dans une véritable transition »

Un avis partagé par la navigatrice et eurodéputée française Catherine Chabaud, pourtant membre de la majorité présidentielle d’Emmanuel Macron. « Je vais être complètement transparente, je ne suis pas alignée avec la position française. J’ai beaucoup interrogé les scientifiques et ils vont même beaucoup plus loin que les ONG. Ils disent qu’à terme c’est le chalut de fond qu’il faudrait stopper. Il faudrait engager les pêcheurs dans un plan de déchalutisation. », à condition poursuit-elle qu’il y ait un accompagnement des pouvoirs publics à destination de toute la filière. « La problématique c’est qu’il faudrait pouvoir engager les pêcheurs dans une véritable transition, ce qu’opère le transport maritime, qu’opèrent d’autres secteurs d’activité, comme la construction automobile. » Pour autant l’ancienne navigatrice a bien conscience de la détresse et des difficultés rencontrées par la profession. « On est dans un moment un peu conflictuel, où la problématique c’est que les pêcheurs ont l’impression que tout leur tombe dessus. Ils sont considérés comme n’étant pas exemplaires. Mais en même temps, ils sont les premiers impactés par les pollutions qui vont à la mer, ils sont aujourd’hui parmi les premiers impactés des conséquences du Brexit, des conséquences de la guerre en Ukraine….plus le sujet sur le chalutage de fond. »

« On a menti aux pêcheurs »

Nicolas Fournier, quant à lui, dénonce un mensonge originel de la classe politique.  « Quand on a proposé des aires marines protégées, on a toujours dit aux pêcheurs, ne vous inquiétez pas, vous pourrez continuer à pêcher. Et donc quelque part, on leur a menti et ils sont en colère et je l’entends. Mais le problème c’est qu’on a aussi une responsabilité politique. Aires marines protégées, on demande à n’importe qui, et bien c’est protégé, donc il faut un niveau de protection. Et pour qu’elles fonctionnent, il faut qu’elles soient protégées. Car une aire marine non protégée, donc une aire marine de papier, malheureusement c’est une fausse protection ! »

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