Gabriel Attal et Emmanuel Macron

Nouveau gouvernement : le bloc central s’ouvre doucement à la gauche… mais reste méfiant

Les responsables du bloc central, dont Gabriel Attal et François Bayrou, réunis à l’Elysée autour d’Emmanuel Macron, préparent l’après Barnier. « Le bloc central se serre les coudes et essaie de s’élargir », résume un participant. Alors que le PS montre une ouverture, l’ex-majorité présidentielle reste prudente, au point de craindre « une fausse main tendue » des socialistes.
François Vignal

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Y avait-il le futur premier ministre dans la salle ? L’histoire ne le dit pas (encore). Avant les socialistes et Laurent Wauquiez ce soir, Emmanuel Macron a reçu ce vendredi matin les responsables du bloc central à l’Elysée, deux jours après la chute du gouvernement Barnier.

Devant Gabriel Attal et François Patriat pour Renaissance, François Bayrou et Marc Fesneau pour le Modem, Laurent Marcangeli et Claude Malhuret pour Horizons, sans oublier le président de l’UDI et du groupe centriste du Sénat, Hervé Marseille, qui a rejoint la bande depuis les européennes, Emmanuel Macron n’a pas lâché le nom de son ou de sa futur(e) premier ministre. La fumée blanche devrait apparaître après un week-end marqué par l’inauguration de Notre-Dame de Paris. « Il a dit qu’il nommera, vraisemblablement, le premier ministre lundi », soutient un responsable du bloc central, ce que confirme un autre.

Trois lignes différentes pour construire la suite

La réunion, qui a duré 1h15, a débuté par un classique tour de table, le Président demandant à chacun, comme à son habitude, comment il voit les choses. « Tout le monde est tombé d’accord sur le fait qu’il y a un socle qu’il faut préserver », raconte l’un des participants de la réunion.

« La ligne » qui ressort de la réunion, « c’est le socle, en essayant d’élargir et d’ouvrir », explique un élu. « Le bloc central se serre les coudes et essaie de s’élargir », résume et confirme un des cadres du bloc central, présent à l’Elysée.

Elargir, mais comment ? Pour espérer trouver une sortie de crise, trois lignes sont ressorties des échanges, selon les participants. Ceux qui défendent l’idée de dialoguer avec les responsables des partis politiques pour trouver un accord. Ceux, comme François Bayrou, qui pensent que cette solution est vouée à l’échec, car les partis sont emprisonnés par leurs positions tactiques et électorales, plaidant plutôt pour une posture plus gaullienne, en rassemblant des personnalités au gouvernement et en s’adressant à l’opinion. Enfin ceux, comme François Patriat, qui pensent qu’il faut déjà enlever de la discussion les préalables irritants, comme la réforme des retraites, pour trouver ensuite des solutions.

« Les socialistes ayant fait un bougé, ça se regarde. Mais c’est assez confus »

Pour agrandir le cercle, c’est plutôt du côté gauche que les macronistes regardent. « S’il faut élargir le socle commun, où est-ce qu’on peut le faire ? A droite, on ne peut pas. Après les LR, c’est Eric Ciotti. On ne peut élargir qu’à gauche. Ça veut dire aller chercher des gens capables de dialoguer avec nous et de trouver, non pas une coalition, mais des compromis, et comme propose Gabriel Attal, dans quelles conditions la gauche ne censurerait pas la gouvernement », explique un responsable du bloc.

Ça tombe bien, le PS tend la main depuis quelques jours, quitte à mettre à mal le NFP et à susciter l’ire de LFI. Mais au sein du bloc central, un certain doute existe. L’ex-majorité présidentielle peut-elle faire confiance aux socialistes ? « Les socialistes ayant fait un bougé, ça se regarde. Mais c’est assez confus. On ne sait pas ce qu’ils veulent, combien ils sont. Faure, Kanner et Vallaud, c’est trois lignes différentes. Et jusqu’où sont-ils prêts à aller ? » interroge-t-on. Mais a minima, s’il était possible « de créer un espace de non censurabilité, un cadre de fonctionnement pacifique, au moins jusqu’à l’été, ce sera positif ».

« Plus vous allez à gauche, plus vous perdez à droite »

Le bloc central se retrouve cependant face à un dilemme. Difficile d’ouvrir d’un côté sans perdre de l’autre. « Plus vous allez à gauche, plus vous perdez à droite. Mais plus vous allez à droite et plus vous perdez à gauche. C’est toute la difficulté », résume un cadre du bloc central. Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur sortant et LR, a clairement mis la pression ce vendredi, ne voulant pas de socialiste au gouvernement.

L’attitude des socialistes, qui voudraient en substance, aux yeux des macronistes, le beurre et l’argent du beurre, laisse dubitatif. Un participant à la réunion résume sa pensée :

 Les socialistes sont gentils, ils votent la censure puis veulent le premier ministre et les manettes. C’est un peu gros de voter la censure le mercredi et de demander Matignon vendredi. 

Un participant à la réunion autour d'Emmanuel Macron.

Et s’il y a un « embryon de volonté du PS de se séparer de LFI », remarque un responsable, un autre souligne qu’« ils sont encore liés à LFI sur le plan électoral ». De quoi appeler à la « prudence » sur l’évolution des socialistes. Un élu parle même de « fausse main tendue du PS. Car leurs exigences rendent cette main inaccessible ». Le chef de l’Etat en veut aux socialistes d’avoir voté la censure. C’est pourquoi, s’ils espèrent « entrer au gouvernement, il faut vraiment donner des gages ».

« La possibilité qu’il y ait un premier ministre de gauche n’est pas la plus certaine »

Mais à la sortie de la réunion, la tonalité est qu’Emmanuel Macron ne nommera pas cette fois un premier ministre de l’autre côté de l’échiquier politique. « La possibilité qu’il y ait un premier ministre de gauche n’est pas la plus certaine », lâche un des élus. « Un premier ministre socialiste, je ne vois pas comment ça marche », ajoute un autre.

Si un accord de non-censure pouvait malgré tout ressortir des discussions, quelques sujets sont mis sur la table : le budget bien sûr, mais aussi la fin de vie, la transposition du pacte asile et immigration, la loi agricole. « Là-dessus, on peut s’entendre pour voter cela, sans qu’il y ait de censure », croit un responsable du bloc.

A Matignon, Bayrou, Lecornu… ou Vautrin ?

Quant à la dissolution, « Emmanuel Macron a dit que ce n’était pas une fin en soi. Si ça marche, il n’y a pas de raison » à y recourir à nouveau en juillet, quand le chef de l’Etat pourra à nouveau le faire, rapporte un participant. L’objectif optimiste serait « de tenir au moins jusqu’à l’automne prochain », ajoute un autre.

D’ici là, le Président devra nommer un remplaçant à Michel Barnier. « Bayrou a la capacité à agir. Il peut travailler avec le PS. Mais c’est compliqué avec les LR », note-t-on. « Ça peut être Bayrou. Hier, c’était Lecornu. Demain, ce sera peut-être Baroin », sourit un cadre du bloc. Autrement dit, les pistes changent vite. Nouveau nom qui apparaît : Catherine Vautrin, ministre sortante du Partenariat avec les territoires. A deux doigts de mettre un pied à Matignon en mai 2022, c’est finalement Elisabeth Borne qui avait été choisie.

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