FRA : Hotel de MATIGNON

Nouveau Front populaire : des parlementaires ne voient pas d’issue avant la fin de l’été

La gauche est toujours dans l’impasse, deux semaines après le résultat des législatives. Les quatre principaux partis du Nouveau Front populaire ne sont toujours pas parvenus à se mettre d’accord autour d’un nom partagé de tous pour Matignon. Plusieurs parlementaires estiment ces divisions contreproductives, en l’absence d’appel de l’Élysée.
Guillaume Jacquot

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Le temps de l’exaltation, provoquée par les résultats du second tour des élections législatives, est désormais loin à gauche. Deux semaines après avoir terminé en tête du scrutin, le Nouveau Front populaire (NFP) peine à parler d’une seule fois. Les négociations entre ses différentes composantes, pour faire émerger un nom pour Matignon, s’enlisent. Après la présidente de La Réunion, Huguette Bello (ex-PCF), qui a jeté l’éponge mi-juillet, faute de consensus sur son nom, c’est au tour de l’économiste et diplomate Laurence Tubiana de décliner une invitation à diriger un hypothétique gouvernement de gauche. La candidate issue de la société, poussée par les socialistes, et soutenue par les écologistes et les communistes, ne convenait pas aux Insoumis. L’option n’était « pas sérieuse », affirmait leur coordinateur national Manuel Bompard. Poussée par les communistes et LFI, Huguette Bello a, quant à elle, essuyé un refus de la part des socialistes.

« Le temps presse », insistait le PS en fin de semaine dernière, en fixant un ultimatum

En pleines turbulences, le NFP poursuit tant bien que mal ses efforts. Les négociations, à l’arrêt ces derniers jours, ont repris ce week-end. « Nous continuons de travailler pour trouver une solution », nous confiait ce matin un membre de la direction nationale du Parti socialiste, sans donner de détails. Vendredi soir, le parti à la rose avait fixé un ultimatum, en demandant que les députés de gauche se prononcent sur un nom, par le biais d’un vote, « au plus tard mardi 23 juillet ». « Le temps presse », a mis en garde son bureau national.

C’est une vraie divergence de fond entre socialistes et insoumis, qu’il s’agisse de la méthode ou du calendrier. Partisane d’un chef de gouvernement issu de ses rangs, en tant que première force du Nouveau Front populaire, LFI n’est pas favorable à l’émergence d’un nom par le vote. Encore moins dans l’urgence. « Les Allemands et les Espagnols ont mis des mois à former un gouvernement », a rappelé Jean-Luc Mélenchon dans le quotidien italien La Repubblica. Idem sur le contenu. Sur la ligne politique, l’ancien candidat à la présidentiel a également ciblé vendredi la volonté des socialistes à « élargir », « quitte à renoncer » au programme.

Un mince espoir après la bataille des postes clés à l’Assemblée nationale

L’ambiance n’est pas pour autant à la résignation dans les rangs du NFP. Si François Ruffin a s’est désolé, dans une vidéo, de la « nullité » de l’union de la gauche à faire émerger un nom pour Matignon, d’autres restent a contrario confiants dans les capacités des quatre partis à s’entendre, comme en témoigne la présentation de candidats communs à tous les postes à responsabilité de l’Assemblée nationale. Le patron des députés communistes, André Chassaigne, revient d’ailleurs dans plusieurs médias dans les noms des nouveaux premier-ministrables. « Le moment de l’élection au perchoir a été un moment où, de nouveau, l’unité de toutes les composantes du NFP a été totale. Ça a ressoudé », estime la sénatrice écologiste Raymonde Poncet-Monge. Idem pour le député PS Arthur Delaporte, qui estime que « l’impasse » du Premier ministre au sein du Nouveau Front populaire doit être « relativisée ». « Ce n’était pas attendu qu’on se mette aussi facilement d’accord […] j’ai bon espoir qu’on arrive aussi à reprendre le fil des discussions pour avancer collectivement d’ici demain », a lancé le député du Calvados sur BFMTV.

Pour Raymonde Poncet-Monge, une des clés de la solution se trouve probablement dans la définition des mesures essentielles à mettre en œuvre, dans une Assemblée nationale très fragmentée, et dont la durée de vie pourrait ne pas excéder un an. « Là, on n’a qu’une bataille de noms, je trouve ça très pauvre. Les négociations sont assez pauvres, on tourne en rond. Il faut que tout le monde se mette sur la table les mesures législatives et les pistes de financement que l’on veut défendre dans les prochains mois. Il faut que le prochain nom vienne avec une proposition de séquençage des priorités pour 2024 », appelle l’écologiste. Le sénateur PS Rachid Temal a également appelé à « changer de méthode ». « Au lieu de chercher la/le locataire de Matignon qui dépend du président de la République, le NFP doit proposer dix mesures concrètes qu’il souhaite faire adopter par le parlement », a encouragé le sénateur du Val-d’Oise sur X.

« Il appartient au président de la République d’appeler un Premier ministre issu de la gauche. À ce moment, les choses se feront »

D’autres collègues jugent le principal objet de la négociation dépassé, et surtout, contreproductif. « Je le dit depuis le début. Le mieux est de jouer la partition dans l’ordre, d’éviter de jouer à la belote avec un jeu de tarot. Il appartient au président de la République de jouer son rôle, de respecter les institutions, d’appeler maintenant un nouveau premier ministre, issu des rangs de la gauche. À ce moment, les choses se feront », nous déclare la présidente du groupe communiste, Cécile Cukierman. Une analyse que partage également l’écologiste Raymonde Poncet-Monge. « Risquer que le front à quatre se fissure, alors que le Premier ministre ne sera peut-être jamais nommé, c’est quand même une difficulté », évoque la parlementaire du Rhône. « La gauche est bien la seule à se torturer sur cette question fratricide de qui sera choisi pour Matignon. Les Français ne s’y intéressent plus et les électeurs sont désespérés de ces guéguerres vaines. Le président de la République nommera qui il veut. On passe à autre chose », a également réagi la socialiste Hélène Conway-Mouret.

Et c’est d’ailleurs la petite musique qui monte à la France insoumise. Son coordinateur, Manuel Bompard, s’est aussi accordé sur ce constat, ce matin, sur Europe 1 et CNews. « Il faut prendre les choses étape par étape. La responsabilité, elle appartient aujourd’hui au président de la République de se tourner vers le Nouveau Front populaire pour lui demander de constituer un gouvernement. S’il le fait, nous terminerons nos discussions et lorsque nous aurons terminé nos discussions, nous lui proposerons effectivement un candidat ou une candidate. »

Et justement, la question ne devrait plus se poser avant la fin de la coupure estivale, et de la séquence olympique. Ce matin, en en marge de la visite du village des athlètes à Saint-Denis, Emmanuel Macron a appelé à une « trêve olympique et politique » dans ce contexte de « fête sportive ». Cette déclaration sous-entend que l’Élysée ne devrait pas annoncer la formation d’un nouveau gouvernement avant la fin des Jeux olympiques, le 11 août, voire des Jeux paralympiques, le 8 septembre. « Je crois que le calendrier qui se dessine, c’est qu’il faut que nous soyons prêts le 25 août, pour revenir devant les Français », indique Cécile Cukierman.

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