Nouveau Front populaire : députés et sénateurs réunis pour une démonstration de force

Les près de 130 parlementaires PS avaient rendez-vous au Sénat pour une réunion « opérationnelle », explique le président des sénateurs socialistes Patrick Kanner. Une rencontre qui permet aussi d’afficher le poids du parti au Parlement, à l’heure où les négociations patinent toujours pour Matignon, sur fond de désaccords avec La France insoumise.
Rose Amélie Becel

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Peu après avoir annoncé le communiste André Chassaigne comme candidat du Nouveau Front populaire à la présidence de l’Assemblée nationale, les députés socialistes avaient rendez-vous en début de soirée avec leurs collègues de la chambre haute. Dans une ambiance joyeuse, le président du groupe socialiste au Sénat Patrick Kanner a accueilli son homologue de l’Assemblée Boris Vallaud en le serrant dans ses bras. « Nous nous retrouvons pour partager un moment politique, puis un moment de convivialité », précise ce dernier.

Le « moment politique » aura duré un peu plus d’une heure, suivi d’une grande photo de famille sur le perron central du Sénat. L’occasion pour les près de 70 députés socialistes de se joindre aux 64 élus de la chambre haute, formant le plus important groupe parlementaire de gauche. « Dans le cadre des grands équilibres de la gauche, la social-démocratie reprend des couleurs », se réjouit Patrick Kanner.

Patrick Kanner « rêve » de voir les sénateurs de gauche associés aux négociations

Au menu des discussions, explique le sénateur du Nord, une question « opérationnelle » : « L’objet, c’est de savoir comment nous pouvons mettre en phase nos chefs de file dans les différentes commissions, qui seront désignées à l’Assemblée nationale à partir de ce week-end ». « Mais nous ferons aussi un peu de politique politicienne », concède-t-il.

Pour les sénateurs socialistes, qui demandent davantage de poids avec leurs collègues communistes et écologistes dans le cadre des négociations du Nouveau Front populaire pour Matignon, la rencontre de ce soir est en effet particulièrement importante. Si le bloc de gauche décidait d’organiser un vote des parlementaires pour désigner son candidat au poste de Premier ministre, les socialistes dépasseraient numériquement La France insoumise et seraient en position de force pour avancer une proposition.

« Ce serait un rêve que nous puissions être totalement associés à ce choix prioritaire », espère Patrick Kanner, « je sais bien que ce sera compliqué, nous [le Sénat] ne pouvons pas être dissous, nous ne pouvons pas déposer de motion de censure… Mais nous ne sommes pas des sous parlementaires, sans majorité absolue notre voix comptera autant, notamment dans les commissions mixtes paritaires. »

Candidat pour Matignon : « J’espère que, dans les prochaines heures, nous aurons la capacité de dire quel est le mode d’emploi »

Interrogés à l’issue de la réunion, les parlementaires n’ont pas souhaité en dire davantage sur l’étendue des discussions. Mais la question du mode de désignation d’un candidat du Nouveau Front populaire pourrait effectivement avoir été abordée. « Il faut qu’on se pose la question de savoir comment est-ce qu’on aboutit sur la question du Premier ministre et j’espère que, dans les prochaines heures, nous aurons la capacité de dire quel est le mode d’emploi », affirmait le premier secrétaire du PS Olivier Faure juste avant la rencontre.

Si la solution privilégiée pour le moment reste celle d’une candidature consensuelle entre les quatre forces politiques du bloc de gauche, la tension est montée d’un cran ces derniers jours. Après le refus par les socialistes de la candidature d’Huguette Bello à Matignon, La France insoumise avait annoncé il y a deux jours la suspension des négociations, accusant le PS de « blocage ». De leur côté, les socialistes ont avancé le profil de Laurence Tubiana, refusé cette fois-ci par les insoumis. Dans ce contexte électrique, la secrétaire nationale des Écologistes Marine Tondelier s’est dit « écœurée » et « en colère », face à une « guerre de leadership » entre les socialistes et les insoumis.

Olivier Faure affirme toutefois que les deux partis n’ont « jamais arrêté de parler » : « Il y a beaucoup de théâtralisation dans ces moments-là, comme dans toutes les négociations il y a beaucoup de cinéma. Nous avons réussi à nous mettre d’accord sur un nom pour le perchoir à l’Assemblée, c’est le signe que nous parlons ». Pourtant, pour le moment, aucun consensus ne semble émerger. Le premier secrétaire du PS affirme en effet maintenir la proposition de son parti autour de la candidature de Laurence Tubiana. « Elle est de celles qui peuvent permettre, par son expérience, sa réputation, ses réseaux, de faire en sorte que demain nous puissions avancer vite et avec de nombreux soutiens », estime-t-il. Pas celui de La France insoumise en tout cas, ce qui maintient le Nouveau Front populaire dans l’impasse.

Avec Adrien Pain et Eglantine Mougin

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