À l’occasion d’une conférence de presse au Sénat, les deux parlementaires loyalistes de Nouvelle-Calédonie ont rappelé leur soutien au gouvernement avant le vote du budget. Ces derniers ont fait adopter deux amendements permettant d’alléger la fiscalité pour les investissements en Nouvelle-Calédonie.
Michel Barnier renonce à la hausse des taxes sur l’électricité : un geste qui exprime « le rapport de force vis-à-vis de Marine Le Pen »
Par Romain David
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Michel Barnier lâche du lest sur la copie budgétaire. Le Premier ministre annonce renoncer à augmenter les taxes sur l’électricité, une mesure décriée par de nombreux groupes politiques dont le Rassemblement national qui menace de censurer le gouvernement la semaine prochaine. « Que ce soit dans ma majorité ou les chefs de l’opposition que j’ai reçus : presque tous m’ont demandé d’évoluer », assure le Savoyard dans un entretien au Figaro. Selon lui, ce geste devrait permettre « une baisse des prix de l’électricité de 14 %, qui ira donc bien au-delà de la baisse de 9 % prévue initialement ».
« Dès que l’on fait sentir la menace d’une censure, finalement, on arrive à trouver des solutions… », sourit auprès de Public Sénat le sénateur RN du Pas-de-Calais Christopher Szczurek. « Reste à savoir si cette mesure se fera au prix d’une augmentation d’autres charges. Pour l’instant je n’ai pas suffisamment d’éléments pour vous dire si elle pourrait nous satisfaire », confie-t-il.
Les sénateurs, qui sont en train d’examiner le projet de loi de finances pour 2027, ont déjà rejeté dans la nuit de mardi à mercredi la hausse de la taxe sur l’électricité, qui devait rapporter 3,4 milliards d’euros au gouvernement. À la place, la majorité sénatoriale a proposé de relever de 4 euros par MWh l’accise du gaz naturel à usage combustible. On ignore pour l’heure si ce mécanisme, qui mécontente tout autant les oppositions, sera celui retenu par l’exécutif.
Les exigences du RN
Un peu plus tôt dans la journée, sénateurs et députés du Rassemblement national se sont réunis pour évoquer la ligne qu’ils défendront la semaine prochaine sur une éventuelle censure du gouvernement.
Auprès des chefs de file des groupes parlementaires qu’il a reçus cette semaine à Matignon, Michel Barnier a confirmé son intention d’engager la responsabilité de son gouvernement lundi pour faire passer le budget de la sécurité sociale. Le recours à l’article 49.3 de la Constitution devrait entraîner le dépôt d’une motion de censure à gauche de l’hémicycle. Reste désormais à savoir si Marine le Pen et ses troupes, qui n’ont cessé de hausser le ton contre l’exécutif ces derniers jours, la voteront.
« Il ne faut pas croire que l’on est suffisamment butés pour voter à tout prix la censure et que nous voudrions camoufler notre volonté », explique Christopher Szczurek, qui assure que son parti cherche d’abord à « défendre l’intérêt des Français ». À ce stade, le RN entend encore laisser passer le week-end avant d’arrêter sa position.
Mais dans un communiqué publié en milieu d’après-midi, le parti présidé par Jordan Bardella met la barre particulièrement haut, appelant notamment le Premier ministre à baisser « drastiquement » l’Aide médicale d’Etat ou à négocier avec Bruxelles une baisse de la contribution de la France au budget de l’Union Européenne. Le chef du gouvernement fera-t-il d’autres concessions d’ici lundi ? « S’il cède sur des mesures qui ne sont réclamées que par l’extrême droite, alors il apparaîtra comme étant vraiment aux mains de Marine Le Pen », avertit un membre du bloc central.
« Evidemment qu’il a fait un geste vis-à-vis du RN, ça n’est pas honteux de le dire »
« Il est faux de dire que le gouvernement cède aux exigences de Marine Le Pen », s’étrangle auprès de Public Sénat François Patriat, le chef de file des sénateurs macronistes. « L’annulation de la hausse des taxes sur l’électricité est une demande qui vient du Sénat. Nous l’avons votée », rappelle ce proche d’Emmanuel Macron. « C’est une mesure populaire, qui profitera pleinement aux Français ».
Dans un communiqué, les LR du Sénat rappellent qu’elle était « une priorité » pour leur groupe. « Nous nous réjouissons que le Premier Ministre ait écouté la voix de la majorité sénatoriale », écrivent-ils. « L’annulation de cette surtaxation était demandée par tous les groupes au Sénat. Cela impacte le pouvoir d’achat, c’était socialement beaucoup trop dur », abonde, au micro de BFMTV, la sénatrice LR de Paris Agnès Evren. « Evidemment que Michel Barnier a fait un geste vis-à-vis du RN, ça n’est pas honteux de le dire, parce qu’aujourd’hui il faut trouver des compromis », concède-t-elle.
Elle admet toutefois « ne pas être sûre » que cette annonce suffise à épargner la censure au gouvernement. « Je suis absolument convaincue que Marine Le Pen et LFI sont dans une alliance de postures électoralistes, de démagogie, d’irresponsabilité », dénonce Agnès Evren.
« Aujourd’hui, Marine Le Pen gouverne par procuration »
« Nous ne sommes pas défavorables » à l’abandon de la surtaxation de l’électricité, indique Patrick Kanner, le président du groupe socialiste au Sénat. Mais il estime que cette annonce exprime d’abord « le rapport de force vis-à-vis de Le Pen ». « Hier quand on a rencontré Michel Barnier avec Boris Vallaud, il nous a dit qu’il ne négociait rien avec le RN, qu’il ne faisait que l’écouter, il l’a dit à plusieurs reprises. Dont acte. Il y a une écoute attentive », ironise l’élu du Nord. « Le choix de Barnier est clair : il soigne sa droite et son extrême droite », ajoute-t-il.
« C’est une mesure en forme de bouteille à la mer, certainement pas une réponse structurelle à la crise très profonde que traverse notre pays », tacle la sénatrice Cécile Cukierman, présidente du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
« Aujourd’hui, le gouvernement travaille son budget sans ligne, sans orientation, seulement pour vivre un jour de plus », soupire Guillaume Gontard, le patron des sénateurs écolos. « Marine Le Pen joue au chat et à la souris avec le Premier ministre. Si elle ne vote pas la censure, cela voudra dire qu’elle a réussi à cranter d’autres choses avec le gouvernement, sur d’autres textes. Aujourd’hui, elle gouverne par procuration », conclut-il.
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