Mega-bassines : un rapport du Sénat plaide pour des retenues d’eau « multiples usages »

Mega-bassines : un rapport du Sénat plaide pour des retenues d’eau « multiples usages »

A la sortie d’un week-end d’extrêmes tensions autour de la construction d’une mega-basssine à Sainte-Soline dans les Deux-Sèvres, retour sur les préconisations du Sénat sur la gestion de l’eau. Il y a quelques mois, la délégation à la prospective appelait à une « approche pragmatique » des « retenues d’eau », les fameuses « bassines ».
Simon Barbarit

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Les mega-bassines sont devenues un symbole des conséquences pour l’agriculture du réchauffement climatique. Cette année, la France a connu l’un de ses hivers les plus arides en un demi-siècle. Les violents affrontements de ce week-end entre manifestants écologistes et forces de l’ordre autour de la construction d’une mega-bassine dans les Deux-Sèvres sont un nouvel aperçu des tensions que le réchauffement climatique produit et continuera de produire sur le système hydraulique en France.

« La hausse de la température moyenne de la planète, en modifiant le régime des précipitations et en asséchant l’air, va immanquablement perturber le cycle de l’eau sur l’ensemble du territoire hexagonal », posait ainsi le rapport de la délégation sénatoriale à la prospective, remis en décembre 2022. Le travail des sénateurs mettait en évidence « un stress hydrique accru », auquel « aucune partie du territoire ne pourra totalement échapper », mais dont les conséquences locales seront « très différenciées », avec une inquiétude particulière pour les zones les plus septentrionales du pays.

Adopter une « approche pragmatique »

Dans ce contexte, les élus alertaient sur la multiplication « des conflits d’usage avec des crises de l’eau à répétition ».

Si « la priorité est donnée à la sobriété » dans ce rapport, la délégation à la prospective insiste bien sur le fait que la politique de l’eau ne peut pas reposer que sur la sobriété seule. Le rapport appelait à « déployer un panel de solutions variées pour mieux mobiliser la ressource en eau », en adoptant notamment une « approche pragmatique » sur le « sujet sensible » des retenues d’eau.

Le rapport relevait bien les craintes des associations environnementales, notamment sur les retenues d’eau en plaine, communément appelées « bassines », qui procèdent aussi à du pompage dans les nappes phréatiques, et sur le « faux sentiment de sécurité » que cela pourrait créer chez les agriculteurs qui se montreraient moins économes en consommation d’eau. Toutefois, les rapporteurs estiment que la réglementation actuelle est déjà assez exigeante et « interdit le stockage de confort ». La France stocke assez peu d’eau par rapport à ses voisins (4,7 % du flux annuel) et qu’ainsi « disqualifier globalement le stockage d’eau ne paraît pas fondé scientifiquement. »

La piste de la réutilisation des eaux usées

Les rapporteurs plaidaient donc pour la construction de nouvelles retenues d’eau, « multi-usages », et pas seulement réservées aux agriculteurs, « lorsque le service environnemental rendu est positif. » La co-rapporteure communiste, Cécile Cukierman insistait ainsi sur le fait « que la question n’est pas de faire des absurdités environnementales », mais simplement « d’avoir des retenues d’eau qui peuvent servir à de multiples usages », comme la gestion des feux de forêts par exemple. Par ailleurs, d’autres techniques, comme les transferts entre bassins, du Rhône à l’Hérault et l’Aude avec l’Aqua Domitia par exemple, ou la recharge artificielle des nappes sont aussi évoquées. Mais c’est la réutilisation des eaux usées traitées qui a le plus convaincu les sénateurs, qui appellent à encourager la recherche sur le sujet. « La réutilisation des eaux usées est très peu développée en France, où moins de 1 % des eaux récupérées en sortie des stations d’épuration sont exploitées, à l’inverse de l’Italie, l’Espagne ou encore Israël, où le taux de réutilisation atteint respectivement 8 %, 15 % et 90 % » rappelait le rapport.

« Repolitiser la gouvernance de l’eau »

Enfin, sur ce sujet éminemment clivant, les élus appelaient à « repolitiser la gouvernance de l’eau ». « La gestion de l’eau est un domaine ardu, souvent laissé aux techniciens, dont les élus ont du mal à se saisir. Or, la légitimité des choix politiques en matière de gestion de l’eau passe par une re-politisation de ses instances et le renforcement de l’échelon local de prise de décision », notait ainsi les sénateurs.

 

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