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Loi de programmation militaire : un texte qui « politiquement tombe mal » en pleine contestation sociale ?
Par François Vignal
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Entre l’opposition à la réforme des retraites et la situation au Parlement, la suite du quinquennat d’Emmanuel Macron s’annonce pour le moins compliquée. C’est pourquoi il a chargé la première ministre de remettre à plat l’agenda parlementaire et de fixer les priorités. Si la loi immigration a déjà fait les frais de la situation, un autre texte interroge certains. C’est la loi de programmation militaire (LPM), qui prévoit un budget de 413 milliards d’euros sur la période 2024-2030. Si la présentation du texte est prévue la semaine prochaine, en Conseil des ministres, certains se posent des questions sur le timing politique, qui viendrait entrechoquer la contestation contre la réforme des retraites.
« Annoncer 400 milliards d’euros quand vous courrez après 13 milliards sur les retraites… ça fait réfléchir »
« Il y a beaucoup d’interrogations sur la LPM. Car annoncer 400 milliards d’euros quand vous courrez après 13 milliards sur les retraites… ça fait réfléchir. Après, il y a des besoins militaires. Mais de l‘autre côté, socialement, quand on dit vous mettez 400 milliards d’euros dans l’armée, même si c’est pluriannuel… » glisse un sénateur. « Ils se disent au gouvernement que, politiquement, ça tombe mal », résume le même, selon qui les interrogations « viennent aussi de l’Elysée, de partout ».
Il ne s’agit pas de questions sur la nécessité en soi de la LPM, défendue et annoncée par le chef de l’Etat. Mais « après, il faut le vendre politiquement », insiste notre sénateur. Alors que le message est à l’apaisement, avec des sujets jugés plus consensuels comme l’éducation et la santé, les questions militaires risquent en effet de moins cocher ces cases…
« En gros, le sentiment ce sera qu’il y a de l’argent. Et on va le mettre aux armées, même s’il y a une nécessité, plutôt que sur les hôpitaux, les services publics »
Une partie des opposants à gauche pourraient bien en effet s’emparer du sujet. Au groupe écologiste du Sénat, si son président Guillaume Gontard défend sur le fond la « nécessité » de la LPM, surtout dans « une période complexe », le sénateur de l’Isère « comprend qu’on puisse se poser la question, ou que le gouvernement s’en pose ».
« Je ne pense pas que qu’ils lâcheront sur la LPM, car il y aura une majorité. Mais si on évacue les autres textes et qu’il reste celui-là, ça va se voir. Si on est capable de mettre 413 milliards d’euros pour l’armée, et que par contre on demande aux Français de travailler deux ans de plus pour essayer de gratter quelques milliards, le gouvernement sera forcément face à cette difficulté », pense Guillaume Gontard. « En gros, le sentiment ce sera qu’il y a de l’argent. Et on va le mettre aux armées, même s’il y a une nécessité, plutôt que sur les hôpitaux, les services publics, etc. Ce sera perçu de cette manière, car le gouvernement n’a pas de cap, si ce n’est de répondre aux injonctions des 3 % de déficit », selon le sénateur, membre de la commission des affaires étrangères et de la défense. Le président de groupe ajoute : « On a retiré la loi immigration – là j’étais plutôt content –, ils retirent le SNU (Service national universel) obligatoire. Et on dit que la LPM va poser problème, car ça va se voir. On est face à un gouvernement qui ne peut quasiment plus gouverner en réalité ».
Christian Cambon (LR) a reçu des « assurances » du ministère des Armées sur le maintien de la LPM
Dans cette période de remise à plat de l’agenda parlementaire, le président de la commission des affaires étrangères et de la défense du Sénat, le sénateur LR Christian Cambon, a cherché à savoir ce qu’il en était. « J’ai posé la question il y a cinq jours au ministère des Armées. Il m’a dit que la LPM était tout à fait maintenue. C’est le sentiment général, car on en a besoin. J’ai reçu toutes les assurances », assure Christian Cambon.
Pas question non plus de retarder l’examen au Parlement, le temps que le climat social s’apaise. « Compte tenu des besoins de nos forces armées et du contexte international, ce serait une erreur et une faute politique grave de regarder le problème sous cet angle », avance le sénateur LR, « le retard du vote de la LPM affaiblirait grandement nos forces armées et nuirait à la sécurité des Français, à un moment où plus que jamais, la situation internationale nécessite que l’on renforce nos armées ». Pour l’heure, l’examen du texte est prévu à l’Assemblée nationale en mai et la troisième semaine de juin au Sénat.
Christian Cambon fait remarquer au passage que « ce n’est pas juste de rapporter les 13 milliards des retraites face à ces 413 milliards. C’est une interprétation erronée car il faudrait comparer le budget total des retraites au budget des armées. Par ailleurs, il faut regarder la hausse du budget de la LPM. Celle qui se termine, c’est 296 milliards d’euros. Donc la hausse, c’est un peu plus de 100 milliards d’euros pour les années de 2024 à 2030, c’est de cet ordre ».
« L’agenda est lié à une contrainte extérieure, qu’on ne choisit pas. La réalité ne se discute pas »
Signe que le niveau de dépenses militaires est bien un enjeu, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, et celui de l’Economie, Bruno Le Maire, se sont fendus d’une interview croisée dans Le Figaro daté du 28 mars. Le titre de la version papier semble être une réponse à ceux qui pointent le coût de l’effort annoncé : « Il serait irresponsable de ne pas réinvestir dans le domaine militaire ». Interrogé sur la difficulté à justifier cet effort en pleine contestation sociale, Sébastien Lecornu assume. « Notre sécurité n’est pas négociable ! N’opposons pas sécurité collective et protection sociale », lance le ministre, qui rappelle que « la France consacre 30 % de sa richesse nationale aux dépenses sociales », quand « 1,9 % du PIB » est consacré aux armées, l’objectif étant d’atteindre les « 2 % en 2025 ».
« L’agenda est lié à une contrainte extérieure, qu’on ne choisit pas. La réalité ne se discute pas », avance de son côté le sénateur Renaissance André Gattolin. « Je comprends bien que ça se bouscule, mais je ne vois pas de focalisation de l’opinion sur la question de la LPM. J’en vois davantage dans le projet de SNU », ajoute le sénateur des Hauts-de-Seine, membre de la commission des affaires étrangères. Il ajoute : « Je ne vois pas beaucoup les forces politiques appuyer sur ça, à part bien sûr des groupes de la gauche de la gauche, qui diront on ferait mieux de faire la paix. Mais les gens ne sont plus dans l’angélisme ».
Désaccord au sein de l’exécutif sur le niveau des dépenses de la LPM
Reste que le niveau de dépenses est bien sujet à débat au sein de l’exécutif. Selon L’Opinion, « Elisabeth Borne souhaite freiner la hausse du budget des armées », titre le quotidien, qui parle de « vrai désaccord (qui) existe au sein de l’exécutif sur la future loi de programmation militaire ». Selon les informations de L’Opinion, « Matignon souhaitait que le montant de la LPM ne dépasse pas 392 milliards sur sept ans ». L’Elysée a finalement arbitré sur les 413 milliards d’euros, mais toujours selon le journal, « la bataille se joue désormais sur la « hauteur des marches » », c’est dire le rythme, plus ou moins rapide, de la hausse du budget. On devrait connaître les détails la semaine prochaine, lors de la présentation du texte en Conseil des ministres. Mais il n’est pas impossible que le sujet donne un peu de carburant aux armées de manifestants…