Législatives : « Une situation profondément antidémocratique », tance Pascal Savoldelli, qui demande le dégel du corps électoral
Par Alexis Graillot
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C’est une petite ligne au milieu d’un texte de 15 articles qui fait tiquer plusieurs élus. Dès la publication du décret, les élus LFI avaient déposé un recours devant le Conseil constitutionnel pour contester le gel du corps électoral. « Cette décision du monarque présidentiel est un grave problème démocratique alors que notre pays compte 11 millions de gens non et mal inscrits sur les listes électorales. Principalement des jeunes et des précaires », souligne le communiqué du parti, qui dénonce un gel « dangereux » et « irresponsable ». « Emmanuel Macron prive ainsi des millions de personnes de leur droit de vote alors que seule la mobilisation populaire peut battre l’extrême-droite », défendent les Insoumis.
Ce lundi 17 juin, c’est Pascal Savoldelli, sénateur communiste du Val-de-Marne qui s’insurge contre ce gel des listes électorales pour les personnes non-inscrites avant le 10 juin. Avec cependant une nuance de taille puisque l’élu ne souhaite pas une décision juridique par le Conseil constitutionnel, mais une modification réglementaire, qui impute seulement à l’exécutif. « Cette situation est profondément antidémocratique, car elle exclut une partie significative de la population du processus électoral », critique-t-il sévèrement.
« Est-il possible de sanctuariser ainsi le corps électoral d’une élection européenne alors que la portée des élections législatives est tout autre d’un point de vue politique et suscite un engouement démocratique ? »
Dans ce courrier, Pascal Savoldelli fait part de sa « préoccupation » quant aux élections du 30 juin et du 7 juillet, alors que de nombreux électeurs sont en effet non-inscrits ou « mal » inscrits. Il faut dire que la séquence est toute particulière puisque selon le code électoral, l’inscription sur les listes « doit être déposée au plus tard le sixième vendredi précédant le 1er tour de scrutin » (article L17). Une configuration impossible dans le cas présent, les élections se déroulant seulement trois semaines après la date des élections européennes, d’où la décision de geler les listes.
« Votre choix rend donc impossible l’inscription de nouvelles électrices et de nouveaux électeurs qui en font aujourd’hui massivement la demande », se désole l’élu, qui fait état d’un scrutin aux enjeux bien plus importants que celui des élections européennes : « Est-il possible de sanctuariser ainsi le corps électoral d’une élection européenne alors que la portée des élections législatives est tout autre d’un point de vue politique et suscite un engouement démocratique ? », se demande-t-il, appelant en conséquence, à la « modification » du texte, « afin de rouvrir le délai d’inscription sur les listes électorales ».
Pour ce scrutin, les différents sondeurs tablent sur une participation comprise entre 62 et 65%, un taux s’il se maintient, qui serait le plus élevé depuis 2007. Les élections législatives ont en effet connu un effondrement de la participation lors de leurs précédentes échéances. En 2022, la participation s’élevait simplement à 47.5% au 1er tour, chiffre le plus haut sous la Ve République. A titre de comparaison, la dernière dissolution de l’Assemblée nationale (par Jacques Chirac en 1997), avait mobilisé 68% de l’électorat au 1er tour, et même 71% au second tour.
« Nous nous trouvons à nouveau dans une situation exceptionnelle »
Pour autant, cette demande a peu de chances d’aboutir, étant donné que cela nécessiterait une mise à jour rapide des listes électorales … d’autant plus que les citoyens devenant majeurs entre le 9 et le 30 juin, seront quant à eux automatiquement inscrits. Cette disposition a pour vocation de « permettre la bonne organisation du vote et de s’assurer que les listes soient à jour le jour du vote », expliquait le constitutionnaliste Benjamin Morel, chez nos confrères de Libération, le 12 juin dernier.
Un argument que réfute le sénateur du Val-de-Marne, qui pointe une « situation exceptionnelle », à l’image de celle connue pendant la pandémie de Covid-19. A ce titre, il souhaite également que l’ouverture des procurations soit élargie : « Par exemple, pendant la pandémie de Covid-19, il avait été décidé d’ouvrir à deux procurations pour permettre une plus large participation électorale ». Et de continuer : « Bien que nous ne soyons pas confrontés à une crise sanitaire, nous faisons face à une crise démocratique majeure. Pour cette raison, il serait tout à fait justifié d’autoriser également deux procurations pour ces élections législatives anticipées, afin de garantir une participation électorale la plus large et légitime possible.
Si ce dernier point pourrait être possiblement entendu au regard du nombre record de procurations et du contexte des vacances d’été, il est très improbable que la demande concernant l’élargissement du corps électoral sera entendue par l’exécutif.
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