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Législatives : Les Républicains dubitatifs face à l’hypothèse d’un gouvernement « d’union nationale »

Avec plus de 200 désistements annoncés pour le deuxième tour des élections législatives, le Front républicain contre le RN prend forme. La possibilité pour le parti de Jordan Bardella d’obtenir une majorité absolue s’inscrit désormais en pointillé. Mais existe-t-il une voie pour former une majorité de rechange ? Au groupe LR du Sénat, la réponse est non.
Simon Barbarit

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Il va falloir encore compter avec Les Républicains. Alors que les chances de voir le RN obtenir une majorité absolue s’amenuisent avec l’édification d’un barrage Républicain contre le RN composé de plus de 200 désistements dans 306 circonscriptions, difficile de concevoir la composition de la prochaine assemblée. « Je vois l’entreprise de démoralisation de nos électeurs depuis deux jours, où sur tous les plateaux, on explique que nous n’aurons pas la majorité absolue. Donc bien entendu que c’est faisable », a assuré Marine Le Pen sur France Inter en opération de mobilisation de ses électeurs.

« L’espace entre LFI et le RN est inversement proportionnel à l’opinion qui s’exprime aujourd’hui »

La majorité absolue en faveur du RN est, certes, faisable, mais n’est désormais plus garantie, ce qui pousse certains à envisager un nouveau mode de gouvernance. La présidente sortante de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, a évoqué dès lundi une « grande coalition allant des LR aux écologistes et aux communistes. Le président de la région des Hauts-de-France, Xavier Bertrand à inviter les Français, à « comprendre qu’il y a d’autres alternatives qu’une majorité avec un gouvernement RN ou une coalition d’arrière-boutique » tout en plaidant « pour un gouvernement de sursaut républicain », « un gouvernement provisoire de la République comme ça existait à une époque quand il a fallu reconstruire ».

« Ça rappelle les belles heures de l’histoire. Mais sans LFI et le RN, comment avoir une majorité ? », interroge circonspect, le sénateur LR Olivier Paccaud à l’arrivée de la réunion hebdomadaire du groupe LR. « Comment construire une légitimité collective ? L’espace entre LFI et le RN est inversement proportionnel à l’opinion qui s’exprime aujourd’hui », décline le rapporteur général du budget, Jean-François Husson qui s’est mis en retrait des Républicains depuis le ralliement d’Éric Ciotti au Rassemblement national.

« Les Républicains, c’est un parti qui est mort. Il faut en tirer les enseignements en restructurant notre place dans l’espace politique », poursuit-il en reprenant le qualificatif d’Aurélien Pradié. Le député sortant du Lot, en ballottage favorable pour le second tour, entend lui aussi « créer un autre espace » politique à droite dans la future Assemblée. « Nous bâtirons à l’Assemblée nationale un groupe de gaullistes indépendants qui sera capable d’influer très fortement sur la politique du pays », a-t-il indiqué, lors d’une conférence de presse.

Le rôle de « parti pivot » qui semble dévolu à la droite, quelle que soit son appellation à l’avenir au Palais Bourbon, attire forcément les convoitises. Éric Ciotti, toujours président de LR, malgré les 3 exclusions votées par le bureau politique, a lancé un appel à ses anciens collègues pour faire le nombre avec le RN et ainsi obtenir une majorité. « J’ai écrit à tous les militants Républicains pour leur dire de ne pas se tromper de combat […] Je tends la main (aux élus) […] M. Macron veut installer le chaos et s’allie avec M. Mélenchon pour l’installer à Matignon ».

« Qui est M. Ciotti ? », ironise la sénatrice de l’Aisne, Pascale Gruny. « Nos candidats ont bataillé contre ceux du RN et d’Éric Ciotti. S’ils avaient dû les rallier, ce serait déjà fait », veut-elle croire.

« Vous imaginez un gouvernement avec Sandrine Rousseau et Bruno Retailleau ?

Il n’empêche, La France Insoumise agitée comme un épouvantail dans une hypothétique coalition agace à droite. Car même si les députés sortants LR « canal historique », comme Olivier Marleix ou Annie Genevard, vont bénéficier au niveau local de désistement de la gauche dans une triangulaire, le parti, a tout le long de la campagne, maintenu la ligne d’indépendance et d’autonomie, « Ni RN, ni LFI », et ni non plus macronistes, d’ailleurs.

En déplacement de campagne à Paris, Gabriel Attal a néanmoins plaidé pour « une Assemblée plurielle, avec différentes forces politiques qui sont représentées » en guise d’alternative au RN. Au-delà de la faisabilité numérique, c’est la cohérence programmatique d’un tel attelage qui a occupé les discussions, ce mardi matin à la réunion de groupe LR. « Quand le Premier ministre parle de majorité plurielle, il n’exclut qu’un seul parti, le RN, donc, ça veut dire avec LFI. Et ça, c’est insupportable, c’est une aberration démocratique. Une négation du vote des Français et le meilleur moyen pour que Marine Le Pen fasse 40 % au premier tour en 2027 », tance le sénateur des Hauts-de-Seine, Roger Karoutchi.

« On peut discuter avec les sociodémocrates. Mais vous imaginez un gouvernement avec Sandrine Rousseau et Bruno Retailleau ? Tout le monde s’égosille sur cette majorité alternative mais si le RN fait 250 sièges et LFI 70, vous avez déjà une majorité de blocage pour faire tomber le gouvernement », calcule Roger Karoutchi.

Sur X, la sénatrice de Paris, Agnès Evren parle même « une coalition de la honte ».

« La Ve République, c’est aussi le pragmatisme »

Ouvert à la perspective « d’un gouvernement d’union nationale », « d’une gouvernance partagée », le président de la commission des lois, François-Noël Buffet estime quant à lui que sans majorité absolue pour le RN, « on ne pourra pas faire autrement ». « La question, ce sont les conditions dans lesquelles on l’a fait. Elle doit se faire dans la transparence et sur des sujets et des objectifs très précis pour les trois ans qui viennent. Dans ces conditions, le président exerce ses pouvoirs et le Premier ministre exerce les siens. On revient aux fondamentaux de la Ve République ». Et quand on lui fait remarquer que sous la Ve République, on a jusqu’à présent j’avais vu de majorité allant des communistes jusqu’à la droite, il répond : « On s’adapte aux circonstances. La Ve République, c’est aussi le pragmatisme ». « C’est la dernière chance qu’il nous reste ».

Une chance minime, car La France Insoumise, par la voix de son coordinateur, Manuel Bompard a d’ores et déjà affirmé que « les Insoumis ne gouverneront que pour appliquer leur programme, rien que le programme ». Tous, sont au moins d’accord sur un point : « Attendons dimanche soir ».

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