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Législatives : la NUPES dénonce « une manœuvre du ministère de l’Intérieur » pour « minimiser » son score
Par François Vignal
Publié le
Nous sommes le dimanche 19 juin, il est 20 heures. Les résultats des élections législatives tombent. La gauche, malgré son union sous la bannière de la NUPES (Nouvelle union populaire écologique et sociale), est présentée dans les résultats officiels, repris par les télés, par partis : LFI, EELV, PS, PCF. Du rouge, du vert, du rose apparaissent dans le demi-cercle qui figure les bancs de l’Assemblée. A côté, une grande section jaune semble plus imposante et crève l’écran. C’est Ensemble !, l’union des partis de la majorité présidentielle.
Ce scénario, c’est celui que craignent les partis de gauche, au soir du second tour des législatives, en raison d’une circulaire du ministère de l’Intérieur. Elle met déjà le feu aux poudres. Datée du 13 mai et connue des candidats le 16, la circulaire est signée du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. Adressée aux préfets, elle concerne la « nuance politique » que les préfets sont chargés d’attribuer de manière discrétionnaire aux candidats aux législatives. « L’attribution des nuances politiques est un préalable essentiel à l’analyse électorale et à la lisibilité des résultats des élections pour les citoyens », rappelle la circulaire. Cette « nuance politique, attribuée par l’administration », est à distinguer de « l’étiquette politique, librement choisie par le candidat », rappelle la circulaire.
Une nouvelle circulaire
D’après ce document, les préfets devront obligatoirement placer les candidats de la NUPES selon leur parti d’origine (LFI, écologistes pour EELV et les partis du Pôle écologiste, PS, PCF). Il n’existe pas de case NUPES. En revanche – et c’est ce qui fait polémique – l’Intérieur a créé une nuance « ENS » pour « Ensemble ! (Majorité présidentielle) », la nouvelle confédération spécialement créée pour les législatives, qui rassemble Renaissance (nouveau nom de LREM), le Modem et Horizons, le parti d’Edouard Philippe. L’enjeu n’est pas mince, car il en va de la présentation des résultats.
Une première circulaire avait été publiée le 27 avril, sans la prise en compte d’« Ensemble ! ». Mais « tenant compte des derniers changements intervenus », le ministère a publié une seconde circulaire le 13 mai. La voici :
Apprenant la nouvelle, le sang de Jean-Luc Mélenchon n’a fait qu’un tour. « Effacer ses adversaires du tableau des résultats est-ce encore la démocratie ? » a demandé le leader insoumis sur Twitter. Ce lundi matin, lors de la présentation des candidats de la NUPES de Paris, le sujet a forcément pris le dessus, malgré la photo de (la nouvelle) famille. La conseillère régionale LFI Sophia Chikirou, candidate dans la 6e circonscription, le patron d’EELV, Julien Bayou, candidat dans la 5e, accompagnés des autres candidats, avaient donné rendez-vous sous le soleil de La buvette du parc, dans le 15e arrondissement. Sont aussi présentes l’écolo Sandrine Rousseau (candidate dans la 9e « circo ») et pour LFI, Danielle Simonnet, dont la candidature dans la 15e circonscription est contestée par la socialiste Lamia El Aaraje, qui se présente en dissidente. Les deux candidates PS issue de l’accord s’étaient d’ailleurs fait excuser, avec un mot lu par… Sophia Chikirou.
« C’est honteux »
Ce problème de nuance politique passe mal. « C’est honteux. C’est une manœuvre de la part du ministère de l’Intérieur », « c’est extrêmement préoccupant », dénonce Julien Bayou, qui craint « des résultats en trompe-l’œil ». Il précise n’avoir « jamais été consulté sur cette affaire ». Les premières difficultés ont été remontées par des candidats de l’Ariège et du Rhône, explique le responsable écologiste. Pour le numéro 1 d’EELV, « c’est une question de liberté d’expression. Je veux pouvoir être comptabilisé comme NUPES ». Il ajoute :
C’est vraiment décisif. Si au soir du premier tour, la NUPES fait jeu égal voire plus, les gens peuvent se dire je vais voter au second tour.
« C’est vraiment une manœuvre pour éviter que nous soyons évalués à notre juste valeur », confirme Sophia Chikirou. La responsable de LFI y voit une volonté de créer « la confusion et une invisibilisation de la NUPES ». Elle soulève aussi « une rupture du principe d’égalité et une insincérité ». Même son de cloche chez les autres candidats présents. « Si ça reste en l’état, c’est un scandale », lance le journaliste et fondateur de la Révolution écologique pour le vivant (REV), Aymeric Caron, candidat dans la 18e circonscription dans le quota LFI. « C’est une manière habile de nous minimiser, mais qui finit par se voir », ajoute Sandrine Rousseau.
La NUPES réfléchit à déposer un référé
Aminata Niakate, candidate EELV dans la 13e circonscription, fait son arrivée. Elle vient justement de la préfecture, où elle a amené son dossier de candidature. Verdict ? « Je n’ai pas pu déposer sous le nom de NUPES ». « Ça a duré un quart d’heure, ils sont allés voir leur supérieur. On m’a refusé de l’ajouter de manière manuscrite », raconte la candidate. Elle a « fait une observation ». « L’idée, c’est de minimiser le score en nous présentant comme divisés. C’est vraiment minable », dénonce Aminata Niakate, qui ajoute, au sujet de Gérald Darmanin, candidat dans le Nord :
C’est possible pour Ensemble, dont un des représentants est ministre de l’Intérieur…
Mais la gauche n’entend « pas se laisser faire », prévient Sophia Chikirou. « Nos différentes organisations vont écrire » au ministère pour demander la prise en compte de la NUPES dans les nuances, explique Julien Bayou. Et si besoin, « nous allons consulter notre avocat pour essayer de faire un référé », ajoute Sophia Chikirou.
La Place Beauvau souligne « la volonté pour les candidats de rester attachés à leur parti d’origine »
Du côté du ministère de l’Intérieur, on répond que « la Nouvelle union populaire écologique et sociale réunit des candidats investis de manière indépendante par les partis associés à cet accord notamment de La France insoumise, d’Europe-Ecologie-les-Verts, du Parti socialiste et du Parti communiste français. Cela tend à démontrer la volonté pour ces candidats de rester attachés à leur parti d’origine. Ces partis se présentent par ailleurs de manière indépendante comme en attestent notamment les associations déclarées au titre de l’aide publique », répond la Place Beauvau qui, « dans une logique de lisibilité de l’offre politique », a choisi de ne « pas réunir sous une seule nuance politique ces candidats ». « C’est cette même logique qui a conduit à faire apparaître de manière indépendante, sous deux nuances distinctes les candidats Les Républicains et les candidats UDI, malgré un accord entre ces deux partis politiques », précise le ministère de l’Intérieur. Pas de jaloux.
En janvier 2020, on se souvient d’une polémique similaire, lors des municipales. Une circulaire de l’Intérieur demandait d’attribuer une nuance politique seulement aux communes de plus de 9.000 habitants. L’opposition y avait vu une manière de cacher le manque d’implantation locale de LREM. Le Conseil d’Etat, saisi par LR, avait finalement suspendu partiellement la circulaire incriminée.
« C’est un peu une fausse polémique » pointe un responsable de Renaissance
Dans la majorité présidentielle, on regarde tout cela avec calme. « C’est un peu une fausse polémique », pointe un responsable de Renaissance, « faire l’addition de trois ou quatre partis, c’est fait en une minute ».
Lors de la création d’Ensemble !, la première semaine de mai, les responsables des formations de la majorité avaient en réalité pensé à tout. Car Ensemble ! est légalement un parti politique, avec une association de type loi de 1901. Pour les législatives, il y a ainsi une unique association de financement… Ce qui permet et facilite la création d’une seule nuance politique par l’Intérieur. « C’est une conséquence qu’on avait bien en tête », reconnaît notre responsable de Renaissance, qui connaît bien le sujet. Il précise : « Ce n’est pas pour cela qu’on l’a fait, mais c’est une conséquence heureuse ».
« Tous les partis membres d’Ensemble auraient pu demander à figurer sur le formulaire pour être éligible à la première partie du financement public (celle en fonction du nombre de voix, ndlr). Mais nous, nous sommes tous derrière un seul parti. LFI et les autres n’ont pas fait ça. Chacun a déposé un dossier différent. Le choix du ministère me paraît logique », ajoute ce responsable marcheur, selon qui la NUPES ne peut s’en prendre qu’à elle-même :
S’ils avaient tous déposé leur dossier derrière une barrière commune NUPES, ils auraient eu le même traitement que nous.
Répartition de la manne financière du financement public
On pourrait objecter que chaque composante de la majorité a mis sur la table les noms de ses candidats, lors des négociations. L’accord passé au sein d’Ensemble prévoit ensuite une répartition financière entre les députés Renaissance, Modem et Horizons. Autrement dit, le financement de l’Etat passe d’abord par Ensemble !, qui joue en quelque sorte le rôle de holding politique, avant qu’une clef de répartition ne répartisse la manne financière entre chaque parti, qui se retrouve obligé de faire confiance à Renaissance, qui a les clefs du coffre…
Pour la lisibilité politique, chère à Gérald Darmanin, il eut été utile de connaître la répartition des députés élus, selon les composantes de la majorité. Mais l’Intérieur se fixe sur les associations de financements. Et s’il y a un accord national à gauche, le PS ou EELV n’ont pas voulu pousser le vice au point de tout partager avec LFI, à savoir l’argent, nerf de la guerre électorale.