Le Sénat vote une résolution de soutien à l’Ukraine et appelle au renforcement de l’aide

Le Sénat vote une résolution de soutien à l’Ukraine et appelle au renforcement de l’aide

Le Sénat a voté à la quasi-unanimité des groupes, à l’exception des communistes qui alertent contre « l’escalade guerrière », une proposition de résolution pour exprimer son soutien à l’Ukraine et condamnant « la guerre d’agression » menée par la Russie.
François Vignal

Par Public Sénat

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A quelques jours de la première année du début de la guerre en Ukraine, et une semaine après avoir reçu le président de la Rada, le Parlement ukrainien, la Haute assemblée s’est montrée aux côtés de l’Ukraine, en adoptant ce mardi une proposition de résolution « exprimant le soutien du Sénat à l’Ukraine, condamnant la guerre d’agression menée par la Fédération de Russie et appelant au renforcement de l’aide fournie à l’Ukraine », par 324 voix, contre 16 du groupe communiste et 4 abstentions.

L’auteur de la proposition de résolution, le président du groupe Les Indépendants, Claude Malhuret, a appelé la France à s’engager sans équivoque aux côtés de l’Ukraine, y compris militairement. Preuve du caractère transpartisan du texte, il est signé par quatre autres présidents de groupes politiques : Bruno Retailleau (LR), Hervé Marseille (UC), François Patriat (RDPI) et Jean-Claude Requier (RDSE).

« La deuxième guerre froide a commencé, et depuis plusieurs années »

Pointant du doigt ceux qui « craignent l’escalade », Claude Malhuret estime que « chaque épisode de cette guerre prouve qu’ils ont tort. En refusant l’escalade ils en laissent le monopole à Poutine ». « Les lignes rouges, nous savons désormais qu’elles ne sont que le fruit de nos peurs. Chaque fois que Poutine les trace et qu’elles sont franchies, il ne se passe rien : comment pourrait-il frapper plus fort alors que son armée, minée par la corruption qui ronge son matériel, l’incompétence de ses chefs et la défiance de ses soldats, est déjà au-delà de son maximum ? » demande le sénateur Horizons de l’Allier.

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Claude Malhuret dénonce au passage ceux qui manquent de fermeté, face à la Russie. « Depuis l’invasion de l’Ukraine, Le Pen, la baronnette des guichets de Moscou et Mélenchon, le génuflecteur des plus infâmes dictatures, condamnent du bout des lèvres car ne pas le faire serait un suicide, mais ils ne changent pas d’avis : tout est de la faute de l’Occident, surtout pas d’armes, surtout pas de sanctions », pointe le sénateur, qui met en garde sur la tentation de ne pas aller trop loin : « L’apaisement et les compromis avec un dictateur n’ont jamais marché. Le dictateur avance devant la faiblesse et recule devant la force. C’est aussi simple que ça depuis toujours. Si l’Europe veut une paix durable sur le continent, elle doit apprendre le langage de la puissance, le seul que les dictateurs comprennent ». Regardez :

Russie : « Il n’y aurait rien de pire que de croire que nous ne sommes pas en guerre contre des gens qui sont en guerre contre nous », alerte Claude Malhuret

Il voit comme « un bon signe que de plus en plus de dirigeants européens, hier dans le camp des « réalistes », soient en train de comprendre que la livraison massive d’armes n’aurait pas eu pour conséquence de prolonger la guerre mais de l’écourter par la débâcle des envahisseurs ». Et d’ajouter :

Mieux vaut tard que jamais. C’est maintenant qu’il faut livrer les chars, les missiles, les défenses sol-air et les avions si nous voulons, comme le promettait le président de la République lors de ses vœux, « accompagner l’Ukraine jusqu’à la victoire finale ».

Pour Claude Malhuret, « la deuxième guerre froide a commencé, et depuis plusieurs années. Beaucoup de dirigeants occidentaux proclament que nous ne sommes pas en guerre contre la Russie. J’espère bien que ce discours n’est que tactique et qu’ils n’en croient pas un mot. Parce que les dictateurs eux l’annoncent clairement : ils sont en guerre contre nous. Ils veulent achever les démocraties qu’ils croient agonisantes. Il n’y aurait rien de pire que de croire que nous ne sommes pas en guerre contre des gens qui sont en guerre contre nous et qui le disent », soutient le président du groupe Les Indépendants (voir la première vidéo), qui ajoute :

Il est temps de réarmer les démocraties face aux tyrannies du XXIème siècle.

« Cette guerre a trop duré. Nous devons tout faire pour arriver à son terme » selon Guillaume Gontard

« Cette guerre a trop duré. Nous devons tout faire pour arriver à son terme. Cela passe par un renforcement du soutien à l’Ukraine, pour lui permettre de repousser l’envahisseur russe. […] On peut le déplorer mais aucune autre alternative n’est sur la table », a défendu de son côté Guillaume Gontard, président du groupe écologiste du Sénat, qui soutient le principe de la livraison « d’armes de pointe à l’Ukraine ». L’écologiste appelle ainsi la France à livrer ses chars Leclerc et des avions de chasse. Le sénateur de l’Isère salue aussi « le nouveau paquet de sanctions […] et nous appelons à y inclure les dirigeants de Rosatom, à défaut de pouvoir nous passer de l’uranium enrichi en Russie, pour notre fourniture électrique ».

Le président du groupe PS, Patrick Kanner, a mis en garde contre « le risque d’usure que fait peser cette guerre », alors que « cela fait 349 jours qu’un peuple souffre, 349 jours qu’un peuple est bombardé ». « Personne ne veut la guerre sur ces bancs, comme partout ailleurs. […] Mais nous ne pouvons viser autre chose que la victoire de l’Ukraine sur son agresseur russe », selon le sénateur du Nord. Patrick Kanner ajoute encore : « Nous ne devons pas craindre Poutine. […] C’est un prédateur. Il profitera de chacune de nos faiblesses ».

Pour Jean-Claude Requier, président du groupe RDSE, « la nécessité d’un effort constant de livraison d’armes aux forces ukrainiennes paraît aujourd’hui incontournable ». « L’aide à l’Ukraine doit être augmentée sur tous les fronts », ajoute-t-il.

Enfants ukrainiens déplacés de force en Russie : André Gattolin dénonce « un acte constitutif d’un génocide »

Le sénateur Renaissance des Hauts-de-Seine, André Gattolin, a rappelé qu’on évalue « à au moins 120.000/150.000 le nombre de soldats russes tués et au moins 100.000 le nombre d’Ukrainiens civiles et militaires ayant connu le même sort ».

André Gattolin a tenu à souligner le sort des « milliers d’enfants ukrainiens déplacés de force vers la Russie. Osons le mot, c’est bien une déportation de masse ». Cette « russification forcée à travers leur changement de nom, voire même d’origine à l’état civil, bien plus qu’une épuration ethnique, […] est un procédé honteux visant à éradiquer l’identité d’enfants et à les prendre en otage, ce qui s’apparente à un acte constitutif d’un véritable génocide », dénonce le sénateur du groupe RDPI. Regardez :

Nadia Sollogoub, présidente centriste du groupe d’amitié France-Ukraine, appelant au « libre accès » des ONG comme la Croix Rouge, relève que « le nombre de femmes, d’enfants et de vieillards parmi les victimes est intolérable. Par cette résolution, nous dénonçons une dérive inhumaine ».

Si la France livre des avions, « il serait de plus en plus délicat de se déclarer extérieur au conflit »

Dénonçant pour le groupe LR un « conflit brutal », « une vraie guerre d’invasion », le sénateur Pascal Allizard a rappelé que la France a déjà « livré de l’équipement individuel, des munitions, du renseignement, du matériel de guerre, tel que des systèmes d’artillerie ».

« Et déjà les autorités ukrainiennes réclament des avions. Le Président Macron dit que rien n’est interdit par principe, on peut l’entendre. Mais si une telle montée en puissance se confirmait, il serait de plus en plus délicat de se déclarer extérieur au conflit et à être considéré comme tel, il faut bien le mesurer », a cependant mis en garde le sénateur LR, qui pose la question :

Jusqu’où sommes-nous prêts à aller face à une puissance dotée (de l’arme nucléaire) ? Nous sommes désormais sur un terrain glissant, les opinions publiques commencent à s’interroger.

Il faut convient « de prévenir une guerre généralisée », met en garde Pierre Laurent

Pour le groupe CRCE (communiste), Pierre Laurent va plus loin, seule voix discordante dans ce débat. Les sénateurs communistes ont d’ailleurs voté contre, alertant sur les conséquences d’une escalade. « Hier, le secrétaire général de l’ONU s’est alarmé que le monde se dirige les yeux grands ouverts vers une guerre plus large encore, mettant en garde contre les risques d’escalade. Allons-nous l’entendre ? » demande le sénateur PCF de Paris.

Dire, comme « le chef d’Etat-major américain », que « la victoire n’est probablement pas réalisable par des moyens militaires », « ce serait se montrer complice de Poutine. Emmanuel Macron a été confronté à cette accusation larvée quand il a tenté de maintenir ouverte la porte des négociations, sommé alors de rentrer dans le rang des partisans de l’escalade guerrière », regrette l’ancien numéro 1 du PCF. Tout en soutenant l’Ukraine, il convient « de prévenir une guerre généralisée », selon Pierre Laurent, avant d’ajouter (voir la vidéo ci-dessus) :

Abandonner l’objectif de la paix au seul profit de l’escalade militaire, c’est abdiquer devant la perspective d’une guerre longue et durable, toujours plus destructrice.

Votant également contre la résolution, le sénateur Jean-Louis Masson, proche de l’extrême droite, a souligné pour sa part que si « la guerre est en apparence liée à l’agression de la Russie, elle résulte aussi de l’extension vers l’est de l’Otan et de l’Union européenne, ce qui revient à encercler littéralement la Russie ». « En voulant mettre la Russie à genoux, l’Otan prend le risque d’un conflit nucléaire », lance le sénateur de la Moselle.

« Ensemble, nous nous tenons debout, sans faiblir, aux côtés de l’Ukraine » lance le ministre Olivier Becht

En conclusion des débats, Olivier Becht, ministre chargé du Commerce extérieur, de l’Attractivité et des Français, a soutenu que « la Russie avait franchi toutes les limites » en attaquant l’Ukraine, dénonçant « une invasion barbare ».

Il a rappelé que la France allait livrer 12 canons Caesar, en plus des 18 déjà livrés, ainsi que des missiles pour les batteries aériennes de type Crotale. « Nous formerons 2000 soldats ukrainiens sur le territoire français d’ici l’été et 150 militaires français se rendront à la fin du mois en Pologne pour former jusqu’à 600 soldats ukrainiens par mois », ajoute le ministre, sans oublier toute l’aide civile apportée, comme les 63 générateurs de haute puissance qui seront envoyés. Et le ministre de conclure : « Ensemble, nous nous tenons debout, sans faiblir, aux côtés de l’Ukraine et nous continuerons aussi longtemps qu’il le faudra, à le faire ».

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