C’est un soulagement qui a d’abord été ressenti outre-Rhin, dimanche soir, du côté du gouvernement et de la majorité de centre gauche allemands, à l’annonce du résultat des législatives en France. « On s’attendait à une victoire du Rassemblement national mais ils sont arrivés en 3e position : les Français ont voté en majorité contre le RN, maintenant il reste à savoir pour quelle politique ils ont voté », s’interroge Daniel Freund, eurodéputé allemand Vert, dans l’émission Ici l’Europe, sur France 24 et Public Sénat.
Une paralysie française qui pourrait freiner l’Union européenne
Après le soulagement, c’est l’inquiétude qui revient face à une situation de paralysie politique française, l’absence de gouvernement issu de ces élections, ce qui pourrait freiner la coopération franco-allemande, moteur de l’Union européenne. « Ce qui me fait peur ce sont ceux qui arrivent en disant nous allons gouverner seuls, alors qu’ils n’ont pas de majorité », assure Daniel Freund. Une allusion à peine voilée à Jean-Luc Mélenchon qui, dimanche soir quelques minutes après l’annonce des résultats, annonçait sa volonté d’appliquer le programme du Nouveau front populaire, « rien que le programme, tout le programme » en gouvernant quand c’est possible par décrets.
« La coalition, ce n’est pas tous les jours facile, mais c’est ça la démocratie ! »
Selon Daniel Freund, « même si la France n’a pas cette culture depuis des décennies », « elle va devoir former une coalition à l’allemande ». En Allemagne, le système électoral plus parlementaire et proportionnel a habitué les principaux partis politiques de droite comme de gauche à former des coalitions pour gouverner ensemble. C’est ce qu’a fait à plusieurs reprises, la chrétienne-démocrate de la CDU Angela Merkel en gouvernant avec les Sociaux-démocrates du SPD. Un parti qui mène actuellement, autour du Chancelier Olaf Scholz, une coalition de gouvernement avec les Verts et les Libéraux du FDP.
« Je ne vais pas vous mentir, cette coalition est difficile à mener. Ce n’est pas tous les jours agréable, quand on est écologiste, de gouverner avec des Libéraux et des Sociaux-démocrates. Mais nous ne disons que si les électeurs allemands votent ainsi, c’est qu’ils s’attendent qu’à la fin il y ait un accord de coalition. »
L’eurodéputé prend l’exemple du Parlement européen, élu à la proportionnelle intégrale, et dont la majorité repose actuellement sur une coalition entre la droite du Parti populaire européen, le centre de Renew et la gauche des Sociaux-démocrates. Une majorité qui a parfois besoin des Verts pour faire passer certains textes. « Pour moi en tant qu’eurodéputé Vert, c’est difficile de trouver des compromis avec la droite du Parti populaire européen, avec les libéraux de Renew, mais c’est ça la démocratie ! »
Prendre le temps de la négociation
« Une chose est sûre, il va falloir du temps aux partis français pour bâtir cette coalition, elle ne va pas se faire du jour au lendemain. Regardez le temps qu’il a fallu pour former une coalition en Belgique ces dernières années. » En 2020, en Belgique, une alliance de gouvernement s’est formée entre 7 partis, libéraux, chrétiens-démocrates, socialistes et Verts, après 16 mois de négociations, un record dans l’histoire politique tumultueuse belge. Espérons qu’on n’en arrive pas là…