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La démocratie face aux crises : « L’élection n’est pas une simple délégation du pouvoir »
Par Henri Clavier
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« Un contexte de crises qui interroge le rôle de chaque acteur institutionnel, en particulier les Parlements », cette formule, issue du discours introductif du président du Sénat, Gérard Larcher, illustre un changement de paradigme dans la responsabilité de la crise démocratique. Un certain renversement de la perception de l’origine de la crise en démocratie. Historiquement, en France, le Parlement a souvent été pointé comme étant une source d’instabilité, désormais l’exécutif semble au centre de cette critique. Surtout, pour Gérard Larcher, cette crise ne concerne pas forcément les « fondements du modèle démocratique », mais se concentre sur « une vive dénonciation d’un déficit démocratique et un appétit de plus de démocratie participative ». En se concentrant sur l’exemple de la France, Gérard Larcher évoque la « crise d’une autorité qui se voulait « jupitérienne » et verticale, et a cherché à contourner depuis des années le Parlement, les territoires, les corps intermédiaires ».
Myriam Revault d’Allonnes, philosophe et autrice de « La démocratie comme expérience. Repenser notre rôle de citoyens actifs dans une crise sans fin », Thierry Chopin, conseiller spécial de l’Institut Jacques Delors et Klaus Welle, secrétaire générale du Parlement européen entre 2009 et 2022 ont proposé leurs réflexions sur le sujet.
« La démocratie ne se réduit pas à un système politico-juridique »
Dans son propos introductif, Myriam Revault d’Allonnes met en lumière l’idée que « la démocratie ne se réduit pas à un système politico-juridique » et « ne se résume pas à un mode de répartition du pouvoir ». En bref, la démocratie ne se manifeste pas uniquement au moment des élections par l’expression du vote. « La démocratie représentative ne signifie pas que les citoyens doivent se taire entre chaque élection. L’élection n’est pas une délégation pure et simple qui remet la volonté des citoyens entre les mains de leurs élus », affirme Myriam Revault d’Allonnes.
De ce point de vue, la démocratie repose sur une vision dynamique, constamment interrogée par ceux qui la font et donc « la démocratie implique que les citoyens se représentent et s’éprouvent de manière réflexive comme des acteurs politiques afin de disposer véritablement d’une force alternative, ce qui fait que la démocratie est toujours dans une position instable », argumente Myriam Revault d’Allonnes. La démocratie ne se justifie que par la tentative de formulation constante et renouvelée du contrat social et est menacée par la déstructuration de l’espace public. Pour ces raisons, la démocratie est menacée lorsque « les dirigeants prétendent incarner en leur personne le pouvoir du peuple ou que le lieu du pouvoir apparaît comme un lieu vide accaparé par les intérêts particuliers », estime Myriam Revault d’Allonnes. Au-delà des exemples nationaux, ces réflexions trouvent une certaine résonance au niveau de l’échelon européen souvent critiqué pour son déficit démocratique.
« On a davantage un système diplocratique que démocratique »
En s’appuyant sur l’exemple du Conseil européen, l’instance dirigeante de l’Union européenne regroupant les 27 chefs d’Etat et de gouvernement des Etats membres et chargés de définir les grandes orientations politiques de l’Union européenne, Thierry Chopin insiste sur l’importance de l’imputabilité et de la responsabilité dans un système démocratique. Pour rappel, confrontée à ce qui a été nommé une « poly-crise », l’Union européenne s’est recentrée autour des représentants des exécutifs des Etats membres. « Si certaines crises ont pu avoir des vertus en permettant une mobilisation inespérée, il existe des conséquences négatives de la montée en puissance du Conseil européen, notamment la lenteur des négociations diplomatiques et les incertitudes nationales », remarque Thierry Chopin.
La montée en puissance du Conseil européen illustre donc ce phénomène de déresponsabilisation de la décision politique. « Ce degré de fragmentation conduit à poser la question du mandat politique et démocratique. Comment définir ce mandat politique et démocratique à l’échelle du Conseil européen, est-ce que l’addition des 27 légitimités nationales produit une légitimité démocratique et un mandat politique ? Je pense que non », explique Thierry Chopin. En identifiant la faible imputabilité des décisions politiques prises au niveau du Conseil européen, Thierry Chopin dresse le constat d’un « système diplocratique plus que démocratique ».
« Une crise c’est quand le statu quo ne peut plus être maintenu »
Le poids de l’exécutif, au niveau national comme européen, doit-il cependant être pointé comme le symptôme d’une crise des démocraties ? Pas nécessairement, selon Klaus Welle, « une crise c’est quand le statu quo ne peut plus être maintenu, quand le changement devient une obligation ». La montée en puissance de l’exécutif, dans le cadre de l’Union européenne, serait plutôt la réponse à la crise que le symptôme puisque « si le conseil européen réagit sur des questions régaliennes, c’est parce que ce n’est pas réglé correctement par les traités », explique Klaus Welle.
Pourtant, le Parlement européen, équilibre fragile entre plusieurs groupes politiques minoritaires, ne cesse de demander plus de place et d’importance dans le processus décisionnel de l’Union européenne. Un symptôme de la crise des démocraties pour Myriam Revault d’Allonnes qui considère que « la conscience réflexive [de la démocratie] porte l’attention sur les Parlements, c’est de là que procèdent les résistances à la verticalisation du pouvoir ».
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