Depuis Bruxelles, la situation politique française inquiète tout autant. Une semaine après la chute du gouvernement de Michel Barnier, le Président de la République s’apprête à nommer un nouveau chef de gouvernement. Mais la tentative d’élargir le « socle commun » aux forces de gauche, hors LFI, dans un « accord de non-censure », est pour le moment rendue compliqué. Pour l’intégrer, les socialistes, écologistes et communistes demandent la nomination d’un Premier ministre du NFP et l’engagement de ne pas utiliser le 49.3.
« On voit des similarités entre la situation française et allemande »
Dans la capitale belge, certains députés européens comparent la situation française à celle de l’Allemagne. Après l’implosion de la coalition qu’il formait avec les Verts et les libéraux, le chancelier Olaf Scholz a organisé un vote de confiance au Bundestag mi-décembre. Etant donné qu’il devrait le perdre, les élections anticipées devraient avoir lieu le 23 février 2025.
« Nous sommes dans une situation où Donald Trump arrive à la maison Blanche dans un peu plus d’un mois et les deux principaux pays de l’Union européenne n’ont pas de gouvernement stable. Ce n’est pas le moment pour ça », peste Daniel Freund, eurodéputé allemand du groupe Les Verts. « On voit des similarités entre la situation française et allemande », assure aussi de son côté Andres Schwab, député européen allemand du PPE (droite).
Cependant, pour Daniel Freund, le cas de l’hexagone est particulier. « Ce qui est inquiétant en France, c’est que la situation nécessite un changement de culture politique », indique-t-il. « Il faut un gouvernement de coalition pour résoudre cette crise politique et ce n’est pas quelque chose que nous avons vu dans le passé », affirme l’eurodéputé écologiste allemand. Et d’ajouter : « Tous les acteurs politiques doivent y travailler. Il faut à la fois dire qu’une alliance est arrivée première aux élections législatives [NFP], mais aucun parti ne peut travailler seul. Il faut donc construire des compromis ».
« Pour nous, c’est assez incompréhensible »
« Pour un Belge, ce qu’il se passe en France est assez dramatique », déplore de son côté Elio Di Rupo, député européen socialiste et ancien Premier ministre de la Belgique. « Ça ne concerne pas uniquement les Français, mais ça concerne aussi les Européens », poursuit-il. Pour l’ancien président du Parti socialiste belge, il faut une alliance de compromis entre la gauche, la droite et le centre. « Si on pense à la question majeure des pensions de retraite, on peut imaginer un compromis sur les métiers difficiles. Pour le reste, on peut établir une grande conférence avec la participation des syndicats pour montrer à tout le monde qu’il faut discuter », propose en guise de solution Elio Di Rupo. « Pour nous, c’est assez incompréhensible. La France a besoin de stabilité, non seulement pour elle-même, mais aussi pour l’Europe ».
« Nos partenaires s’interrogent beaucoup sur la situation française »
Les députés européens français voient l’inquiétude de leurs collègues. « Nos partenaires s’interrogent beaucoup sur la situation française », admet Marie-Pierre Vedrenne, eurodéputée Renew (Libéraux / Renaissance). « Leur interrogation principale est : comment la France peut créer une certaine stabilité politique pour mener des réformes profondes dont elle a besoin ? », indique-t-elle. « Ils voient un effet cumulatif depuis plusieurs mois, parfois depuis plusieurs années, sur la fragmentation du paysage politique, du fait que nous n’avons plus de majorité à l’Assemblée nationale », poursuit la conseillère régionale de Bretagne. Et d’ajouter : « Ce qu’ils nous disent souvent est : pourquoi vous n’exportez pas le modèle européen au fonctionnement de l’Assemblée nationale ».
François-Xavier Bellamy, député européen du PPE et vice-président exécutif des Républicains, acquiesce : « Il y a une très grande inquiétude, car la France est dans une situation instable et préoccupante », affirme-t-il. « Il y a une très vive désolation car Michel Barnier a été empêché de mener la politique qu’il voulait pour la France », ajoute l’ancienne tête de liste LR aux élections européennes. « Mais il y a aussi une grande inquiétude budgétaire. Il faut que les Français aient conscience que la trajectoire de nos finances publiques est aujourd’hui un sujet d’immense préoccupation pour nos voisins européens », poursuit-il. Et de conclure : « Nos choix ont des conséquences pour la zone euro dans son ensemble ».