« Le peuple qui ne vous a jamais élu, Jean-Luc Mélenchon, enfin à des élections directes ». Cette erreur commise en direct sur Europe 1, par le journaliste, Nicolas Demorand, est restée dans les annales. Surtout l’échange tendu qui en suivit.
Nous sommes début 2011. Le leader du jeune Parti de Gauche s’agace des accusations de populisme à son encontre. Il se défend et estime être l’un des rares véritables représentants du peuple. Le journaliste croit alors trouver la faille et minimise la légitimité d’une élection sénatoriale, oubliant les autres mandats de Jean-Luc Mélenchon. Mal lui en a pris.
Jeudi, Jean-Luc Mélenchon a confirmé qu’il ne se représenterait pas à la députation dans les Bouches-du-Rhône. Il laisse sa place à son directeur de campagne, Manuel Bompard et met ainsi fin temporairement ou définitivement à une très longue carrière de parlementaire.
Plus jeune sénateur de la Ve République
En septembre 1986, le jeune Mélenchon est le premier secrétaire fédéral du parti socialiste dans l’Essonne. Il est aussi conseiller municipal de Massy et conseiller général. Le maire de Massy impose Jean-Luc Mélenchon à l’élection sénatoriale alors qu’à une semaine près, il n’avait pas l’âge requis pour être sénateur, 35 ans à l’époque.
Deux jours après son élection qui fait de lui le plus jeune sénateur de la Vème République, il déclare à Libération : « Je suis pourri d’ambition, et ce mandat, je l’ai voulu pour faire enfin de la politique sur des thèmes aigus, qui demandent du temps et de la durée ».
Et au Sénat, Jean-Luc Mélenchon va durer. Réélu 2 fois, il passera plus de 18 ans au Palais du Luxembourg pour seulement 11 questions d’actualité au gouvernement. Il semble préférer les questions écrites. Il en rédigera plus de 500. Il déposera aussi sur son nom, neuf propositions de loi, un bilan plutôt modeste. Lors de la cession 2008/2009, ses deux derniers textes déposés concerneront l’abrogation du délit d’offense au président de la République et l’instauration d’un bouclier fiscal.
C’est à cette époque que Jean-Luc Mélenchon a claqué la porte du PS. L’ancien trotskiste, admirateur de François Mitterrand, passé par le gouvernement Jospin en tant que ministre délégué à l’enseignement professionnel, ne supporte plus la « dérive libérale » de son parti incarné par la motion de Ségolène Royal, sortie majoritaire au congrès de Reims.
Il fonde le Parti de gauche et se lance aux Européennes. Son programme : « Dire non au traité de Lisbonne et non à son auteur, Nicolas Sarkozy ». Tête de liste dans le Sud-Ouest, il obtient 8,15 % des suffrages, ce qui lui permet d’être élu eurodéputé.
Un député européen peu assidu
En juin 2013, une petite musique monte et elle dérange fortement Jean-Luc Mélenchon. Plusieurs médias, Le Monde et Médiapart, rapportent les absences répétées du leader de la France Insoumise à Bruxelles et à Strasbourg. Le site VoteWatch.com classe son assiduité au 727e rang des parlementaires européens sur 751, derrière Jean-Marie Le Pen (716e) et juste devant Marine Le Pen (734e). Comme lors de son passage au Sénat, il ne rédige aucun rapport.
« Quand je ne suis pas au Parlement, c’est parce que je suis dans les manifestations des retraites, dans les manifestations pour la défense de la sidérurgie… Rien que ces deux mobilisations me coûtent neuf jours de présence en plénière. Je l’assume : je me rends là où je suis le plus utile. », se défend-il auprès de Mediapart. Cet « absentéisme » ne l’empêche pas d’être réélu au Parlement européen en 2014.
2017 : il fait son entrée au Palais Bourbon
Il n’ira pas au bout de ce deuxième mandat. En 2017, après son deuxième échec à l’élection présidentielle, « à 600 000 voix près », Jean-Luc Mélenchon se lance de nouveau dans une candidature aux législatives mais change de stratégie.
>> Lire notre article. Jean-Luc Mélenchon rate, à quelques centaines de milliers de voix près encore, la 2ème place du podium
Cinq ans plus tôt, il avait défié Marine Le Pen sur ses terres à Hénin-Beaumont. La campagne est dure. Un faux tract écrit en arabe en faveur de l’immigration comportant une photo de Jean-Luc Mélenchon est distribué par les équipes de Marine Le Pen. Ne parvenant pas à atteindre le seuil de 12,5 % des inscrits, Jean-Luc Mélenchon n’atteint pas le premier tour. Son adversaire est élue et fait son entrée au Palais Bourbon.
En 2017, dans les Bouches-du-Rhône, le leader de la France Insoumise finit par transformer l’essai et est élu pour la première fois à l’Assemblée nationale. Il obtient même un groupe de 17 députés. Son activité parlementaire personnelle s’est considérablement étoffée. Il déposera une trentaine de propositions de loi comme celle mettant fin aux écarts de rémunération entre les femmes et les hommes à poste égal, visant à instaurer la proportionnelle intégrale au scrutin législatif ou encore visant à créer pôle public du médicament. Il rédigera également quatre rapports.
De son mandat, on retiendra également des moments marquants. Comme lorsqu’en juillet 2017, pour protester contre la baisse de cinq euros des allocations logement, Jean-Luc Mélenchon et les députés de son groupe ramèneront quelques denrées alimentaires pendant la séance des questions au gouvernement, pour illustrer le manque à gagner.
En 2021, lors du bilan des 4 ans de la mandature, le groupe insoumis assurait être « le plus actif ces 12 derniers mois » avec 448 interventions en moyenne par député, plus de 59 000 amendements déposés, 100 propositions de loi et quatre commissions d’enquête dont il est à l’origine.