Alors que les députés PS soutiennent l’abrogation de la réforme des retraites portée par La France insoumise, qui efface également le mécanisme mis en place par l’ancienne ministre de la Santé Marisol Touraine sous François Hollande, le sénateur Bernard Jomier (Place publique), appelle les parlementaires de gauche à ne pas aller trop loin face aux enjeux démographiques.
Interdiction des néonicotinoïdes : des sénateurs LR en soutien des agriculteurs
Par Public Sénat
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Des centaines de tracteurs et des milliers d’agriculteurs qui défilent Porte de Versailles à Paris. Non, ce n’est pas le salon de l’agriculture, mais une manifestation contre l’interdiction de l’usage des néonicotinoïdes, des pesticides tueurs d’abeilles, et plus largement de nombreux autres insectes pollinisateurs.
La section FNSEA du Grand Bassin parisien qui rassemble 12 départements céréaliers du nord de la France et est à l’initiative de la manifestation, avec le syndicat des planteurs de betteraves CGB, affilié à la FNSEA. La Fédération nationale du syndicat agricole majoritaire leur a emboîté le pas en appelant « à se mobiliser à partir du 8 février à Paris et jusqu’au 20 février dans toute la France ».
Interdits depuis 2018 grâce à l’entrée en application de la loi sur la biodiversité (2016), ces pesticides ne devaient plus être utilisés sur aucune culture en France. Ils sont également interdits au niveau européen. Une exception toutefois, la culture de la betterave, qui, en raison d’une épidémie de jaunisse qui avait décimé les parcelles et mettait toute la filière en danger, avait obtenu une dérogation votée par le Parlement fin 2020. La dérogation, qui a été renouvelée chaque année par le ministère de l’agriculture après la remise d’un avis d’un conseil de surveillance, devait arriver à son terme l’été prochain.
« Des alternatives existent, à condition de changer de modèle », rappelle le sénateur écologiste Joël Labbé
Mais le 20 janvier dernier, Cour de Justice de l’Union européenne a jugé illégale la dérogation, ainsi que toutes les dérogations européennes, prenant de court les cultivateurs et le gouvernement. Le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau avait indiqué « prendre acte de la décision à conséquences européennes ». La décision avait été accueillie comme un soulagement par les écologistes, notamment le sénateur, Joël Labbé. En 2015, il avait ôté sa cravate dans l’hémicycle en signe de protestation contre l’utilisation des néonicotinoïdes dans l’agriculture. « Les néonicotinoïdes, insecticides systémiques sont les pires des ravageurs pour l’ensemble de la biodiversité. Des alternatives existent, à condition de changer de modèle », a-t-il rappelé dans un tweet le jour de la décision européenne.
L’ANSES fait valoir aujourd’hui 22 solutions alternatives. Auditionné au Sénat en 2020, Roger Genet, directeur général de l’ANSES avait fait valoir que si on ne mettait pas de limite dans le temps aux dérogations, « l’expérience montre qu’il ne passe rien ».
« On a toujours défendu le principe selon lequel, pas d’interdiction sans alternative »
De longue date, la majorité sénatoriale de la droite et du centre défend les dérogations à l’utilisation des néonicotinoïdes au nom « de la souveraineté agroalimentaire française ». En 2020, lors de l’examen du projet de loi qui autorise la réintroduction temporaire des néonicotinoïdes pour sauver la filière de la betterave, le Sénat avait suspendu le retrait d’une autorisation de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques à l’existence de produits ou de méthodes alternatives disponibles. Ce mardi, une dizaine de sénateurs LR étaient aux côtés des manifestants, mais aussi le président de la région Hauts-de-France Xavier Bertrand et l’ancien président de l’Association des maires de France, François Baroin.
« On a toujours défendu le principe selon lequel, pas d’interdiction sans alternative. La France reste la championne d’Europe de la surtransposition et on continue dans ce délire d’interdire à nos agriculteurs de bien travailler », réagit Laure Darcos, sénatrice LR de l’Essonne, présente à la manifestation.
Le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau a reçu dans la matinée une délégation issue de la manifestation « pour échanger sur les défis auxquels ils sont confrontés et l’avenir des filières agricoles », selon un communiqué. Il réunira jeudi la filière betterave pour « présenter un plan d’actions et de soutien en réponse à la décision européenne ».
« Le ministre a pris l’engagement de compenser les pertes dues aux attaques de pucerons »
« Le ministre a pris l’engagement de compenser les pertes dues aux attaques de pucerons. Ce n’est pas une solution parfaite car nous allons avoir une perte de surface cette année », indique le chef de file des sénateurs LR présents à la manifestation, Pierre Cuypers, lui-même producteur de betteraves.
Interrogé il y a quinze jours, Pierre Louault, sénateur Union centriste d’Indre-et-Loire, président du conseil de surveillance des néonicotinoïdes évoquait la piste d’une « recherche variétale de plants de betterave qui résistent à la jaunisse » tout en ajoutant qu’elle ne pourrait être mise en œuvre que dans deux ou trois ans, avec une perte de rendement.
Il alertait aussi sur le risque de l’abandon d’une culture qui pourrait être jugée insuffisamment rentable par certains agriculteurs français : « Cela pourrait mettre en cause toute la filière française. C’est un enjeu de souveraineté alimentaire : d’autres pays hors Europe prendront la place du marché du sucre aux dépens de l’agriculture européenne et française. », lançait-il. Des pays, comme le Brésil et la Chine, qui n’ont pas besoin de se passer des néonicotinoïdes dans leur culture et dont les produits sont importés dans l’Union européenne, qui interdit de telles cultures sur son territoire.
La Confédération paysanne, troisième syndicat qui se mobilisait mardi contre la réforme des retraites, a quant à elle déploré que « d’autres » manifestent « pour continuer à utiliser des néonicotinoïdes et refuser toute avancée écologique ».
L’ONG environnementale Générations Futures a rappelé mercredi que les néonicotinoïdes étaient « plus toxiques que le tristement célèbre DDT », interdit dans les années 1970, dénonçant des pratiques « dignes de l’agriculture des années 1960, pas de celle des années 2020 ».