Une semaine après la censure du gouvernement Barnier par la gauche et le Rassemblement national, un sondage Ifop pour Le Figaro Magazine et Sud Radio révèle que Marine Le Pen améliorerait son score au premier tour de l’élection présidentielle. En fonction des candidats face à elle à gauche et chez les macronistes, elle recueille entre 36 et 38 % des intentions de vote.
« Inconscience de la gravité de la situation » : l’allocution d’Emmanuel Macron déçoit à droite
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L’allocution télévisée d’Emmanuel Macron avait de quoi nourrir une certaine curiosité, au lendemain de la première motion de censure adoptée depuis 62 ans. Dans les rangs de la droite sénatoriale, d’où étaient issus plusieurs ministres du gouvernement Barnier, le message présidentiel a ce soir étonné à plus d’un titre.
Dans une adresse à la nation inhabituellement courte – dix minutes – Emmanuel Macron a directement attribué l’aggravation de la crise politique à l’extrême droite et l’extrême gauche, unies dans un « front antirépublicain », selon ses mots. Promettant un Premier ministre dans les « prochains jours », le chef de l’État a également assuré qu’il ne démissionnerait pas, annonçant « 30 mois » d’action pour faire de la France un pays « plus fort et plus juste ».
« Il n’y a ni cap, ni vision. Il essaye de se justifier en faisant porter la responsabilité à tout le monde, et en ayant du mal à assumer les siennes », épingle le sénateur LR Max Brisson. Ce porte-parole du groupe fait part de sa « déception », voire d’une « certaine inquiétude à l’issue des propos du chef de l’État ». « Pour sortir de la crise, il doit profondément se remettre en cause. Ce n’était pas un discours de remise en cause, mais d’accusation », pointe le sénateur des Pyrénées-Atlantiques.
« Je ne suis pas sûr qu’il y ait beaucoup de gens pour le féliciter », selon Olivier Paccaud
« Il a exposé toute une série de banalités, il a enfoncé des portes ouvertes, aucune annonce originale ni politique nouvelle. Il laisse entendre une certaine inconscience de la gravité de la situation », s’inquiète le sénateur LR Etienne Blanc.
« On a eu qu’une information, c’est qu’il ne démissionnerait pas. La plupart des gens attendaient une nomination. Dans ce genre de situation, il faut vraiment avoir quelque chose à dire. Le verbe macronien n’est plus magique. Je ne suis pas sûr qu’il beaucoup de gens pour le féliciter », griffe Olivier Paccaud (apparenté au groupe LR).
Outre l’annonce d’un Premier ministre sous quelques jours, le chef de l’État a également annoncé qu’un projet de loi spéciale serait déposé avant la mi-décembre pour assurer à la France un budget sur la base de la loi de finances 2024 au 1er janvier, le temps qu’une nouvelle discussion budgétaire s’enclenche en janvier. Un impair, selon Max Brisson, qui rappelle que ce genre d’annonce doit relever du gouvernement. « Si le président de la République doit à nouveau s’occuper de tout, mon inquiétude est renforcée. »
Le sénateur des Pyrénées-Atlantiques se montre aussi surpris par la description du gouvernement idéal, faite par Emmanuel Macron. « Il fournit des formules à l’emporte-pièce comme un gouvernement d’intérêt général, ce qui voudrait dire que les précédents ne l’auraient pas été. C’est une formule fumeuse. »
« Ce n’est pas en culpabilisant qu’on arrive à convaincre », rappelle Olivier Henno (Union centriste)
Dans les rangs de l’Union centriste, alliés des Républicains, Olivier Henno salue un président de la République « lucide et dans son rôle ». Mais sans la même assise que dans le passé. « Il a moins d’atouts dans son jeu qu’autrefois, on avait bien ce sentiment-là », poursuit le sénateur du Nord. Le secrétaire général de l’UDI met toutefois un bémol sur le discours, à l’heure où la coalition centrale doit s’élargir pour survivre. Emmanuel Macron a mis en cause les « forces qui gouvernaient hier la France », qui ont « choisi » d’aider les extrêmes à faire adopter la censure. Comprendre en particulier les socialistes. « Ce n’est pas en culpabilisant ou en dramatisant qu’on arrive à convaincre et rassembler », regrette le sénateur de l’Union centriste.
Olivier Paccaud doute d’ailleurs de cet « arc de gouvernement » à laquelle a fait référence le chef de l’Etat. « En théorie, cela peut être joli, en réalité cela va être un peu compliqué. Je pense que c’est la confection d’un prochain budget, qui permettra de sceller une alliance des responsables », pronostique le sénateur de l’Oise.
Max Brisson tient à souligner personnellement que son soutien n’est pas garanti d’office. « En fonction du choix du Premier ministre, de son indépendance par rapport au président de la République, de son poids politique, je déterminerai mon envie de soutenir ou non ce gouvernement », prévient-il. Et d’ajouter, comme un rappel au retour du parlementarisme depuis juillet : « Nous ne sommes pas aux ordres du président de la République ».
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