Les syndicats majoritaires de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), la CGT Ofpra et ASYL (Action syndicale Libre/Ofpra), ont appelé à une journée de grève. Un quart des 1 000 agents de l’Ofpra ont suivi le mouvement. Il faut remonter à février 2018, et la présentation de la loi Asile Immigration en Conseil des ministres pour trouver trace d’un tel mouvement social.
« Injonctions contradictoires »
Les grévistes dénoncent « l’objectif chiffré » d’examen des demandes d’asile. « Les délais d’examen sont en moyenne de 4 mois, ce qui est le délai le plus bas parmi les instances d’asile d’Europe. Chaque officier de protection instructeur examine en moyenne par jour 1,7 dossier. Ce ne sont pas de bonnes conditions pour tenir compte de la vulnérabilité des personnes précaires que nous avons en face de nous », explique Anouk Lerais de la CGT Ofpra, qui demande une baisse de 25 % des objectifs quantitatifs assignés aux officiers de protection.
Si 200 emplois supplémentaires ont été créés depuis 2019, « ils ont concerné essentiellement le pôle instruction », souligne Henry de Bonnaventure, un des responsables de l’ASYL. « Comme il y a plus d’agents instructeurs, le nombre de décisions de protection augmente, mais les autres services ne suivent pas, le service de protection, administratif, informatique… Les personnes protégées sont bloquées car elles doivent parfois attendre un an avant de se voir délivrer un document d’état civil ou administratif », ajoute-t-il.
Depuis la loi de 2018, les agents de l’Ofpra doivent également détecter si le demandeur d’asile ne représente pas une menace pour l’ordre public. « Cette mission ne devrait pas relever des agents de l’Ofpra, nous n’avons pas le temps d’être formés. Ça fait partie des injonctions contradictoires. Nous devons examiner de plus en plus de choses dans des délais de plus en plus contraints », détaille Henry de Bonnaventure.
Les guichets « France asile » contestés
Cette grève intervient à quelques jours de l’examen du projet de loi immigration au Sénat qui prévoit la création de guichets « France asile » dans les préfectures. Ils doivent permettre de raccourcir encore les délais d’instruction des demandes car le demandeur se fera enregistrer, et introduira sa demande d’asile auprès d’un agent de l’Ofpra dans un même lieu, la préfecture. Actuellement, les demandeurs d’asile se font délivrer une attestation en préfecture qu’ils doivent renvoyer, complétée, dans les 21 jours à l’Ofpra pour recevoir une convocation à un entretien. « Les agents vont être sous la dépendance directe des préfets. On imagine mal, dans ces conditions, comment ils vont pouvoir statuer en toute indépendance conformément à l’application de la Convention de Genève », craint Anouk Lerais.