Paris: Macron gestures during an interview on the french TV France 2

Guerre en Ukraine, situation à Gaza : ce qu’il faut retenir de l’interview d’Emmanuel Macron

C’était une interview très attendue, quelques jours après les propos polémiques d’Emmanuel Macron, qui avait affirmé « ne rien exclure » quant à l’envoi de troupes sur le sol ukrainien. Interrogé par Anne-Sophie Lapix et Gilles Bouleau, le président de la République a reconnu une situation « difficile » et appelé à nouveau ses homologues européens à « ne pas être lâches », affirmant que « « nous serons prêts à prendre les décisions qui s’imposent pour que la Russie ne gagne jamais ».
Alexis Graillot

Temps de lecture :

8 min

Publié le

Mis à jour le

Au lendemain du vote au Sénat, qui a approuvé très majoritairement le plan de soutien à l’Ukraine, et seulement quelques minutes après le premier débat des élections européennes retransmis sur Public Sénat, le Président de la République a accordé, ce jeudi 14 mars, une interview dans les journaux télévisés de TF1 et France 2. Si l’intervention du chef de l’Etat s’est essentiellement concentrée sur le conflit entre la Russie et l’Ukraine, le Président est également revenu sur la situation à Gaza.

« La Russie ne peut pas et ne doit pas gagner cette guerre »

Le chef de l’Etat s’est d’abord montré offensif envers le régime du Kremlin, affirmant que « Poutine a décidé de lui-même de lancer une guerre complète contre l’Ukraine. « Si les choses devaient dégénérer, ce ne serait que la responsabilité de la Russie », a martelé à plusieurs reprises le Président de la République, rappelant les différentes initiatives prises par la France depuis une décennie face à la « guerre d’agression » lancée par la Russie depuis 2014, à l’image des accords de Minsk, signés en septembre de la même année pour mettre fin à la guerre du Donbass.

« Vouloir la paix ce n’est pas choisir la défaite, ce n’est pas laisser tomber l’Ukraine, c’est d’être crédibles, forts et prêts pour nous adapter aux choix que la Russie ferait », a tancé le chef de l’Etat. « Décider aujourd’hui d’être faible, ce serait déjà être dans la défaite », a par ailleurs souligné à plusieurs reprises Emmanuel Macron dans son interview, constatant que « nous avons mis trop de limites dans notre vocabulaire », et « avons systématiquement fait ce que nous disions que nous ne ferons jamais ». « Si la Russie gagne cette guerre, la crédibilité de l’Europe serait réduite à zéro », a prévenu le chef de l’Etat, en écho à ses propos d’il y a seulement quelques jours, lorsqu’il avait enjoint ses homologues européens à « ne pas être lâches ».

Dès lors, Emmanuel Macron a appelé à un « sursaut collectif », réitérant sa « détermination (…) à mettre les moyens pour atteindre notre objectif que la Russie ne gagne pas », jugeant que « toutes les options sont possibles », mais qu’envoyer des troupes au sol « ne s’impose pas, aujourd’hui, en Ukraine ». Le locataire de l’Elysée a cependant souligné que « jamais nous ne prendrons d’initiative car la France est une force de paix ».

 Nous ne faisons pas la guerre à la Russie. Nous faisons tout pour que l’Ukraine mette la Russie en échec parce qu’il n’y a pas de paix durable s’il n’y a pas de souveraineté et un retour aux frontières internationalement reconnues de l’Ukraine 

Emmanuel Macron

« Si la Russie venait à gagner, la vie des Français changerait, nous n’aurons plus de sécurité en Europe »

Le chef de l’Etat est ensuite revenu sur le contexte du terrain militaire, reconnaissant une situation « difficile » et que « « la contre-offensive ukrainienne ne s’est pas passée comme attendue ». Rappelant les engagements pris envers l’Ukraine dans le cadre de l’accord bilatéral de sécurité signé le 16 février dernier, Emmanuel Macron a expliqué sa décision « d’aller plus loin dans l’aide à l’Ukraine », égrenant des « actions communes pour faire du déminage », le déploiement de « forces civiles à la frontière biélorusses », ainsi que « des actions défensives en cyber sur le sol ukrainien ».

Le Président de la République a également justifié cette décision en raison du « durcissement » du régime du Kremlin, « ces derniers mois », faisant référence aux « attaques cyber touchant les hôpitaux français », le meurtre d’opposants politiques ou encore en raison d’un « débat public est imprégné des fausses informations russes ». Pour autant, il ne juge pas le régime moscovite comme étant un « ennemi », préférant le qualifier d’« adversaire » : « Nous ne faisons pas la guerre à la Russie. Nous faisons tout pour que l’Ukraine mette la Russie en échec parce qu’il n’y a pas de paix durable s’il n’y a pas de souveraineté et un retour aux frontières internationalement reconnu de l’Ukraine », a averti le chef de l’Etat. « Si la Russie venait à gagner, la vie des Français changerait, nous n’aurons plus de sécurité en Europe », a-t-il ensuite alerté. « Qui peut penser que Poutine s’arrêterait là ? », s’est-il interrogé. « La sécurité de l’Europe et des Français se joue là-bas », affirmant « assumer » qu’il existait une « menace existentielle ». Pour autant, pas question à ce stade de « menace nucléaire » : « Nous devons nous sortir particulièrement protégés », a-t-il tenté de rassurer. « Le nucléaire n’est pas un instrument de déstabilisation et de menace, c’est un instrument de sécurité et de responsabilité de ne pas être dans l’escalade », a-t-il affirmé, rappelant que « [s]a responsabilité [était] la sécurité des Français et la défense nationale ».

Sur ces rapports avec Vladimir Poutine, le président de la République a déclaré « ne plus lui parler depuis plusieurs mois », rappelant qu’il a échangé avec lui « des centaines d’heures avant février 2022 », « longuement entre février et avril pour lui demander d’arrêter cette guerre et négocier la paix mais après cette date, ça n’avait plus de sens », s’est-il expliqué. Néanmoins, Emmanuel Macron s’est déclaré « prêt » au dialogue, pour peu que Vladimir Poutine « dise la vérité ».

 Les mêmes qui ne veulent pas soutenir l’Ukraine font le choix de la défaite et de l’abandon de souveraineté 

Emmanuel Macron

« Faire le choix [de l’abstention ou de l’opposition], ce n’est pas choisir la paix, mais choisir la défaite »

Le chef de l’Etat a ensuite été questionné sur le vote au Parlement en faveur du soutien militaire à l’Ukraine et notamment au regard des 3 milliards d’euros supplémentaires dans le cadre de l’effort de guerre de Kiev. Là encore, Emmanuel Macron s’est montré offensif : « Nous avons une responsabilité en tant que français », a-t-il dit, grave, affirmant qu’il est « toujours plus facile de chanter des comptines aux gens ». « Les mêmes qui ne veulent pas soutenir l’Ukraine font le choix de la défaite et de l’abandon de souveraineté », a tonné le Président de la République.

Aux accusations d’instrumentaliser le conflit, le locataire de l’Elysée s’est défendu : « J’ai constamment cherché à maintenir l’unité du pays », a-t-il affirmé, se référant aux rencontres de Saint-Denis organisées en novembre dernier. « Je suis respectueux du pluralisme mais j’ai un désaccord très profond [avec LFI et le RN] : « Faire ce choix ce n’est pas choisir la paix, mais choisir la défaite », a-t-il répété. Relancé par Anne-Sophie Lapix sur son éventuelle récupération du conflit, Emmanuel Macron a déclaré que « ce n’était pas sérieux » : « Notre responsabilité c’est tenir l’unité européenne et d’être forts pour dissuader, pour résister, pour notre sécurité ». Pour ce faire, le chef de l’Etat a assuré « ne pas exclure que nous ayons à prendre des décisions supplémentaires en européens », évoquant notamment les emprunts.  « A court terme, nous allons chercher des munitions partout où cela est possible ; à moyen-terme, nous devons développer notre industrie européenne de défense avec une capacité à produire beaucoup plus dans la durée », a-t-il expliqué.

Israël n’a pas de « droit absolu » à se défendre

Enfin, le président de la République a brièvement évoqué le conflit entre Israël et le Hamas et la situation dramatique de Gaza. « La France a une position constante », a déclaré Emmanuel Macron, qui a affirmé la « condamnation » de la France dès l’ « attentat terroriste » du Hamas contre Israël, rappelant avoir « coupé des financements » et « dissous des associations ». Le chef de l’Etat a également fait part de ses discussions avec Benyamin Netanyahou : « Vous êtes une démocratie, vous devez respecter le droit humanitaire, le droit de la guerre », a-t-il indiqué au Premier Ministre israélien, affirmant de son côté son souhait d’une « réponse politique aux droits des Palestiniens à avoir un Etat ». « Dès octobre, nous avons appelé à une trêve » et « porté une résolution au Conseil de sécurité de l’ONU pour un cessez-le-feu ». Sur les 3 otages français, le chef de l’Etat a toutefois refusé d’en dire plus : « Les discussions sont en cours, j’espère que nous obtiendrons ces libérations. Nous ferons tout pour la paix et la sécurité pour tous », a-t-il conclu son int

Dans la même thématique

Guerre en Ukraine, situation à Gaza : ce qu’il faut retenir de l’interview d’Emmanuel Macron
3min

Politique

Revalorisation du barème de l’impôt : « On peut imaginer plusieurs scenarii », selon Claude Raynal

Après avoir été présenté en conseil des ministres ce mercredi 11 décembre, le projet de loi spéciale sera examiné à l’Assemblée nationale à partir du 16 décembre et au Sénat en milieu de semaine prochaine. Cet après-midi, les ministres démissionnaires de l’Economie et du budget ont été entendus à ce sujet par les sénateurs. « La Constitution prévoit des formules pour enjamber la fin d’année », s’est réjoui le président de la commission des Finances du Palais du Luxembourg à la sortie de l’audition.

Le

Paris: Emmanuel Macron Receives President Of Guinea-Bissau Umaro Sissoco Embalo
4min

Politique

« Réguler les égos » : comment Emmanuel Macron conçoit son rôle dans son camp

Au moment où le chef de l’Etat s’apprête à nommer un nouveau premier ministre, Emmanuel Macron a reçu ce mercredi à déjeuner les sénateurs Renaissance, à l’Elysée. Une rencontre prévue de longue date. L’occasion d’évoquer les collectivités, mais aussi les « 30 mois à venir » et les appétits pour 2027…

Le

Guerre en Ukraine, situation à Gaza : ce qu’il faut retenir de l’interview d’Emmanuel Macron
4min

Politique

Gouvernement : « On ne peut pas simplement trépigner et attendre que le Président veuille démissionner », tacle Olivier Faure

Olivier Faure, le Premier secrétaire du PS, réclame un Premier ministre de gauche, alors que LFI refuse de se mettre autour de la table pour travailler sur la mise en place d’un gouvernement, préférant pousser pour une démission du chef de l’Etat. Ce mercredi, députés et sénateurs PS se sont réunis alors que le nom du nouveau chef de gouvernement pourrait tomber d’un instant à l’autre.

Le

La sélection de la rédaction