A quelques jours de l’audience qui devait avoir devant la cour de justice de le République, Noël Le Graët, par la voix de son avocat a annoncé retirer sa plainte pour diffamation contre l’ancienne ministre des Sports. Invitée dans l’émission Sport etc, Amélie Oudéa-Castéra réagit en exclusivité à cette annonce au micro d’Anne-Laure Bonnet.
Européennes, éducation, écologie… Ces dossiers brûlants auxquels va devoir s’atteler Gabriel Attal
Par Romain David
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L’heure est aux grandes tractations à la tête de l’Etat. Tout juste nommé Premier ministre, Gabriel Attal, s’est entretenu deux heures avec Emmanuel Macron ce mercredi. L’occasion, certainement, d’évoquer la constitution du prochain gouvernement. Un jeu de chaises musicales qui peut vite s’apparenter à un casse-tête. Les premiers noms pourraient être annoncés jeudi. Mais il faudra attendre un peu plus longtemps, et un éventuel discours de politique générale, pour en savoir davantage sur la feuille de route que compte suivre le nouveau chef du gouvernement. Pour autant, la pile de dossiers qui l’attend à Matignon a déjà de quoi donner le tournis.
Rassurer la majorité et gérer les suites de la loi immigration
Jusqu’au 25 janvier, l’exécutif est suspendu à la décision du Conseil constitutionnel pour savoir quelle sera sa marge de manœuvre sur l’application de la loi immigration, définitivement adoptée par le Parlement le 19 décembre, mais dont plusieurs dispositifs d’envergure – notamment sur les quotas migratoires, les prestations sociales et le regroupement familial – risquent la censure. Par ricochet, un détricotage du texte sonnerait comme un camouflet pour l’exécutif, qui paradoxalement ne cache pas son embarras face à un objet législatif qui a fini par lui échapper.
Le durcissement de ce texte, à l’initiative de la droite sénatoriale, a profondément ébranlé la majorité relative d’Emmanuel Macron au point que certains y ont vu un tournant décisif dans la macronie. En tant que nouveau leader de la majorité, Gabriel Attal va devoir rassurer et conforter les troupes présidentielles. Pour mémoire, 20 membres de Renaissance ont voté contre le texte et 17 se sont abstenus. D’autant que du côté des soutiens d’Emmanuel Macron, l’arrivée de Gabriel Attal à Matignon ne fait pas l’unanimité. François Bayrou, le très influent patron du MoDem, a largement fait campagne pour que Julien Denormandie, l’ex-ministre de l’Agriculture, soit plutôt nommé en remplacement d’Élisabeth Borne. Les députés Horizons pourraient également voir dans le nouveau chef de gouvernement un compétiteur de taille pour leur champion, Edouard Philippe, dont les ambitions présidentielles ne font guère mystère.
L’un des derniers engagements pris par le gouvernement Borne risque d’attiser encore un peu plus les divisions : la réforme de l’Aide médicale d’Etat (AME) promise pour ce début d’année, et qui a été l’un des éléments clés de la négociation entre les LR et le gouvernement sur le texte immigration, pourrait semer l’émoi au sein de la majorité. En particulier du côté de l’aile gauche historique de la macronie, dont Gabriel Attal est lui-même issu, même s’il semble aujourd’hui séduire davantage la droite.
Donner un souffle à la campagne des européennes
Avec un Rassemblement national qui caracole en tête des enquêtes d’opinion, la campagne des européennes s’annonce particulièrement ardue pour la majorité. Cette situation a peut-être pesé dans le choix d’Emmanuel Macron de nommer Gabriel Attal comme Premier ministre. Le profil du nouveau chef de gouvernement est souvent comparé à celui de Jordan Bardella, chef de file du RN pour le scrutin de juin. Les deux hommes figurent d’ailleurs dans le top 5 des personnalités politiques préférées des Français. Leur jeunesse, la rapidité de leur ascension en politique et leur aisance dans les médias sont constitutives de trajectoires parallèles, celles de deux héritiers revendiqués du clivage politique qui s’est installé ces dernières années entre le camp « progressiste » et le camp « populiste ».
Mais le match qui s’annonce et la tonalité de la campagne seront également déterminés par la tête de liste que désignera Renaissance. À ce stade, l’eurodéputé Stéphane Séjourné reste pressenti, et lui-même a confié à plusieurs médias son envie de retourner au front.
Faire de l’Education une priorité
« J’emmène avec moi à Matignon la cause de l’école, qui doit être la mère des batailles », a déclaré mardi celui qui sera resté seulement cinq mois rue de Grenelle. Une manière aussi de rassurer un monde enseignant en ébullition face à la montée de l’insécurité dans les établissements, qui a vu passer en deux ans trois ministres, et dans l’attente désormais d’un quatrième. Il faut dire que le passage éclair de Gabriel Attal à l’Education a été marqué par une décision choc, l’interdiction du port de l’abaya en milieu scolaire, débat que son prédécesseur, Pap Ndiaye, s’était refusé à trancher. Mais aussi par le lancement de plusieurs chantiers d’envergure avec un plan de lutte contre le harcèlement scolaire, la mise en place de groupes de niveau et une réforme du brevet des collèges.
Il reste désormais à déterminer quelle sera la marge de latitude du Premier ministre sur ce portefeuille. À l’hebdomadaire Le Point, Emmanuel Macron avait indiqué que l’éducation était un « domaine réservé du président ». D’ailleurs, cette thématique fera partie du « rendez-vous avec la Nation » promis par le chef de l’Etat pour ce mois de janvier, mais dont les contours restent encore flous.
Garantir la bonne tenue des Jeux olympiques
Ce sera l’événement de l’été, plaçant pendant un mois la France sous le feu des projecteurs. La réussite comme l’échec de ce raout sportif rejailliront nécessairement sur le gouvernement et son chef de file. Après le fiasco de la finale de la Ligue des Champions au Stade de France en mai 2022, la sécurisation de la cérémonie d’ouverture et des compétitions apparaît comme un enjeu majeur. Et déjà, les inquiétudes s’amoncellent : risque de saturation dans les transports en commun, grogne des syndicats de police sur les conditions de travail des fonctionnaires, qui devront se passer de congés pendant les épreuves, sans compter les 20 000 agents de sécurité que le secteur peine à recruter…
L’ampleur du chantier pourrait garantir à Gérald Darmanin son maintien au ministère de l’Intérieur. Un temps pressenti pour être nommé à Matignon, l’ex-LR semble être tombé en disgrâce depuis l’épisode de la loi immigration, incapable de prévoir l’ampleur du soutien accordé par son ancienne famille politique à la motion de rejet déposée contre le texte. Ce mercredi, auprès de franceinfo et de BFMTV, des membres de son entourage assurent qu’Emmanuel Macron lui a « réaffirmé sa confiance ». La veille, à l’occasion d’un déplacement à la DGSI, le ministre de l’Intérieur avait d’ailleurs déclaré, en évoquant les JO : « Je pense que chacun a vu que je n’avais pas fini ma mission à l’Intérieur, et que je ne suis pas homme à me dérober ».
Sur X (anciennement Twitter), il s’est fendu d’un message de félicitation des plus concis à l’adresse de son jeune collègue : « Félicitations à Gabriel Attal. Je lui souhaite une pleine réussite au service des Français. » Pour s’imposer, le nouveau « PM » doit encore apprivoiser les grands fauves de la majorité. Composer avec les ambitions des uns et des autres, alors que certains pourraient être tentés d’enjamber son autorité pour n’avoir de compte à rendre qu’au chef de l’Etat.
Mener la réforme du marché du travail à son terme
La lutte contre le chômage structurel est l’un des grands axes politiques du quinquennat. La récente réforme du RSA et la transformation de Pôle emploi, devenu France Travail le 1er janvier, ont pour objectif de faire tomber un taux de demandeurs d’emploi qui stagne depuis plusieurs mois autour des 7 % à 5 %. Le départ d’Élisabeth Borne intervient alors que les négociations syndicales et patronales sur l’emploi des seniors viennent de s’ouvrir, elles doivent durer jusqu’à la fin mars. La mise en place d’un accord devrait se traduire par un nouveau texte de loi.
Mais dans le camp présidentiel, les appels à aller encore plus loin se multiplient. Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie, a ouvert le débat sur une nouvelle réforme de l’assurance chômage pour les plus de 55 ans. Dans un entretien aux Echos, Olivier Dussopt, le ministre du Travail, évoque clairement « un acte II de la réforme du marché du travail », avec une limitation du recours aux prud’hommes après un licenciement ou un renforcement du contrôle des demandeurs d’emploi. Autant de propositions sur lesquelles le nouveau Premier ministre devra trancher.
Faire aboutir les grands dossiers sociétaux du quinquennat
Si les deux textes les plus clivants de ce second mandat – la réforme des retraites et la loi immigration -, ont été assumés par sa prédécesseure, Gabriel Attal récupère quelques dossiers sensibles. À commencer par l’inscription de l’IVG dans la Constitution, une promesse d’Emmanuel Macron. Pour aboutir, cette modification constitutionnelle doit d’abord être ratifiée par chacune des deux chambres du Parlement, le Sénat et l’Assemblée nationale, puis à nouveau votée par au moins trois cinquièmes des parlementaires réunis en Congrès. La date est déjà fixée : le 5 mars. D’ici là, Gabriel Attal va devoir travailler au corps la majorité sénatoriale de droite et du centre, plutôt rétive à l’idée de modifier la Constitution.
Autre dossier toujours en attente : le projet de loi sur la fin de vie. Initialement annoncé pour la fin de l’été, ce texte sur lequel planche Agnès Firmin-Le Bodo, actuelle ministre de la Santé, n’a toujours pas été présenté en Conseil des ministres. Lors de ses vœux aux autorités religieuses, Emmanuel Macron a laissé entendre qu’il n’y aurait pas un, mais deux textes. L’un consacré aux soins palliatifs, exposant la stratégie décennale de la France alors que leur mise en œuvre à l’échelle du territoire continue de poser des difficultés. L’autre comportant un volet sur l’aide active à mourir, un sujet particulièrement délicat à traiter. Sur ce projet de loi, le gouvernement pourrait chercher à décrocher une majorité en s’appuyant sur les oppositions de gauche. Encore porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal avait déclaré en 2021 au journal Le Monde : « A titre personnel, je suis favorable à une aide active à mourir en cas de maladie incurable dont les souffrances ne peuvent être apaisées. »
Répondre à la crise du logement
82 % des Français estiment que le logement reste le grand oublié du gouvernement, selon une étude réalisée par OpinionWay en mai dernier. Constructions à l’arrêt, hausse des taux d’intérêt, loyers trop élevés… les turbulences du secteur immobilier ont animé les discussions budgétaires de la fin d’année, notamment au Sénat, où les élus ont rejeté les crédits prévus pour le logement dans le projet de loi de finance 2024, dénonçant ainsi l’inertie du gouvernement en la matière.
Deux projets de loi ont déjà été annoncés : l’un sur les copropriétés, qui doit arriver en début d’année, et l’autre sur le logement à proprement parler, intégrant les enjeux de la transition écologique, et qui pourrait être présenté au printemps. Le gouvernement devra alors sortir d’une ambiguïté que dénonçait en décembre le sénateur LR Jean-Baptiste Blanc, rapporteur spécial de la commission des Finances : « Je me demande s’il n’y a pas un projet caché : arrêter le neuf, la propriété, la maison individuelle et faire avec le bâti existant. Tacitement, ils anticiperaient la baisse de la démographie ».
Relever le défi de la planification écologique
Avec Matignon, Gabriel Attal récupère également le dossier de la planification écologique, dont Élisabeth Borne avait la charge. En septembre dernier, la Première ministre sortante avait livré une feuille de route détaillée pour définir une écologie « à la française », articulée autour de cinq axes : le développement du rail, la rénovation thermique des bâtiments, la fin des centrales à charbon, la restauration des écosystèmes à travers, notamment, la lutte contre l’artificialisation des sols, et enfin une transformation de la filière agroalimentaire. À charge de Gabriel Attal de mettre en musique cette partition.
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