Une partie de la classe politique monte au créneau pour dénoncer le discours fleuve tenu par le chef de l’Etat à la Sorbonne sur l’Europe, jeudi 25 avril. Les oppositions sont moins remontées contre les propos tenus par Emmanuel Macron que sur la forme de son intervention : elles accusent le président de la République d’utiliser sa fonction pour faire campagne en faveur de la tête de liste de la majorité pour les élections européennes, Valérie Hayer, engluée à la deuxième place dans les sondages, loin derrière le Rassemblement national. Les Républicains ont annoncé avoir saisi la Commission nationale des comptes de campagne et l’Arcom. Ce vendredi matin, c’est Olivier Faure, le Premier secrétaire du Parti socialiste, qui indique vouloir se tourner vers l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique.
« Il est curieux que le chef de l’Etat, à ce moment-là de la séquence, prenne la parole, mobilise les chaînes de télévision, le fasse comme s’il était la tête de liste de sa propre liste, mais sans être décompté. Il y a là un premier sujet qui est un sujet d’iniquité entre les candidatures », explique le patron des socialistes au micro de « Bonjour chez vous », la matinale de Public Sénat. « On voit bien que le chef de l’Etat est devenu directeur de campagne, pour ne pas dire qu’il est devenu candidat à cette élection européenne, ce qui pose une vraie difficulté ».
« Faire en sorte que chacun puisse disposer d’un même temps de parole, d’une même exposition »
Olivier Faure « souhaite que le temps de parole du chef de l’Etat soit décompté et que les autres listes puissent bénéficier du même traitement ». « Ce serait quand même le minimum. Parce qu’hier, il n’a rien dit qu’il n’ait déjà dit et qui fasse en réalité bouger l’Europe », tacle notre invité. De son côté, l’Elysée a présenté l’allocution du chef de l’Etat comme une intervention « institutionnelle », alors que la législature en cours est sur le point de s’achever.
« Il n’y a aucune raison particulière à cette prise de parole, si ce n’est qu’il y a une campagne électorale et qu’il entend y prendre toute sa part », balaye Olivier Faure, qui confirme vouloir saisir l’Arcom pour que le discours du chef de l’Etat soit inclus dans le décompte des temps de parole. Mais il réclame également l’intégration de la dépense liée à cet événement dans les comptes de campagne du camp présidentiel. « Il me paraît absolument légitime qu’il prenne la parole. Je n’ai pas de problème avec ça, mais il faut après, dans ce cas-là, traiter les candidatures avec équité et donc faire en sorte que chacun puisse disposer d’un même temps de parole, d’une même exposition », explique celui qui est également député de Seine-et-Marne.
« Je demande que Raphaël Glucksmann (qui conduit la liste PS-Place publique) puisse avoir les mêmes conditions, qu’il puisse avoir lui aussi une heure et demie d’exposition médiatique sur toutes les chaînes et qu’il ait la possibilité de venir exposer son propre projet », martèle Olivier Faure. « Je dois dire qu’aucun candidat n’a les moyens techniques de l’Elysée pour pouvoir occuper un amphithéâtre à la Sorbonne, mobiliser les cars de CRS pour bloquer les rues, enfin j’en passe et des meilleurs… »
« Il est vraisemblable que Jordan Bardella soit le premier » le 9 juin
À en croire les sondages, la candidature de Raphaël Glucksmann enregistre depuis la fin du mois de février une bonne dynamique. À la troisième place, autour des 13 % d’intentions de vote, l’eurodéputé talonne désormais Valérie Hayer, qui reste bloquée sous la barre des 20 %. À un mois et demi du scrutin, les socialistes misent sur un croisement des courbes. « Les sondages donnent déjà un bon résultat, mais on peut faire mieux, et on va essayer de faire mieux », assure Olivier Faure. « Avec nous, l’Europe peut prendre un nouveau cours et sortir de son lit néolibéral. L’Europe est conduite depuis des décennies par les libéraux et la crise que nous vivons est une crise du monde libéral », défend le socialiste.
À ce stade toutefois, rien ne semble devoir inquiéter la tête de liste du Rassemblement national, Jordan Bardella, qui caracole en tête de toutes les enquêtes d’opinion, au-dessus du seuil des 30 % d’intentions de vote. « Il est vraisemblable que Jordan Bardella soit le premier » lors du vote du 9 juin prochain, concède Olivier Faure. « Mais il est vraisemblable aussi que cela soit un réveil pour l’Europe et la France. Il faut se dire que la seule possibilité de battre le RN en 2027, c’est avec la gauche ».