Etats-Unis : « Les partisans de Donald Trump sont prêts à la riposte », affirme André Kaspi

Etats-Unis : « Les partisans de Donald Trump sont prêts à la riposte », affirme André Kaspi

Jeudi 30 mars, Donald Trump est devenu le premier ancien président des Etats-Unis à être inculpé par la justice. André Kaspi, historien et spécialiste de la politique américaine, évalue pour Public Sénat l’importance de cette inculpation. Les événements pourraient notamment bousculer les équilibres au sein du parti républicain.
Henri Clavier

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

C’est un grand jury de l’Etat de New York qui a pris, hier, la décision d’inculper Donald Trump pour le versement de 130 000 dollars à une actrice pornographique, Stormy Daniels, en 2016. Pendant la campagne présidentielle, Donald Trump avait missionné son avocat, Michael Cohen, pour acheter le silence de Stormy Daniels (Stephanie Clifford de son vrai nom) à propos d’une relation avec l’homme d’affaires américain. Mais, Donald Trump a fait passer cette somme pour des frais juridiques liés au lancement de sa campagne électorale.

Sur quoi peut déboucher cette inculpation ?

La première observation c’est que la justice américaine est pointilleuse et lente. Ce n’est pas parce que Trump fait l’objet d’une information judiciaire qu’il ira en prison, ça prend beaucoup de temps. Il l’avait annoncé en prévention le 18 mars à ses fidèles appelant à se préparer ré. Les partisans de Donald Trump sont prêts à la riposte. Avant qu’il fasse l’objet d’une instruction et d’un procès, il y aura du temps, donc ça ne veut pas dire qu’il va se retrouver directement en prison. Surtout, dans un an la campagne présidentielle américaine battra son plein avec les primaires qui sont une étape importante dans la vie politique américaine.

Est-ce que les autres affaires en cours peuvent aussi connaître une accélération dans les semaines qui viennent ?

En effet, il n’y a pas que cette accusation à l’encontre de Stormy Daniels et des 130 000 dollars remis par l’ancien avocat de Donald Trump, Michael Cohen. Il y a d’autres accusations notamment sur les documents qu’il a emportés, il y a d’ailleurs eu une perquisition du FBI dans son domicile de Floride. Les accusations sont très nombreuses. Il y a une accusation selon laquelle il aurait fait pression, après les élections de 2020, sur le secrétaire d’État de Géorgie pour « trouver les voix manquantes » dans l’Etat de Géorgie et ainsi gagner l’élection. Il y a aussi de très vieilles histoires. Avec, par exemple, une journaliste qui accuse Donald Trump de viol durant les années 1990. Au fur et à mesure les accusations se multiplient, tout cela entretient une atmosphère particulièrement déplaisante qui nuit à la préparation de la campagne et qui posera problème pendant.

A quelques mois du début de la primaire pour les élections de 2024, est-ce que ces accusations sont de nature à fragiliser Donald Trump dans le camp républicain ?

Le camp républicain est très divisé, les fidèles de Trump sont toujours très présents mais ils ne sont pas une force assez importante pour que ces accusations ne produisent pas d’effets dans le camp républicain. Néanmoins les supporters les plus farouches, les Maga ( « Make America Great Again ») sont très attachés à la personnalité de Donald Trump et ils ne devraient pas le lâcher, ils sont plus attachés à Donald Trump qu’au parti républicain.

Et le reste du parti républicain ? Est-ce que cette situation peut profiter au rival annoncé de Donald Trump, Ron DeSantis ?

Certains républicains resteront très fidèles et d’autres seront plus divisés. Les supporters de Trump représentent un mouvement important au sein du parti républicain mais ils ne sont pas majoritaires. Il existe une importante frange légaliste chez les républicains qui peut se détourner de Trump en cas de condamnation. Concernant Ron DeSantis, encore faut-il qu’il arrive à utiliser ces accusations à bon escient. DeSantis ne peut pas se présenter comme un anti Donald Trump. Pour lui, il faut avant tout reprendre une stratégie classique qui consiste à dénoncer les pratiques imputées au parti démocrate et défendre les valeurs prônées par le parti républicain. C’est tout de même une situation délicate. Ron DeSantis se retrouve dans la position du successeur alors que le personnage principal, Donald Trump n’a pas encore quitté la scène.

Comment les partisans de Donald Trump réagissent à cette inculpation ?

Les partisans de Trump ne sont pas un groupe homogène. Il a des fidèles mais pour beaucoup ce sont des républicains qui défendent le dernier président républicain, c’est un soutien contraint. Et puis, les partis américains sont très différents d’un Etat à l’autre. Il y a une division profonde au sein du parti républicain et ces différentes factions ne le soutiennent pas nécessairement.

Quelle est la stratégie de défense adoptée par Donald Trump ?

Elle est assez classique, Donald Trump dit que ce sont des inventions, que tout cela est faux et qu’on l’attaque parce qu’il va devenir le futur président. A son habitude, il déroule son scénario dans lequel il est une victime, la cible de la justice américaine. L’important c’est de savoir si la justice de New York dispose d’arguments suffisamment solides pour le condamner.

Est-ce qu’on doit s’attendre à des manifestations importantes, à New York par exemple, pour défendre Donald Trump ?

C’est un pays tellement vaste, je doute qu’on assiste à une déferlante comme en janvier 2021. Entre ce qu’il se passe en Floride, à Washington et à Seattle il y a beaucoup de différences, donc on ne peut pas dire que tout le pays va s’enflammer pour venir à la rescousse de Donald Trump, mais il est probable qu’il y ait des manifestations en faveur de Donald Trump.

 

 

Dans la même thématique

Etats-Unis : « Les partisans de Donald Trump sont prêts à la riposte », affirme André Kaspi
3min

Politique

Retraites : « Il y a de la démagogie chez ceux qui expliquent que l’on peut aussi revenir sur la réforme Touraine », alerte Bernard Jomier

Alors que les députés PS soutiennent l’abrogation de la réforme des retraites portée par La France insoumise, qui efface également le mécanisme mis en place par l’ancienne ministre de la Santé Marisol Touraine sous François Hollande, le sénateur Bernard Jomier (Place publique), appelle les parlementaires de gauche à ne pas aller trop loin face aux enjeux démographiques.

Le

Paris: Weekly session of questions to the government at the french senate
6min

Politique

Budget : les sénateurs écologistes accusent la majorité du Sénat de « lâcher les collectivités »

Alors que la majorité sénatoriale veut réduire l’effort demandé aux collectivités de 5 à 2 milliards d’euros dans le budget, c’est encore trop, aux yeux du groupe écologiste du Sénat. « Il y a un changement de pied de la majorité sénatoriale », pointe le sénateur Thomas Dossus. Avec le groupe PS et communiste, ils vont présenter onze amendements identiques « pour faire front commun ».

Le

Etats-Unis : « Les partisans de Donald Trump sont prêts à la riposte », affirme André Kaspi
2min

Politique

Retrait de la plainte de Noël Le Graët : « une décision sage et prudente » réagit Amelie Oudéa-Castera

A quelques jours de l’audience qui devait avoir devant la cour de justice de le République, Noël Le Graët, par la voix de son avocat a annoncé retirer sa plainte pour diffamation contre l’ancienne ministre des Sports. Invitée dans l’émission Sport etc, Amélie Oudéa-Castéra réagit en exclusivité à cette annonce au micro d’Anne-Laure Bonnet.

Le

G7 summit in Borgo Egnazia
6min

Politique

Nomination des commissaires européens : « On constate qu’Ursula von der Leyen ne peut pas se passer du soutien de Giorgia Meloni », note un spécialiste des partis européens 

La Commission européenne devrait pouvoir entrer en fonction dès le 1er décembre après l’accord entre les trois principaux partis européens sur le collège des commissaires. Un accord qui illustre la place centrale de la droite européenne, prête à s’allier avec l’extrême droite.

Le