La Commission européenne devrait pouvoir entrer en fonction dès le 1er décembre après l’accord entre les trois principaux partis européens sur le collège des commissaires. Un accord qui illustre la place centrale de la droite européenne, prête à s’allier avec l’extrême droite.
Emeutes : à Matignon, les présidents de groupe (presque) unis sur le retour à l’ordre, pas sur les solutions
Par François Vignal
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Face aux émeutes qui traversent tout le pays, l’exécutif se montre à la manœuvre. Alors qu’Emmanuel Macron a reçu ce lundi la présidente Renaissance de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, et le président LR du Sénat, Gérard Larcher, charge à la première ministre de rassembler les présidents des groupes politiques des deux chambres.
A la sortie, le président du groupe LR du Sénat, Bruno Retailleau, entend « ne pas mélanger les temporalités ». « Aujourd’hui, la République doit serrer les rangs. Et demain, il ne faudra pas se tromper de diagnostic », soutient le patron des sénateurs LR, qui précise : « Serrer les rangs, ça signifie que tant qu’il y a encore en France cette violence inouïe, un peu partout dans nos régions, un républicain doit avoir seulement deux attitudes : la première, c’est le soutien total à nos forces de l’ordre (…) et à nos élus, qui sont en première ligne, les fantassins de la République. La deuxième attitude, c’est de laisser le gouvernement travailler pour rétablir l’ordre public ».
« La République, depuis des années, déverse des milliards et des milliards d’euros dans ces quartiers », pointe Bruno Retailleau
« Pour demain », il ne faudra « pas de réponse victimaire. Ces violences inouïes, ce n’est pas un cri de détresse, un appel à l’aide et les émeutiers ne sont certainement pas les déshérités de la République. La République, depuis des années, déverse des milliards et des milliards d’euros dans ces quartiers-là, et une partie de ces milliards sont d’ailleurs partis en fumée », dénonce Bruno Retailleau (voir la vidéo). Des propos qui vont lui valoir des critiques de la gauche, on va le voir. Pour le sénateur de Vendée, les réponses passent par le plan judiciaire, en rendant « systématique les comparutions directes de mineurs, car la moyenne d’âge des interpellés, c’est 17 ans, pour que la sanction soit rapide et extrêmement ferme ». Il s’est « félicité » que le ministre de la Justice ait par ailleurs rappeler que la loi permet « d’engager la responsabilité des familles ». Sur ce sujet, Bruno Retailleau a noté que la première ministre était « ouverte à l’idée » de viser cette responsabilité.
Mais pour lui, il faudra aller plus loin, et « rétablir la possibilité de priver ces familles d’allocations sociales et familiales. Quand il n’y a pas de responsabilité familiale, qu’il n’y a pas de devoirs assumés, il n’y a donc pas de droits consacrés ». Troisième élément de réponse aux yeux de Bruno Retailleau : « Mettre fin au chaos migratoire ».
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S’il défend une certaine idée d’unité nationale aujourd’hui, Bruno Retailleau a cependant durement attaqué La France Insoumise, « qui a choisi son camp. Ce n’est pas le camp de la République, c’est le camp de la violence théorisée ».
Quelques minutes plus tôt, la présidente du groupe LFI, Mathilde Panot, a préféré claquer la porte de la réunion, quittant avant la fin Matignon. « Nous n’avons eu aucune réponse à nos questions. Nous ne voulions non pas une réunion à huis clos mais un débat au Parlement », a dénoncé la députée LFI. « Ils peuvent faire toutes les diversions qu’ils veulent, un jeune homme de 17 ans est mort » dénonce-t-elle, pointant aussi le « communiqué d’un syndicat de policiers factieux ».
Le RN veut un « moratoire sur l’immigration »
A l’opposé sur le spectre politique, Sébastien Chenu, venu pour le RN – Marine Le Pen souhaitant être reçue par Emmanuel Macron – a souligné que son parti « continuera à travailler dans le sens de l’apaisement dont notre pays a tant besoin, contrairement aux propos irresponsables et délirants de LFI ».
Le vice-président RN de l’Assemblée a dit à la première « que ce n’est pas avec les vieilles recettes qu’elle pourrait s’en sortir, les mêmes excuses, les mêmes analyses sociologiques, le même déversement d’argent public sans aucune visibilité sur les résultats attendus. Les choses n’iront qu’en s’empirant si le gouvernement ne fait pas un virage à 180 degrés sur les politiques de sécurité, de justice et en lançant un moratoire sur l’immigration ». « Nous allons les juger sur les actes, mais il y a urgence. Et l’urgence, ce pourrait bien être l’alternance », conclut Sébastien Chenu.
« Depuis plusieurs jours, il y a ceux qui sont extrêmement dignes, nos élus locaux et nos maires, qui appellent au calme, car ils sont en première ligne », a souligné la présidente du groupe Renaissance de l’Assemblée, Aurore Bergé, qui était présente aux côtés du maire de L’Haÿ-les-Roses cet après-midi. A l’inverse, elle accuse « cette petite minorité qui a refusé d’appeler au calme et qui fait un lien entre un événement sur lequel la justice va se prononcer, (…) et les émeutes, les violences. Rien ne peut justifier, rien ne peut excuser ». Et de regretter que « la présidente du groupe LFI ait préféré partir pour théâtraliser cet événement ».
« Il n’est pas possible d’imaginer que ce pacte républicain puisse fonctionner que sur une seule jambe, celui de la sanction » pour le socialiste Patrick Kanner
Pour le reste de la gauche, qui est resté jusqu’au bout, la situation soulève de nombreuses questions. « Est-ce que notre pacte républicain continue à fonctionner aujourd’hui dans notre pays ? On peut légitimement s’interroger », souligne Patrick Kanner, à la tête du groupe PS du Sénat. « Nous avons attiré l’attention sur la situation d’un certain nombre de quartiers, dis notre attachement à la politique de la ville, l’éducation », ajoute à ses côtés Boris Vallaud, président du groupe PS de l’Assemblée, pour qui le sujet des « relations entre police et population devait pouvoir être discuté ».
Pour Patrick Kanner, ancien ministre de la Ville de François Hollande, les réponses doivent être équilibrées. « Nous voulons que les réponses fortes sur l’ordre, la police, les sanctions, soient contrebalancées le plus vite possible par des politiques de prévention. Il n’est pas possible d’imaginer que ce pacte républicain puisse fonctionner que sur une seule jambe, celui de la sanction, de la répression ». Le sénateur PS du Nord ajoute : « Rappelez-vous nos propos au moment de la réforme des retraites, nous disions que cette crise sociale majeure, aboutira à une crise démocratique. Nous y sommes ».
Un équilibre dans les réponses qu’appelle aussi de ses vœux André Chassaigne, président du groupe Gauche démocrate et républicaine (communiste) de l’Assemblée. « La seule solution ne peut être la matraque. Il faut un accompagnement de long terme », soutient le député communiste, qui dénonce « les raccourcis, comme cela a été dit par certains, du type « on a déversé des milliards sur les banlieues, ça ne sert à rien ». C’est inacceptable qu’on puisse tenir ces propos ».
« On a l’impression qu’on a un gouvernement qui reste les bras ballants, qui ne sait pas quoi faire »
« Tout ça pour ça », a lancé pour sa part la présidente du groupe écologiste du Palais Bourbon, Cyrielle Chatelain, qui regrette qu’il n’y ait « aucune proposition » et « aucune proposition sur la police, comme si c’était un drame individuel, pas de réflexion sur la loi de 2017 et l’utilisation des armes face au refus d’obtempérer ».
« On a l’impression qu’on a un gouvernement qui reste les bras ballants, qui ne sait pas quoi faire. Alors on répond par les réseaux sociaux, où on va être un peu plus dur, on va taper un peu plus sur les parents et on espère, on croise les doigts, que cette séquence passe et qu’on passe à autre chose. C’est l’impression qu’on a eue en écoutant Elisabeth Borne. Ce n’est pas rassurant », pense Guillaume Gontard, président du groupe écologiste du Sénat. « On parle de l’absence des parents. Je pense que c’est l’absence de l’ensemble des adultes, des humains, des services publics », qui pose problème, « il faut faire deux fois plus, trois fois plus dans ces territoires », défend le sénateur de l’Isère.
Après tous les présidents de groupe, Elisabeth Borne a pris rapidement la parole à son tour. Excepté le « comportement assez singulier » de Mathilde Panot, la cheffe de gouvernement a « noté qu’il y avait une très large convergence, d’abord pour rendre hommage aux policiers, gendarmes, pompiers » et « aux élus locaux ». Tout comme « une très large convergence pour dire que la priorité, c’est d’assurer le retour à l’ordre républicain ». Le reste, « soulève de très nombreuses questions. Mais nous aurons l’occasion de nous revoir ». Car pour les réponses, on est très loin de la concorde nationale.
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