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Elections européennes : Renaissance se « met en jambes » à Bordeaux, avant la campagne
Par François Vignal
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Le sujet est encore loin, et même très loin, dans l’esprit des Français. Les élections européennes n’arrivent que le 9 juin. C’est pour cette raison que Renaissance n’entend pas se précipiter. Ce qui n’empêche de préparer le terrain. La rentrée politique du parti présidentiel, qui se tient ce week-end à Bordeaux, se teinte ainsi de cette dimension, prenant le nom de « campus européen », histoire de commencer à mettre dans l’atmosphère le sujet. Outre les pontes de la majorité présidentielle qui sont attendus sur place, le campus a une invitée de marque. Stéphane Séjourné, secrétaire général de Renaissance et président du groupe Renew au Parlement européen, a invité la présidente de la commission européenne, Ursula von der Leyen.
Attention, contre toutes apparences, n’allez pas y voir le début de la campagne des européennes pour Renaissance. « Ce n’est pas un lancement, c’est une première étape, une mise en jambes », assure Antoine Guéry, porte-parole de Stéphane Séjournée au Parlement européen. Mais reste que le sujet européen sera bien central sur le campus. « Il faut beaucoup parler d’Europe », confirme un ministre, qui défend l’idée de se lancer à plein dans la bataille, du moins quand elle aura vraiment commencé :
Mais il s’agit de ne pas non plus partir trop vite, comme l’ont fait, selon les macronistes, Jordan Bardella pour le RN et Marion Maréchal pour Reconquête. « On n’a pas intérêt à se caler sur leur calendrier », met en garde une source gouvernementale. C’est donc plutôt une précampagne qui se met en place.
« On sera quasiment la seule liste pro européenne »
Si tout n’est pas encore calé, une chose est sûre : Renaissance entend faire du scrutin en enjeu européen, et non national. Normal pour le parti macroniste, dont l’Europe fait partie de l’ADN. Une particularité dont Renaissance entend profiter pour mieux jouer la différence avec les autres partis, RN et Reconquête en tête. « Nous avons une double spécificité. La première, c’est qu’on sera quasiment la seule liste pro européenne, où il n’y a pas d’ambiguïté sur notre engagement européen. La deuxième, c’est que nous allons présenter un bilan comme sortant, en tant que ceux qui ont gouverné l’Europe et qui assument d’avoir été aux commandes de l’Union européenne depuis 5 ans », défend Antoine Guéry.
Côté bilan, la majorité présidentielle pourra mettre en avant la réaction de l’Europe face aux crises. « Il y aura les pros européens. Ceux qui pensent que l’Europe est la bonne échelle pour gérer notre place dans le monde et la réalité géostratégique dans laquelle on s’inscrit, ceux qui pensent qu’avec l’Europe, on est plus fort pour se défendre, notamment d’une agression de la Russie contre l’Ukraine, qu’on est plus fort sur les marchés internationaux, en imposant des clauses de réciprocité, ou qu’on est plus fort pour soigner la population quand on est 450 millions pour commander un vaccin », illustre Fabienne Kanner, eurodéputée et secrétaire générale déléguée de Renaissance.
« Il y a une prise de conscience, qui est plus grande qu’avant. On n’a jamais eu autant besoin d’Europe aujourd’hui », soutient François Patriat
Pour le sénateur François Patriat, à la tête du groupe RDPI (Renaissance) du Sénat, il y a un piège à éviter. « Il ne faut surtout pas que le scrutin devienne « pour » ou « contre » Macron. C’est ce que vont essayer de faire nos oppositions habituelles, dans leurs bassesses habituelles », soutient le sénateur de la Côte-d’Or. Alors qu’on imagine que le scrutin n’intéresse pas ou peu les Français, François Patriat sent au contraire qu’« il y a une prise de conscience, qui est plus grande qu’avant. On n’a jamais eu autant besoin d’Europe aujourd’hui. Avant, tout le monde s’en fichait. Aujourd’hui, avec la guerre, l’immigration, les gens voient bien qu’il y a un besoin, que ce soit pour la recherche, la reconquête de la souveraineté des pays et l’environnement. Ça passe par l’Europe ».
Autre enjeu important, aux yeux du patron des sénateurs macronistes : le rassemblement. « Je souhaite que l’unité dont a fait preuve la majorité présidentielle la dernière fois, soit maintenue voire renforcée. Il ne faut pas qu’on ait des chicayas. Il faut sur la même liste Horizons, le Modem, nous, les Radicaux, tout le monde. Il faut l’unité et la discipline », demande François Patriat. Et donc éviter les menaces de liste autonome. Et s’il devrait bien y avoir, à un moment où un autre, une guerre pour les places, il faudra éviter les balles perdues.
L’UDI rejoindra-t-il Renaissance pour les européennes ?
Si l’union se fait, jusqu’où peut-elle aller ? Est-il possible de voir l’UDI, dont on connaît la fibre européenne, rejoindre Renaissance pour le scrutin du 9 juin ? « Ce n’est pas impossible. Ce n’est pas exclu que l’UDI fasse partie de la liste d’union. Mais ça ne veut pas dire que ça se fera, ou que ça ne se fera pas », avance un membre de Renaissance, qui estime que « la ligne de droite pro européenne est chez nous ».
Comprendre, pas chez LR et l’eurodéputé François-Xavier Bellamy en particulier. Pour l’heure, du côté du parti d’Eric Ciotti, la tête de liste n’est pas désignée. Le nom de François Xavier Bellamy, qui avait mené la liste en 2019, est bien sûr évoqué. Mais d’autres noms circulent. Le choix ne sera pas neutre et pourrait influer sur la décision de l’UDI.
« La construction européenne est un sujet qui est important chez nous, et évidemment, ça guidera beaucoup les décisions », affirme Hervé Marseille
Du côté du parti centriste, on n’en est pas là. C’est step by step. « Tout ça est très loin », tempère le président de l’UDI, Hervé Marseille. Le sénateur, qui préside aussi le groupe Union centriste du Sénat, est à ce titre l’allié du groupe LR au sein de la majorité sénatoriale. Le choix de son parti sera en conséquence regardé de près. Mais son groupe comporte aussi une bonne partie de pro Macron.
« Ce qui nous guidera, ce sera le projet et les idées développées par les uns et les autres. Et notre projet est européen. La construction et l’intégration européenne est un sujet qui est important chez nous, et évidemment, ça guidera beaucoup les décisions qu’on sera amené à prendre », explique pour l’heure Hervé Marseille à publicsenat.fr. Il y a 4 ans, Jean-Christophe Lagarde, alors président de l’UDI, avait décidé de présenter sa liste. La ligne Bellamy était trop éloignée de celle des centristes. Mais pas sûr que l’UDI ait envie de recommencer l’aventure en solo, quand on se rappelle que la liste Lagarde n’avait pas vraiment été couronnée d’un franc succès, en terminant à 2,5 %, soit aucun élu à la clef.
Stéphane Séjourné toujours en « réflexion »
Pour Renaissance et la majorité présidentielle, reste une question de taille à trancher : qui mènera la liste ? La logique voudrait que Stéphane Séjourné le fasse. Encore faut-il se décider. Ce qui semble ne faire guère de doute, c’est qu’il souhaite retourner au Parlement européen. Autrement dit être sur la liste. Et en prendre la tête ? « La réflexion continue », dit-on du côté de Renaissance, où on assure qu’« il y a une vraie motivation ». Il devrait prendre, quoi qu’il en soit, « une grande part » dans la campagne. Pour Fabienne Keller, il serait la meilleure option. « La tête de liste naturelle, c’est Stéphane Séjourné. Il est patron du groupe Renew, donc de 103 eurodéputés, et il travaille d’arrache-pied pour faciliter l’émergence de partis nationaux Renew. Je vois qu’il est complètement dévoué à sa tâche », salue l’eurodéputée.
Pour compliquer la décision, il faut avoir en tête que l’équation est à multiples inconnues. « Ce que tout le monde oublie, c’est que c’est une décision collective. Certes, avec le président de la République, mais aussi le président d’Horizons et celui du Modem, car c’est une liste d’alliance », décrypte un observateur. « Ça dépend aussi des objectifs collectifs, comme la présidence de la commission, les commissaires. Il y a un effet domino qui peut impacter le choix des listes sur les « top jobs » des institutions européennes. Et ça, on n’y verra pas plus clair avant janvier », explique ce connaisseur. Il faudra en effet attendre le début d’année pour débroussailler les choses. Autre critère : les visages des listes concurrentes. « Les stratégies à droite ou à gauche peuvent avoir peut-être un impact sur la tête de liste », explique-t-on.
« Pascal Canfin incarne quelque chose sur la transition écologique » et est « plus politique », glisse un ministre
Et si Stéphane Séjourné n’y va pas ? Là, du monde se bouscule au portillon européen. Plusieurs noms circulent, comme le commissaire européen Thierry Breton, l’eurodéputé Renaissance Pascal Canfin, qui dit au Figaro vouloir « porter notre bilan et notre projet ». « Il a le goût de la première ligne », dit de lui un responsable macroniste. L’ancien d’Europe Ecologie Les Verts cite aussi lui-même, comme prétendants possibles, la secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, Laurence Boone, le ministre des Transports, Clément Beaune ou l’ex-ministre Amélie de Montchalin.
Le choix du candidat aura aussi un impact sur le message envoyé, selon à qui on s’adresse, si on veut aller chercher des voix davantage à droite, ou à gauche. Un ministre distribue ainsi les points :
Selon le même membre du gouvernement, « Pascal Canfin incarne quelque chose sur l’enjeu de la transition écologique », avec « une approche plus politique, et moins de contrainte qu’un commissaire européen, qui est plus dans une position transnationale, avec un exécutif européen ». Mais Thierry Breton a pour lui « sa position face au Gafam, c’est intéressant aussi ». « Bien sûr, il y aura une forme de coloration, de nuance, dans le choix de la tête de liste. Mais il ne faut pas sous-estimer l’aspect bloc de la majorité », nuance un conseiller.
« Emmanuel Macron a le respect de l’appétit »
Tout passera évidemment par Emmanuel Macron. « Stéphane Séjourné va décider, lui en premier chef, et avec le Président, auquel il est très attaché », dit Fabienne Keller. « Bien sûr le Président aura un mot final, mais c’est une conversation », dit un autre. « C’est difficilement envisageable que sur la question de l’Europe, qui est au cœur de son engagement, qu’il se désintéresse », reconnaît un ministre.
Toujours selon ce membre du gouvernement, ce qui comptera aussi, aux yeux du chef de l’Etat, c’est l’envie d’avoir envie, au fond. « Il regardera qui a envie, et qui est en capacité de prendre l’espace. Il a le respect de l’appétit ». Qu’est-ce qu’on mange à Bruxelles ?
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