Divisions à droite sur la loi immigration : les sénateurs LR demandent aux députés « de lire le texte »

En ce jour de vote solennel au Sénat sur la loi immigration, l’unité affichée des Républicains depuis des mois, sur ce texte, se fissure. Le député LR, Aurélien Pradié estime que le texte remanié et durci par la droite sénatoriale n’est finalement qu’une « reculade ». « Dans ce texte, nous avons fait passer les marqueurs de la droite », répond le président du groupe LR de la Haute assemblée, Bruno Retailleau.
Simon Barbarit

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On retrouve comme un parfum de division au sein des Républicains en ce jour de vote solennel du projet de loi immigration. Comme lors de la réforme des retraites, certains députés LR, Aurélien Pradié en tête, font de nouveau part de leur opposition à un texte sorti du Sénat. Et ce, même si les sénateurs LR ont clamé leur « victoire » après avoir profondément remanié le texte du gouvernement. Suppression de l’aide médicale d’Etat, limitation du regroupement familial, durcissement des conditions de régularisation dans les métiers en tension, facilitation des expulsions… « Dans ce texte, nous avons fait passer les marqueurs de la droite. Jamais la droite n’a voté tout ce que nous avons voté au Sénat. Ce n’est clairement plus le texte de Gérald Darmanin, c’est bien le texte de la majorité sénatoriale », a vanté le président du groupe LR, Bruno Retailleau.

« Reculade »

Pourtant, invité de franceinfo, le député du Lot, Aurélien Pradié refuse de parler de « victoire » mais de ce qu’il qualifie de « reculade ». « Les Républicains avaient fixé deux lignes rouges. Ce n’est pas moi qui les fixées, c’est notamment Bruno Retailleau. La première c’est que nous n’avions pas la possibilité d’avancer si nous ne réformions pas la Constitution. […] Cette nécessité n’a pas été obtenue. Deuxième chose, nous avions dit qu’il n’était pas question que sur les secteurs en tension, nous ayons un droit quasi automatique à la régularisation. Il a été supprimé et remplacé par un autre article », a-t-il dénoncé.

La première critique fait référence à la proposition de loi constitutionnelle déposée par Les Républicains. Elle prévoit que les Français puissent se prononcer par référendum sur « les questions relatives à l’entrée et au séjour des étrangers en France ainsi que le droit de la nationalité ». « Mais on ne peut pas faire de référendum sans réviser la Constitution et le texte n’arrivera au Parlement qu’en décembre », rappelle le sénateur LR, Roger Karoutchi avant lui aussi, d’encourager les députés LR à voter d’abord le projet de loi ordinaire remanié par le Sénat.

Le président du parti, Éric Ciotti et Olivier Marleix, le président du groupe à l’Assemblée, sont, eux aussi, arc-boutés sur la révision de la Constitution sans laquelle « rien ne sera possible » et sont moins allants que leurs collègues sénateurs à trouver un compromis avec le gouvernement.

En ce qui concerne la régularisation des sans-papiers dans les métiers en tension, le fameux article 3, il a été transformé par la majorité sénatoriale en article 4 bis. Pour avoir le soutien des centristes avec qui ils forment la majorité au Sénat, et ainsi pouvoir adopter un texte sur l’immigration, les Républicains ont consenti à conserver un volet régularisation dans le texte mais au cas par cas et de façon exceptionnelle. Le pouvoir décisionnaire reste à la main des préfets qui devront notamment vérifier si l’étranger respecte les valeurs de la République et qu’il n’a pas fait l’objet de condamnation (voir notre article).

« Ils n’ont pas très bien lu notre texte »

Cet accord politique dont se sont félicités dans l’hémicycle, le gouvernement, les centristes et les Républicains n’a pas été apprécié du côté d’Aurélien Pradié. « Le texte qui en sort n’est finalement pas celui des Républicains, c’est celui des centristes », a-t-il tancé dans la Tribune du Dimanche. « Soyons clairs : le tripatouillage de l’article 3 ne rend pas le texte acceptable », a indiqué sur X, le député LR Pierre-Henri Dumont. Ce proche d’Aurélien Pradié brandit même la menace d’une motion de censure si une révision constitutionnelle n’était pas engagée par l’exécutif.

« Ils n’ont pas très bien lu notre texte. Il n’y a rien de commun entre l’ancien article 3 et notre article. D’abord parce que ce n’est plus un droit opposable (à la régularisation) et on durcit même les conditions de la circulaire Valls. On a aussi un dispositif antifraude », a répondu sobrement Bruno Retailleau qu’on a connu plus virulent à l’égard d’Aurélien Pradié.

Ce mardi, Laurent Wauquiez était présent à la réunion de groupe des députés LR. Et selon une journaliste de Politico, le potentiel candidat de la droite à la prochaine présidentielle a joué l’apaisement avec le Sénat. « La seule question c’est : veut-on poursuivre l’en même temps ou assumer un tournant clair ? Le Sénat a fait passer un tournant clair à ce texte », a-t-il déclaré.

« Quand les députés vont rentrer dans l’examen du texte, article par article, ils s’en rendront compte », veut croire également le sénateur LR, Philippe Bas.

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