Déficit public : « La devise d’Emmanuel Macron c’est : je dépense, donc je suis », tacle Bruno Retailleau
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L’horizon économique de la France s’assombrit. Tandis que le gouvernement s’agite pour tailler dans le budget des différents ministères et trouver 20 milliards d’économie dans le budget 2025, la Cour des comptes estime à 50 milliards d’euros sur 3 ans les économies nécessaires pour tenir les objectifs de la France en matière de déficit public. Mi-mars, les magistrats financiers ont d’ailleurs enjoint le gouvernement à faire « des efforts considérables », le rappelant à son devoir de rigueur. Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a d’ailleurs considérablement durci son discours en quelques semaines. « Nous devons remplacer l’État-providence par l’État protecteur », a-t-il lancé dans le JDD dimanche, après avoir indiqué que le déficit budgétaire de la France déraperait « significativement au-delà des 4,9 % », en raison de rentrées fiscales moins importantes.
Un budget « truqué » ?
C’est dans ce contexte qu’Emmanuel Macron doit recevoir, mardi soir à l’Elysée, les chefs de partis et présidents de groupe de la majorité, justement pour parler du budget. « Emmanuel Macron est à l’aise dans les mises en scène. Il va réunir sa majorité sur la question de la dette. Mais qui dépense depuis 7 ans ? Qui est à l’origine de plus de 800 milliards d’augmentation de la dette ? », s’insurge Bruno Retailleau, chef de file des sénateurs LR, qui considère que l’argument de la dette covid-19 ne tient pas : « Les rapports de la Cour des comptes nous disent qu’il y a moins d’un tiers de cet endettement depuis 2017 qui est consacré à la crise du covid-19 ». Pour l’élu de Vendée, Emmanuel Macron mène depuis le début de son premier quinquennat une « politique du chèque ». « La devise d’Emmanuel Macron, c’est : je dépense donc je suis », ironise le sénateur. Les Républicains du Sénat ont particulièrement mal digéré la dernière discussion budgétaire, lorsque le gouvernement, qui tablait à l’époque sur une croissance à 1,4 %, avait ignoré les propositions de la droite qui souhaitait effectuer 7 milliards d’euros d’économies supplémentaires. Bruno Retailleau en veut particulièrement à Bruno Le Maire : « Qu’est-ce qu’il en a fait ? Rien ! Zéro », se désole le sénateur, qui se targue de constituer une opposition responsable, alors qu’ils « auraient tout à fait pu se laver les mains » de la question du budget et « laisser le gouvernement se débrouiller ». Bruno Retailleau assure avoir prévenu le ministre de l’Economie que son budget était « truqué », et « pas sincère », accusant Bercy de « savoir pertinemment que la croissance en 2024 ne serait pas de 1,4 % ». « Cela les arrangeait d’avoir des hypothèses macroéconomiques valorisantes pour faire passer leur budget », s’insurge le sénateur LR, persuadé que le ministère était conscient de son erreur : « Si nous, on savait, bien entendu qu’ils savaient ».
La menace d’une censure
Pour le chef de file des sénateurs LR, la situation est désormais calamiteuse. La dépense publique est devenue selon lui un tel fardeau que « plus on dépense, moins on a de croissance». On n’est plus sur un multiplicateur budgétaire, mais sur un diviseur budgétaire ». Bien sûr, pour Bruno Retailleau, les économies dans le budget annoncées par le gouvernement sont nécessaires. Mais elles interviennent « trop tard ». « On va s’y prendre de la plus mauvaise façon, en faisant des coupes un peu aveugles », déplore le sénateur, pour qui la vraie question est l’efficacité de la dépense publique ». « Ça ne se fait pas en claquant des doigts », regrette, amer, Bruno Retailleau qui reproche au gouvernement de naviguer à vue depuis plusieurs années en matière de budget. « La dépense publique n’est pas mauvaise en soi. Elle est mauvaise quand elle permet au système de santé d’aller de moins en moins bien, quand l’école s’effondre, quand on n’a de moins en moins de sécurité en France », précise le sénateur de Vendée. Surtout, le déficit public chronique de la France lui fait craindre la perspective du déclassement pour le pays. « On est désormais avant-dernier ou dernier en Europe, que ce soit sur le déficit public ou le déficit commercial », note-t-il, arguant qu’une « nation qui ne tient pas ses comptes ne peut pas tenir son rang, sur le plan européen, comme sur le plan international ». Face aux désaccords persistants entre Les Républicains et la majorité présidentielle sur les questions de budget, les dirigeants LR n’excluent pas une motion de censure. « Tout est ouvert. C’est une arme que nous donne la Constitution et c’est une arme que nous devrions utiliser », argue Bruno Retailleau, malgré la bonne volonté et les déclarations d’intention affichées par le ministre de l’Economie. « Il y a les mots, et il y a les actes. C’est très différent », balaye le sénateur.
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