Décentralisation : « Emmanuel Macron veut être le chef d’orchestre dans l’organisation de la République », analyse Jean-François Husson

Décentralisation : « Emmanuel Macron veut être le chef d’orchestre dans l’organisation de la République », analyse Jean-François Husson

Emmanuel Macron consulte, aujourd’hui, les représentants des associations d’élus locaux afin de les sonder sur la décentralisation et une éventuelle réforme des institutions.
Henri Clavier

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Réforme des institutions ? Nouvelle étape de la décentralisation ? Difficile à dire pour l’instant tant ces sujets reviennent régulièrement à l’agenda sans nécessairement connaître une conclusion. Pourtant, une refonte des institutions est évoquée dans les rangs de la majorité pour tourner la page de la réforme des retraites. Dans un entretien au Figaro, Stéphane Séjourné, secrétaire général de Renaissance, évoque la possibilité de revenir sur les « grandes régions », nées de la loi NOTRe en 2015.

Depuis plusieurs semaines, le président de la République consulte les anciens chefs d’Etat comme les présidents des deux chambres (Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher). Aujourd’hui, Emmanuel Macron s’entretenait avec les représentants de Régions de France, de Départements de France ou encore de l’Association des maires ruraux de France. David Lisnard, président de l’Association des Maires de France n’a pas pu répondre favorablement à l’invitation de l’Elysée. L’exécutif n’a pas accepté qu’il soit représenté par un vice-président. Le contenu reste, néanmoins, incertain et les propositions évoquées, très hétéroclites, pourraient ne pas être intégrées dans le même texte.

La méthode au centre des critiques

« Il faut maintenant que le président précise le champ de sa pensée. Il faut qu’on poursuive une décentralisation, comme prônée par la Cour de Comptes », affirme Françoise Gatel, sénatrice Union Centriste d’Ille-et-Vilaine et présidente de la délégation sénatoriale à la décentralisation et aux collectivités territoriales. Le dernier rapport de la Cour des comptes prône une simplification des normes applicables aux collectivités territoriales, un facteur d’efficacité de la dépense publique.

Surtout, les élus plaident en faveur de la concertation et de l’identification des besoins locaux et redoutent les effets d’annonce. « Il y a un vrai problème de communication avec le chef de l’Etat », observe Jean-François Husson, sénateur Les Républicains de Meurthe-et-Moselle et membre du groupe de réflexion sénatorial sur la décentralisation, créé début octobre à l’initiative du président du Sénat, Gérard Larcher. « J’ai le sentiment qu’Emmanuel Macron, fort de sa réélection, veut donner le tempo et être le chef d’orchestre dans l’organisation de la République », ajoute Jean-François Husson. On redoute donc particulièrement les effets d’annonce et la volonté d’amener un nouveau sujet politique important après la réforme des retraites. Une réforme à « contretemps », surtout « quand on sort d’une séquence qui secoue l’opinion publique », souligne le sénateur LR.

« On a eu beaucoup de « chamboule-tout » territorial, mais il faut surtout évaluer, réaliser des études d’impact », martèle Françoise Gatel. De manière générale, la méthode retenue par le chef de l’Etat invite à la prudence. Si l’amélioration du fonctionnement administratif de la France est une nécessité, « les propositions doivent ressortir d’un état des lieux, pour pouvoir mener un travail de fond », juge Jean-François Husson (LR). Or, les positions de l’exécutif restent vagues, même si, selon Françoise Gatel, « il est heureux que le président renoue le fil de la conversation ».

Les « grandes régions » redécoupées ?

Principale piste évoquée, le redécoupage des « grandes régions » peine à convaincre. Un éventuel redécoupage des régions doit répondre à un véritable besoin et nécessite une évaluation de la pertinence en amont. La cohérence des « grandes régions » a notamment été remise en question par la création de la Collectivité européenne d’Alsace, une entité administrative aux compétences élargies résultant de la fusion entre le Haut-Rhin et le Bas-Rhin.

« Il faut tirer les leçons de ses erreurs. François Hollande avait fait, en 2015, un atelier collage et découpage qui devait faire économiser 15 milliards d’euros ! », regrette Françoise Gatel. En réalité, la réforme n’a pas dégagé la manne financière espérée. Carole Delga, présidente de la région Occitanie et de Régions de France, a fait savoir son opposition à tout nouveau découpage. Une refonte de certains territoires pourrait tout de même représenter une solution dans certaines situations mais tout l’enjeu est de savoir « comment est-ce qu’on va recomposer ? » s’interroge Françoise Gatel. La sénatrice centriste d’Ille-et-Vilaine s’est montrée ouverte à la réflexion sur la question de l’intégration de la Loire-Atlantique à la région Bretagne, tout en rappelant que cela nécessitait une étude d’impact sur les conséquences pour les régions Bretagne et Pays de la Loire.

Une différenciation « sans rupture avec l’unicité de la République » est possible

Au cœur des réflexions sénatoriales, la différenciation pourrait être un élément clé d’une nouvelle réforme de l’organisation territoriale. La différenciation permettrait une meilleure adaptation du droit aux réalités locales, « sans rupture avec l’unicité de la République », affirme Françoise Gatel. A certains égards, la différenciation existe déjà, que cela soit en Polynésie Française ou dans les Outre-Mer, mais « on n’ose pas afficher le principe », estime Françoise Gatel. « Aux élections régionales, beaucoup voulaient une assemblée unique de Bretagne », rappelle Françoise Gatel, ouverte à la réflexion sur le sujet. Pour ses défenseurs, la différenciation permettrait au droit de s’adapter aux « réalités locales », et présenterait une dimension de simplification du droit.

A l’inverse, pour Jean-François Husson, si « la différenciation est une étape supplémentaire de la décentralisation », elle est aujourd’hui mise en avant parce que « nous n’arrivons plus à faire nation, donc on insiste sur la diversité des situations ». Ce dernier souhaite surtout que l’on commence par avoir une « vision claire et stratégique de l’aménagement des territoires et des politiques publiques que l’on y développe » , avant de s’interroger sur la différenciation.

 

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