Consultations politiques : le débat autour de la réforme des retraites reprend du service

Consultations politiques : le débat autour de la réforme des retraites reprend du service

François Bayrou considère que la réforme des retraites peut être « améliorée ». Une façon d’envoyer des signaux à gauche. Mais difficile de toucher aux grands principes de la réforme, au risque de heurter au sein même de la macronie et de la droite.
Guillaume Jacquot

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La dernière législature a été marquée au fer rouge de la réforme des retraites, la nouvelle va faire ses premiers pas avec son fantôme. Comme le sparadrap du capitaine Haddock, cette loi contre laquelle de nombreux Français ont défilé au début de l’année 2023, n’a jamais disparu du débat public. La teneur de la campagne des oppositions durant les législatives anticipées de juin dernier en atteste. Sous la bannière du Nouveau Front populaire, la gauche en a fait l’un de ses principaux axes programmatiques, en demandant le retour aux 60 ans.

Avec le pouvoir d’achat, cette thématique devrait aussi s’imposer comme l’un des sujets chauds de la rentrée sociale. L’abrogation du report de l’âge légal à 64 ans fait partie des mots d’ordre pour la journée de mobilisation syndicale du 1er octobre, à l’appel notamment de la CGT. Le Rassemblement national a annoncé aussi dès juillet qu’il profiterait de son espace réservé du 31 octobre pour mettre à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale une proposition de loi d’abrogation.

François Bayrou veut poser le sujet « de manière renouvelée »

À l’heure où l’Élysée se met en quête d’une coalition suffisamment large pour résister dans la durée au palais Bourbon, plusieurs interlocuteurs d’Emmanuel Macron ont posé le sujet sur la table. Le chef de file du Modem, François Bayrou, a fait savoir que la réforme était « améliorable », mardi sur France Info. « Il y a une question qu’on peut poser de manière renouvelée, c’est la question des retraites. Les Français doivent être plus associés », a-t-il plaidé, en faisant référence à un nouveau travail avec les partenaires sociaux, sans se montrer plus précis sur ce qui pourrait être modifié. Ce n’est pas la première fois que l’élu béarnais critique la façon dont la réforme a été gérée. Une question « mal posée », selon lui. Son intervention dans le contexte actuel n’est toutefois pas dénuée d’arrière-pensées, puisque le « bloc central » cherche de nouveaux appuis, y compris dans la gauche sociale-démocrate.

Il n’est d’ailleurs pas le seul au sein des partenaires de Renaissance à souffler l’idée d’une évolution. Une façon de donner des gages en direction de la gauche. Selon l’Opinion, le président de l’UDI et patron du groupe Union centriste au Sénat, Hervé Marseille, en aurait également touché un mot au chef de l’État. « C’est du pragmatisme. La retraite, c’est le symbole absolu », a-t-il expliqué.

« Ouvrir la boîte de Pandore me paraît dangereux », prévient François Patriat

En l’absence d’éléments clairs sur les éventuelles concessions ou améliorations, le sujet a de quoi crisper dans les rangs de l’ancienne majorité présidentielle, où certains n’ont pas envie de toucher à cet héritage du début du quinquennat, payé chèrement politiquement. « Ouvrir la boîte de Pandore me paraît dangereux, c’est s’ouvrir à des discussions sans fin. S’il y a un accord trouvé avec la gauche, il faut sortir la question de la réforme des retraites », avise François Patriat, le président des marcheurs au Sénat (groupe RDPI). « Si on continue à faire des alternances stériles, c’est-à-dire défaire ce que la précédente majorité a fait, ça sert à quoi ? »

Pour le sénateur de la Côte-d’Or, pas question donc de revenir sur les grands principes, comme l’âge légal à 64 ans. En revanche, il serait « d’accord », « s’il s’agit de parler des carrières longues ou de l’emploi des seniors ». Ce dernier sujet est d’ailleurs resté en suspens, après la censure de l’index senior et du CDI senior par le Conseil constitutionnel.

Les paramètres de l’âge constituent également une ligne rouge au sein de la majorité sénatoriale de droite et du centre. « M. Bayrou doit avoir l’argent, ou comme d’habitude, veut encore exister », raille une sénatrice LR. « J’entends bien que la réforme des retraites est un point important du côté des sociaux-démocrates, des socialistes, qui pourraient prendre part à un éventuel gouvernement. De là à tout remettre en cause, c’est assez improbable, et inconséquent sur le plan budgétaire », prévient Élisabeth Doineau (UDI), rapporteure générale du budget de la Sécurité sociale, sensible au déficit de l’assurance vieillesse.

Elle juge néanmoins la niche parlementaire RN du 31 octobre « préoccupante ». « La méthode sur le dossier des retraites a été très mauvaise, conflictuelle. Le gouvernement doit en tirer des enseignements », demande la sénatrice de la Mayenne. Cette figure de la commission des affaires sociales du Sénat note toutefois qu’il est « problématique » que les questions liées à l’emploi des seniors restent en attente de réponse. « C’est le sujet qu’il faut réaborder à la rentrée, en essayant de trouver une autre méthode. » L’équilibre pourrait être difficile à trouver sur le sujet des retraites, par le prisme des fins de carrière.

Et si d’aventure la Macronie parvenait à convaincre quelques parlementaires de gauche, les parlementaires de la droite républicaine rappellent à l’envi leur impératif : un « arrêt de la dégradation des comptes publics ».

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