Paris : LFI Elections europeenes

« Ça ne sera pas un énième cénacle de technocrates » : La France Insoumise va créer un nouveau parti au Parlement européen 

Une nouvelle formation de gauche européenne va se former d'ici quelques semaines. Pour s'émanciper des communistes au sein du Parti de la gauche européenne (PGE), Manon Aubry et La France Insoumise (LFI) travaillent à la création d'une nouvelle structure à l'intérieur du groupe The Left. Pour la fonder, ils s'appuient sur une alliance déjà formée avec les mouvements de gauches radicales espagnols, finlandais, danois ou suédois.
Quentin Gérard

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Manon Aubry y travaille déjà depuis plusieurs mois. Ce projet que Jean-Luc Mélenchon envisage depuis plus de quinze ans lui a été confié avant les élections européennes où elle a récolté près de 10 % des voix en tant que tête de liste La France Insoumise. D’ici peu, The Left, le groupe le plus à gauche du Parlement européen et déjà présidé par l’ancienne porte-parole de l’ONG Oxfam, va compter un nouveau membre. Si son nom est choisi, il reste encore secret. Son objectif, lui, est bien clair : « Restructurer la gauche, notamment dans sa lutte contre l’extrême droite qui n’a jamais été aussi forte », indique l’insoumise.

Une trentaine de députés

Pour le créer, elle s’appuie sur un mouvement déjà existant : Maintenant le peuple !. Une alliance fondée en 2018 par plusieurs partis en vue des élections européennes de 2019. Il est composé des membres de la France Insoumise, mais aussi du groupe espagnol Podemos, l’Alliance Rouge et verte danoise, l’Alliance de gauche finlandaise, le Bloc de gauche portugais ou encore le Parti de gauche suédois. Toutes ses organisations vont rejoindre le nouveau parti de LFI. Ce qui fait « une trentaine de députés » selon Manon Aubry qui espère attirer « toutes les formations bien en place dans leur pays et qui partagent nos valeurs ». Lewica Razem, un mouvement polonais qui a de l’écho dans la jeunesse pourrait notamment franchir le pas.

Le but est d’élaborer une structure au-delà du cadre des simples institutions européennes. « Ce ne sera pas un énième cénacle de technocrates, ni une agence de voyages pour ceux qui n’ont plus de mandats », lance Manon Aubry. Ce parti aura des synergies avec les élus nationaux dans les différents pays. Il sera « tourné vers l’action ». Notamment avec la création d’un « observatoire de l’extrême droite en Europe ». Combien de temps avant son lancement ? « Quelques semaines, voire quelques mois », assure la proche de Jean-Luc Mélenchon. Les démarches administratives seraient très lourdes.

Peu de conséquences au Parlement européen

Pour Francisco Roa Bastos, maître de conférences en Sciences politiques à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, la création de ce nouveau parti n’est pas un chamboulement. « Il faut distinguer deux organisations au sein du Parlement. Le groupe politique, en l’occurrence The Left et le parti au sein de ce groupe que va créer La France Insoumise », explique-t-il. Les partis ou « euro-partis » ne sont pas très connus. Aucune révolution en vue donc à Strasbourg, siège du Parlement européen. Les troupes mélenchonistes vont quand même bénéficier de plusieurs avantages. « Ils auront une plus grande influence, des financements, ils se détachent des communistes et vont créer des liens avec d’autres forces européennes », détaille le spécialiste des partis politiques en Europe.

La France Insoumise avait peu de marges de manœuvre au sein du Parti de la gauche européenne qu’elle n’a jamais totalement intégrée. Créée en 2004, c’est la principale formation politique du groupe The Left. Ils y critiquent la mainmise des partis communistes européens. On y retrouve les mêmes différends stratégiques qu’avec le PCF dans l’hexagone. « LFI et ses alliés veulent paraître en rupture avec la tradition communiste, insistent sur le populisme de gauche, ont une fibre écologique plus forte et comptent un électorat plus jeune », souligne Francisco Roa Bastos.

« De la politique politicienne » pour Léon Deffontaines

Pour Léon Deffontaines, ancienne tête de liste du PCF aux élections européennes, ce départ relève de la politique politicienne. « C’est fort de café de la part de Manon Aubry. Pendant toute la campagne des européennes, elle appelait à l’union de la gauche en disant que nous avions peu de différences », se désole-t-il. Le porte-parole du Parti communiste français trouve dommage que le PGE soit caricaturé : « Les communistes européens n’ont pas une emprise sur ce parti ».

Même déception pour Hélène Bidard, candidate communiste aux européennes et membre du secrétariat politique du Parti de la gauche européenne. « Nous avons une réunion du PGE à Budapest le 8 novembre. Les invitations seront envoyées à LFI » lance-t-elle comme une volonté de réunification. Réponse de Manon Aubry ? « Le Parti de la gauche européenne s’est marginalisé. Sa voix ne porte plus ». Et de conclure : « Avec tout le respect que j’ai pour le Parti communiste français, ils n’ont plus de représentants politiques au Parlement, ni le parti communiste espagnol d’ailleurs. Notre objectif est de créer un renouveau ».

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