Budget de la Sécu 2024 : ce que contient le projet de loi
Par Hugo Ruaud
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C’est l’un des traditionnels dossiers de la rentrée. Comme chaque année en septembre, le projet de loi de financement de la sécurité social vient d’être présenté en Conseil des ministres, avant d’être transmis – au plus tard d’ici le 15 octobre, à l’Assemblée nationale et d’entamer la navette parlementaire. Les enjeux économiques, sociaux, et financiers sont énormes, puisque les prestations versées par la sécurité sociale représentent plus ou moins 25 % du PIB, soit davantage que le budget de l’Etat.
Mais cet exercice budgétaire, qui vise à maîtriser les dépenses sociales et de santé, est particulièrement scruté cette année : car depuis des mois, les dépenses de santé sont dans le viseur du gouvernement, entre la hausse annoncée de la franchise sur les médicaments, la chasse aux arrêts maladies, ou encore l’évolution du remboursement des soins dentaires.
Hausse de l’Ondam et des salaires
Pourtant, mercredi 27 septembre, après le Conseil des Ministres, le ministre de la Santé Aurélien Rousseau a annoncé « une augmentation de ce que la nation consent pour son système de santé et de protection sociale », avec 640 milliards d’euros de dépenses, avant de préciser que le PLFSS prévoit « 3,5 milliards d’économie par rapport au tendanciel ». Comprendre : les dépenses sont à nouveau en hausse, mais une hausse moins forte de 3,5 milliards que ce que la tendance aurait pu prévoir.
Du côté des hausses de dépenses, le ministre de la Santé a insisté sur deux volets : la revalorisation du salaire des soignants, et l’augmentation de l’objectif national de dépense d’assurance maladie (Ondam), à 3,2 % – un « niveau supérieur à l’inflation » s’est félicité le ministre de la Santé. L’an dernier, cependant, l’Ondam avait été augmenté de 3,7 %. Concernant la rémunération des soignants, Aurélien Rousseau présente la mesure comme une réponse « aux évolutions » de la société, où les faibles salaires du monde médical sont « de moins en moins acceptables et acceptées ». Dans ce budget de la Sécu, 3,3 milliards d’euros sont consacrés à cette hausse de salaire.
Mais en face de ces augmentations de dépenses, le ministre de la Santé a dû trouver des économies : « C’est le cas sur les indemnités journalières, sur les médicaments, sur certains pans de l’activité hospitalière », a précisé Aurélien Rousseau, évoquant une trajectoire « responsable ». Le gouvernement vise une économie de 3,5 milliards d’euros sur les dépenses de l’Assurance maladie, dont 1,3 milliard sur les produits de santé (essentiellement des baisses de prix des médicaments), 240 millions sur les soins de ville (en particulier les labos d’analyse) et 1,25 milliard lié à la « responsabilisation » des professionnels et patients.
Des leviers d’économies à peaufiner
Lancée en juin par le gouvernement, la perspective de doubler la franchise de 50 centimes d’euros sur les boîtes de médicaments et de 1 euro sur les consultations fait toujours débat, d’autant plus dans un contexte d’inflation. Mais la mesure ne figure pas dans le PLFSS présenté mercredi : « Cela fait partie des sujets » sur lesquels le ministre doit encore travailler, avec « une exigence », précise-t-il : que les personnes ayant besoin d’avoir un accès à des médicaments pour des maladies de longues durées « ne soient pas pénalisées ». « Il faut sortir le médicament de l’idée que ce serait un bien de consommation comme un autre », a toutefois déclaré Aurélien Rousseau à la sortie du conseil des Ministres. Pour lutter contre l’explosion des dépenses liées aux arrêts maladie, en hausse de 7,7 % d’après le Ministre, le gouvernement renforce les pouvoirs de contrôle de l’assurance maladie et des entreprises. Le médecin contrôleur mandaté par l’employeur –médecins agréés– pourra suspendre le versement des indemnités aux patients lorsqu’il estime l’arrêt injustifié, avec une possibilité de recours de l’assuré. Le texte limite aussi à trois jours la durée des arrêts prescrits par téléconsultation (sauf exceptions, notamment pour le médecin traitant). Cependant, comme sur le sujet des médicaments, l’ancien directeur de cabinet d’Élisabeth Borne a choisi d’écarter pour l’instant les mesures concernant les indemnités journalières : « On a considéré qu’on n’était pas assez avancés » sur le sujet, a précisé le Ministre, qui a cependant confirmé que le sujet serait prochainement sur la table.
En parallèle, le gouvernement profite de ce PLFSS pour entériner des promesses de campagne d’Emmanuel Macron, ou des annonces déjà faites au cours des derniers mois, comme le financement de campagnes de vaccination contre le papillomavirus au collège, la prise en charge des préservatifs pour les moins de 26 ans, ou encore le remboursement de protections menstruelles pour les publics jeunes et précaires.
Au bilan, le déficit de la Sécurité sociale est plus important que prévu dans la dernière loi de financement en avril : il est estimé à 8,8 milliards d’euros en 2023, puis 11,2 milliards en 2024. Les comptes sont notamment plombés par la hausse des dépenses de l’Assurance maladie. Par ailleurs, les dépenses de santé risquent en 2024 de « s’avérer plus élevées que prévu », estime dans un avis le Haut conseil des finances publiques, qui juge optimistes certaines prévisions de dépenses et d’économies. Si la loi de financement de la Sécurité Sociale (LFSS) détermine les conditions nécessaires à l’équilibre budgétaire de la Sécurité sociale, elle fixe seulement les objectifs de dépenses en fonction des prévisions de recettes, et n’a pas de portée budgétaire contraignante.
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