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Au Sénat, une proposition de loi pour reconnaître et réparer les personnes condamnées pour homosexualité

Une proposition de loi du sénateur socialiste Hussein Bourgi vise à reconnaître les politiques de criminalisation de de l’homosexualité en France entre 1942 et 1982. Le texte propose également de réparer les dizaines de milliers de personnes condamnées. Elle sera débattue le 22 novembre dans l’hémicycle du Sénat.
Stephane Duguet

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Il veut que l’Etat reconnaisse sa responsabilité dans « la politique de criminalisation et de discrimination » contre les personnes homosexuelles et réparer le préjudice. Le sénateur socialiste Hussein Bourgi va défendre sa proposition de loi « portant réparation des personnes condamnées pour homosexualité entre 1942 et 1982 » devant la commission des lois mercredi.

Déposée, 40 ans après l’adoption de la loi Forni qui a abrogé le « délit d’homosexualité » le 4 août 1982, cette proposition de loi sénatoriale a été signée par les groupes socialistes, écologistes, communistes et des sénateurs radicaux, centristes et Les Républicains. « Je persiste à penser que c’est un sujet suffisamment consensuel pour réunir toutes les bonnes volontés de l’hémicycle », avance, optimiste, le sénateur de l’Hérault.

Héritage de Vichy

Il s’est saisi du sujet après avoir lu, à l’été 2022, la série d’articles « Homosexualité, les années clandestines », publiée par la journaliste Ariane Chemin dans Le Monde. « Ça m’a rappelé un colloque organisé à Montpellier sur le sujet en 2002 avec l’ancien sénateur Jean-Pierre Michel (rapporteur sur le Pacs et le mariage pour tous, ndlr). Plusieurs personnes dans la salle ont témoigné pour la première fois des amendes et des peines de prison auxquelles elles avaient été condamnées », se souvient Hussein Bourgi.

La criminalisation de l’homosexualité remonte à la loi du 6 août 1942 du régime de Vichy qui n’a pas été abrogée à la Libération. Cette loi a instauré « une distinction discriminatoire dans l’âge de consentement entre rapport homosexuel et hétérosexuel » : 21 ans pour les rapports homosexuels et 13 ans pour les rapports hétérosexuels puis 15 ans à la Libération. D’après le sénateur, cette loi a « servi de base juridique pour la répression policière et judiciaire », dont furent victimes les personnes homosexuelles. Ensuite, le Code pénal a doublé en 1960 la peine minimum pour « outrage public à la pudeur », s’il s’agissait de rapports homosexuels.

« Il y avait une sanction judiciaire et pénale doublée d’une forme de réprobation sociale, familiale et professionnelle », explique celui qui est aussi conseiller régional de l’Occitanie, évoquant le licenciement de certaines personnes condamnées et les articles de presse qui dévoilaient les informations personnelles de ces dernières.


Reconnaître et réparer financièrement les victimes

Ainsi, avec sa proposition de loi, Hussein Bourgi souhaite d’une part que la France reconnaisse sa responsabilité comme d’autres pays occidentaux avant lui : l’Autriche cette année, la Norvège en 2022, le Canada et l’Allemagne en 2017 ou encore l’Espagne en 2007. Le texte prévoit également la création d’un délit en cas de négation de la déportation des personnes homosexuelles pendant la seconde guerre mondiale.

En plus du volet mémoriel, la deuxième partie de cette proposition de loi est consacrée aux réparations à apporter aux 60 000 personnes condamnées entre 1942 et 1982, des chiffres estimés par les travaux des deux sociologues Jérémie Gauthier et Régis Schlagdenhauffen publiés en 2018. Ainsi, le texte du sénateur Hussein Bourgi propose une « allocation forfaitaire fixe de 10 000 euros », une « allocation forfaitaire variable » par jour de privation de liberté fixée à 150 euros par jour et un remboursement des amendes.

« Plus le temps passe, moins on a de chance de retrouver des personnes qui ont été condamnées en vie »

Si la loi est adoptée, une commission indépendante sera créée pour « établir la véracité des faits », détaille le sénateur socialiste. Les indemnisations n’auraient lieu que si les personnes victimes se manifestent, en adressant plusieurs informations comme leurs noms, une copie de leur condamnation si elles en disposent encore, ou la date à laquelle elles ont été jugées. Ce qui peut s’avérer compliqué dans certains cas : « Il arrive que des personnes condamnées aient jeté leurs jugements après avoir payé les amendes pour éviter que leurs familles ne le découvrent », expose le sénateur de l’Hérault. Pour élaborer son texte, il s’est inspiré des modèles européens et de la loi de 2022 portant réparation aux harkis.

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