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Au Parlement européen, Jordan Bardella peine à se « normaliser »  

A la tête des Patriotes, le troisième groupe le plus important numériquement au Parlement européen et désormais membre de la prestigieuse commission des affaires étrangères, Jordan Bardella entend poursuivre à Strasbourg sa stratégie de « normalisation ». Une stratégie compromise cependant par le « cordon sanitaire » des partis pro-européens contre l’extrême-droite et par certaines personnalités embarrassantes au sein de son camp.
Audrey Vuetaz

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Et si la Présidentielle française de 2027 se préparait au Parlement européen? C’est peut-être ce que s’est dit Jordan Bardella le président du RN au lendemain de son échec aux élections législatives. Le voici désormais membre de la prestigieuse commission des affaires étrangères du Parlement, lui qui était jusqu’à présent à la commission des pétitions, loin d’être la plus prolifique, où l’on ne s’inscrit en général qu’à titre secondaire. Aux affaires étrangères, il siègera aux côté de Raphael Glucksmann, Bernard Guetta, Nathalie Loiseau, Marion Maréchal ou encore Rima Hassan. « C’est une commission qui va monter en puissance, explique Paul Messad, en charge de l’extrême-droite pour le site spécialisé Euractiv.fr,  vu le contexte géopolitique, les sujets internationaux vont prendre de l’importance au Parlement européen. Ça permet aussi de se donner une posture en France, de se légitimer sur des sujets d’envergure qui sont en général du domaine du chef de l’Etat. » 

Pour soigner sa posture, Jordan Bardella a aussi accepté de prendre la tête des Patriotes pour l’Europe, un groupe d’extrême-droite pensé par le Premier ministre hongrois Viktor Orbán. Avec 84 membres et 12 nationalités il est le troisième le plus important numériquement derrière le PPE (la droite conservatrice) et le S&D (les socio-démocrates).  Dans ce groupe on retrouve évidemment le RN qui apporte le plus gros contingent mais aussi les espagnols de Vox, les italiens de la Ligue ou le Fidesz hongrois. En tant que président de groupe Jordan Bardella participera à la conférence des présidents du Parlement qui a la main sur les décisions politiques et sur l’organisation des travaux parlementaires. Sur le papier, la stratégie de normalisation lancée par le RN en France, semble fonctionner aussi au niveau européen.    

Bardella pris dans les mailles du « cordon sanitaire » 

Mais le problème pour Jordan Bardella c’est qu’il est le seul de son groupe à occuper un poste prestigieux de président, tous les autres ont fait chou blanc, en se heurtant au « cordon sanitaire contre l’extrême droite ». Un cordon, qui existe depuis les années 80 : les partis politiques pro-européens s’accordent pour ne confier aucun poste à responsabilités à l’extrême-droite. Une position qui s’est vérifiée une nouvelle fois cette année: Fabrice Leggeri, eurodéputé RN et ex-patron de Frontex a échoué à devenir Vice-président du Parlement, quant à Malika Sorel, deuxième sur la liste de Jordan Bardella, elle n’a pas réussi à se faire élire présidente de la commission de la culture, malgré le poids numérique de son groupe. « L’extrême-droite s’est renforcée au Parlement, souligne Paul Messad, mais le PPE, la droite classique aussi. L’ancienne coalition centriste fonctionne toujours et s’il faut l’élargir ils iront plutôt chercher du côté des Conservateurs réformistes de Giorgia Meloni, la Première ministre italienne que du côté de Jordan Bardella ou Marine Le Pen. » Les Patriotes restent donc derrière le cordon. 

Des amis embarrassants 

Autres épines dans le pied de Jordan Bardella pour se normaliser : ses alliés. A commencer par son vice-président chez les Patriotes, l’ItalienRoberto Vannacci. Un ancien général ouvertement raciste, homophobe et pro-Mussolini. Après avoir découvert son CV sur le tard, le patron du RN s’activerait en coulisse pour débrancher ce numéro 2 gênant proposé par son allié de la Ligue Matteo Salvini. 

Autre allié encombrant: Viktor Orbán. En siégeant à la commission des affaires étrangères, Jordan Bardella entend normaliser la position du RN sur le dossier ukrainien. « Sans soutenir l’Ukraine, il peut dire et il l’a déjà fait, que la Russie est une menace pour l’Europe, précise Paul Messad. » Mais comment défendre cette position alors même qu’Orbán, allié historique du RN rentre d’un voyage auprès de Vladimir Poutine, début juillet. « Il y a un problème de double discours entre ce que fait le RN à Paris, ce qu’il veut faire à Strasbourg et à Bruxelles et la position de ses alliés pro-russes, souligne Paul Messad, mais en même temps, il est difficile pour Marine Le Pen de renier 15 ans de diplomatie avec Orbán. Et puis elle ne s’entend pas avec Giorgia Meloni, donc il ne lui reste qu’Orbán comme allié. Jordan Bardella et elle peuvent néanmoins s’en sortir en disant que la diplomatie fait partie de la souveraineté de chaque pays et qu’ils n’ont pas à se mêler des affaires d’Orbán à ce sujet. »  Une porte de sortie avant la prochaine déconvenue? 

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