Les militants « soulagés » après la victoire de Macron, les ministres déjà tournés vers « la bataille des législatives »

Les militants « soulagés » après la victoire de Macron, les ministres déjà tournés vers « la bataille des législatives »

Explosion de joie et ambiance festive, au Champ de Mars, à Paris, à l’annonce de la victoire d’Emmanuel Macron. C’est « un grand soupir de soulagement » expliquent les sympathisants, alors qu’un DJ assure l’ambiance. Mais la fête ne dure pas. Les ministres insistent sur l’esprit de « gravité ». Et déjà, les têtes se tournent vers les législatives, la prochaine bataille.
François Vignal

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« One more time ». Emmanuel Macron est réélu président de la République, avec 58,8 %, contre Marine Le Pen. Une victoire historique. C’est une première pour un chef de l’Etat de la Ve République, hors cohabitation. Au Champ de Mars, où les militants et sympathisants d’Emmanuel Macron sont rassemblés pour fêter la victoire, c’est l’explosion de joie, quand le visage d’Emmanuel Macron apparaît à l’écran.

Avant les classiques analyses politiques, c’est l’ambiance festive qui prend ici le pas. A peine le résultat annoncé, un DJ electro lance un premier morceau. On reconnaît vite le gimmick de… « One more time », célèbre tube des Daft Punk. Le public lève les bras en l’air, la sono « envoie » le son. Les lumières apparaissent dans la nuit tombante. On se croirait presque en soirée, à l’exception près que des drapeaux tricolores et européens flottent. Et de l’autre côté de la barrière, des ministres se congratulent. En fond d’écran, la Tour Eiffel, accompagnée d’un coucher de soleil qui irise le ciel. L’image est là. Parfait pour les 1300 journalistes accrédités, 200 télés, représentant 44 pays. « C’est huge. Le monde nous regarde », lance un membre du service presse.

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La foule d’anonymes respire. Sur les visages, les sourires. Ici on danse, là on pose pour la photo. On apprécie surtout que « le pire » ne soit pas arrivé. « On est rassurés. Je ne pensais pas qu’il serait aussi haut », dit Camille, étudiante à Sc Po. Elle ajoute :

L’électeur de Mélenchon a été plus raisonnable que je pensais.

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« C’est la victoire de la solidarité »

Reste que « le niveau du RN est encore très fort », tempère Camille. « On pousse un grand soupir de soulagement », dit Gaëtan, consultant de 29 ans, qui va « écouter le Président puis rentrer boire une coupe de champagne ». Fabrice, ingénieur de 50 ans, se dit aussi « soulagé », même s’il n’avait « pas beaucoup de doutes ». « Le match n’était pas gagné d’avance. Il fallait quand même le gagner », ajoute ce Parisien. Nathalie, 57 ans, se dit aussi « soulagée que l’extrême droite ne passe pas ».

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Fabrice est « soulagé » après la victoire d'Emmanuel Macron.

Mohamed, 38 ans, était lui moins stressé qu’au premier tour. Pour ce binational d’origine ivoirienne, « c’est la victoire de la solidarité, de l’union de tout un peuple, quelle que soit l’origine ou la religion », explique cet ingénieur dans l’industrie maritime. Un peu plus loin, Christophe raconte qu’il était « un peu moins inquiet depuis le débat ». Sofiance, juriste de 36 ans, apprécie qu’Emmanuel Macron ait su « montrer toutes les contradictions du programme de Marine Le Pen. Et le RN ne pouvait plus se cacher derrière Zemmour pour adoucir son discours ». Mais Sofiane ajoute :

L’extrême droite est encore au second tour à un niveau très élevé. On ne peut pas être satisfait à 100 %.

« Sursaut républicain »

Yoann, 29 ans, était lui au PS avant 2017. Il suit depuis Emmanuel Macron. « Il fallait trouver quelqu’un qui me portait, qui me ferait vibrer », dit-il. Dans la foule, on tombe sur un jeune de 19 ans qui a voté Jadot au premier tour. Lui aussi est « forcément soulagé », mais il « espère qu’il prendra en compte la question climatique. Et qu’il s’inspirera des mesures de gauche, qui l’a fait gagner ». « Il y a quand même eu un sursaut républicain, qui est rassurant », ajoute-t-il.

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Sofiance apprécie qu’Emmanuel Macron ait su « montrer toutes les contradictions du programme de Marine Le Pen ».

Un peu plus loin, on voit passer de l’autre côté de la barrière le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti. Clope au bec, il fait quelques selfies avec des militants. Les journalistes l’appellent. L’homme vient, mais fait mine de ne pas vouloir parler : « Laissez-moi le temps de savourer ! » « Et il y a un travail à faire encore. Il y a les législatives », ajoute le ministre. Sera-t-il candidat ? « A chaque jour suffit sa peine… ou sa joie » lâche Eric Dupond-Moretti. Pour l’heure, on fête la victoire sur le Champ de Mars. Les enceintes crachent « All night long » de Lionel Richie.

« Je sais que ce vote m’oblige » lance Emmanuel Macron

Vers 21h30, un décompte apparaît sur les écrans géants. L’Ode à la joie retentit. Emmanuel Macron fait son entrée sur le Champ de Mars, accompagné de Brigitte Macron et d’enfants. Il monte sur l’estrade. Après cette victoire au goût amer, le ton est à la gravité, sans excès. Le discours du chef de l’Etat semble même manquer de souffle.

« Je sais que ce vote m’oblige » dit le locataire de l’Elysée, qui vient de voir son bail prolongé de 5 ans. « La colère et les désaccords doivent trouver une réponse », lance le Président réélu, qui évoque même « la déception » de « ceux qui ont voté pour Marine Le Pen ». Celui qui veut « faire de la France une grande nation écologique », avec son « projet social et écologique », « fondé sur le travail », appelle à « être bienveillant et respectueux ». Plutôt que « 5 ans de plus », comme crient les militants, Emmanuel Macron veut faire « 5 ans de mieux ». Pendant que le Président parle, certains ont les yeux qui brillent.

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« Esprit d’unité et de gravité »

Son discours terminé, le chef de l’Etat s’attarde un peu pour saluer, une dernière fois, les militants. Il sait bien que les années à venir ne « seront être tranquilles », comme il a dit quelques minutes plus tôt. Au pied des plateaux des chaînes infos, les ministres relaient les éléments de langage. « Il ne faut pas oublier les Français qui ont voté pour nous » et répondre « aux inquiétudes profondes » sur « le pouvoir d’achat, l’inflation, le climat », explique le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire.

Mais « les Français n’ont pas donné un mandat étriqué. C’est une victoire nette », souligne le locataire de Bercy. Face à la « colère et la déception », Clément Beaune, secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, appelle au « respect des minorités ». Cette victoire se fait « dans un esprit d’unité et de gravité ». Pour François Patriat, patron des sénateurs LREM, c’est également « un sentiment de bonheur, mais aussi de gravité ». « Emmanuel Macron vient de remporter une victoire nette », répète à son tour le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer, « maintenant, il lui faut une majorité ».

« La bataille des législatives se joue à partir de demain », prévient Clément Beaune

Car si tout le monde la joue modeste et humble ce soir, les esprits sont déjà tournés vers le prochain scrutin, où 577 députés seront élus. « Comme militant, on est heureux. Mais il y a les législatives. Il faut préparer cette bataille législative. C’est une bataille très importante qui se joue à partir de demain, au fond », prévient Clément Beaune. Bruno Le Maire « espère qu’elle donnera lieu à beaucoup d’unité de notre part. Toutes nos énergies ne doivent pas aller vers des différences de sensibilités entre nous », met en garde le ministre de l’Economie, qui prévient :

Il n’y a pas de place pour les divisions internes. (Bruno Le Maire)

Bruno Le Maire sait bien que la volonté d’Emmanuel Macron de rassembler tous ses soutiens dans le même grand parti passe mal chez certains, à commencer par Edouard Philippe, qui avec son nouveau parti Horizons soutient Emmanuel Macron, mais entend bien aussi faire tourner sa boutique. Le chef de l’Etat n’a d’ailleurs ce soir pas évoqué cette idée d’un grand parti démocrate pro Macron, contrairement au premier tour.

Pour Emmanuel Macron, il n’y aura pas d’état de grâce, contrairement à 2017. L’action va vite reprendre sa place. Jeudi, lors de sa visite à Saint-Denis, Emmanuel Macron a expliqué qu’il avait demandé à ses équipes de plancher sur une visite rapide à Kiev, en cas de réélection. « La guerre en Ukraine va marquer le début de ce quinquennat », sait bien Clément Beaune, qui évoque déjà des « sanctions nouvelles contre la Russie ». Dans l’immédiat, au Champ de Mars, l’ambiance est vite retombée après le discours du chef de l’Etat. Les sympathisants ne s’attardent pas et l’espace se vide rapidement. La fête a été de courte durée.

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