Portrait Series of Thomas Portes, Deputy of La France Insoumise

Athlètes israéliens « pas les bienvenus » aux JO : quelle est la stratégie de LFI ? 

Ce week-end, le député LFI de Seine-Saint-Denis Thomas Portes a suscité la polémique en déclarant que les athlètes israéliens n’étaient pas les « bienvenus » aux JO. Il a reçu aujourd’hui le soutien de Manuel Bompard qui réclame que ces sportifs concourent « sous bannière neutre ». Quelle est la stratégie de LFI dans cette séquence ?
Tâm Tran Huy

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La vidéo a fait le tour des réseaux sociaux. Celle de Thomas Portes, lançant lors d’une manifestation pro palestinienne, que la « délégation israélienne n’est pas la bienvenue à Paris. » Des propos aussitôt dénoncés à droite, mais aussi par une partie de la gauche. Le coordinateur national de LFI, Manuel Bompard, a, lui, apporté son soutien à l’Insoumis, expliquant que la position du mouvement sur le sujet avait toujours été « claire et constante », réclamant que la délégation israélienne concourt, non sous ses couleurs mais sous bannière neutre. Position constante, stratégie délibérée de LFI, quel effet sur le Nouveau Front populaire qui ne parvient toujours pas à se mettre d’accord ?

Interdire le drapeau et l’hymne israéliens, ou les sportifs israéliens ?

« Les sportifs israéliens ne sont pas les bienvenus aux Jeux olympiques à Paris. Il faut utiliser cette échéance, tous les leviers que nous avons pour créer des mobilisations. » Ce week-end, la sortie de Thomas Portes a immédiatement suscité la polémique, jusqu’au sein de la gauche. Le président du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) Yonathan Arfi a condamné ces propos sur X, estimant que cette déclaration revenait à « mettre une cible dans le dos des athlètes israéliens, déjà les plus menacés des Jeux Olympiques ». Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a lui dénoncé des « relents d’antisémitisme » évidents. Mais les partenaires de gauche de LFI se sont aussi insurgés. A l’instar de la sénatrice Corinne Narassiguin, également secrétaire nationale à la coordination, qui a jugé les déclarations de Thomas Portes « inadmissibles » et le soutien apporté ensuite par le coordinateur de LFI Manuel Bompard « inacceptable ».

 

Interrogé pas nos confrères du Parisien, Thomas Portes est quelque peu revenu sur ses propos. Il ne demande pas à la délégation israélienne d’annuler sa venue mais réclame qu’elle concourt sous bannière neutre, comme doivent le faire cette année les athlètes russes et bélarusses, en raison de la guerre en Ukraine. En l’absence d’une telle mesure, le parlementaire dénonce un « deux poids, deux mesures ». Une position sur laquelle il est rejoint par le chef des Insoumis. Ce matin, ce dernier a soutenu l’élu de Seine-Saint-Denis.

Lui aussi réclame que les athlètes participent « sous bannière neutre ». Cette proposition n’est pas nouvelle, elle a déjà été faite par une partie des forces de gauche il y a plusieurs mois.

Bannière neutre pour Israël : une proposition écologiste et LFI

Au mois de février 2024, 30 élus écologistes et LFI ont adressé un courrier au CIO en ce sens. Dans une lettre à Thomas Bach, ces députés soutenaient que la bannière neutre devait s’imposer à ces sportifs. A l’époque, ces élus assumaient déjà leur volonté d’utiliser les JO comme un moyen de pression : ils réclamaient « d’appliquer à Israël, lors des prochains Jeux Olympiques, les mêmes sanctions qu’à la Russie et à la Biélorussie, tout en laissant ouverte la possibilité d’une levée de ces sanctions en cas de cessez-le-feu durable. »

Emmanuel Macron avait rejeté cette proposition au mois d’avril, refusant de comparer l’agression russe et la riposte israélienne. « On peut être en désaccord avec Israël sur les modalités d’apporter la réponse et de se protéger, mais on ne peut pas dire qu’Israël est un attaquant » avait-il estimé, contrairement à la Russie qui « a décidé d’une guerre d’agression qui dure depuis plus de deux ans ». 

Le courrier était essentiellement signé par des députés LFI, parmi lesquels Aymeric Caron, Ersilia Soudais, Louis Boyard, David Guiraud mais aussi François Ruffin. Chez les écologistes, Aurélien Taché, Marie-Charlotte Garin et Sabrina Sebaihi assumaient aussi cette ligne. Pas de socialiste dans les signataires. Cette position ne convainc toujours pas le Parti à la rose. Corinne Narassiguin précise d’ailleurs : « Quoi qu’on pense de Netanyahou, confondre volontairement la démocratie israélienne et la dictature russe, c’est une faute morale et politique. »

« Jean-Luc Mélenchon est dans la stratégie de 2027, il ne veut pas gouverner »

Pour la communicante politique Emilie Zapalski, la déclaration de LFI signe d’ailleurs une autre confusion qu’elle trouve « scandaleuse » : « Il ne faut pas faire un mélange entre les athlètes et le gouvernement. On peut avoir des critiques sévères sur ce que fait ce gouvernement de Benyamin Netanyahou mais on ne peut pas le confondre avec le peuple ».

Dans cette séquence, où le Nouveau Front populaire peine plus que jamais à trouver un Premier ministre qui mette tout le monde d’accord, une telle séquence interpelle. LFI sait que cette position est à des années-lumière de celle du Parti socialiste. Ce qui pouvait d’abord apparaître comme une sortie à titre personnel de Thomas Portes, est finalement assumé, revendiqué par Manuel Bompard. Est-ce à dire que LFI ne cherche plus à gouverner avec ses alliés socialistes ? « Jean-Luc Mélenchon est dans la stratégie de 2027, il ne veut pas gouverner » estime Emilie Zapalski qui rappelle aussi que Les Insoumis renouent, dans cette sortie, avec la méthode mise en place à l’occasion des élections européennes, celle d’axer toute une partie de la campagne sur la guerre Israël-Hamas et sur la défense de la cause palestinienne, une « stratégie électoraliste plutôt payante sur les quartiers et sur la communauté musulmane. C’est cynique et ça paye » souligne la communicante.

Cette sortie de Thomas Portes et Manuel Bompard démontre enfin la fragilité du contrat de législature conclu en quelques jours par le Nouveau Front populaire, des « valeurs de surface » estime Emilie Zapalski. Alors que de nombreux partis ont promis plus d’apaisement dans le débat public, cet épisode « laisse présager des conflits, du buzz agressif et radical. » La recherche de la radicalité et non du compromis, de ce qui divise, pas de ce qui rassemble. Un message qui sera mal perçu par de nombreux Français alors que les derniers sondages montrent qu’une majorité d’entre eux sont désormais favorables à une coalition.

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