Paris: Legislatives rassemblement Nouveau Front Populaire

Après les élections législatives, quel avenir pour le Nouveau Front Populaire à l’Assemblée nationale ?

A l’approche du second tour, et alors que la victoire du Nouveau Front Populaire (NFP) semble compromise, même si arithmétiquement le bloc de gauche peut toujours obtenir une majorité absolue, les dirigeants et figures du NFP se projettent de plus en plus dans l’après législatives.
Henri Clavier

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Pour certains, l’enjeu sera, au lendemain du 7 juillet, de discuter des rapports de force à gauche et d’envisager une reconfiguration de celle-ci. « Ma place ne sera pas dans le groupe La France insoumise si jamais je suis élu », a déclaré François Ruffin, candidat dans la première circonscription de la Somme. L’ancien élu LFI prend ses distances avec Jean-Luc Mélenchon, qu’il n’a pas hésité à qualifier de « boulet ». Les candidats dissidents LFI (Alexis Corbière, Danielle Simonnet, Hendrik Davi, Raquel Garrido ou Clémentine Autain), s’ils sont élus, pourraient être tentés de porter ce projet au sein de l’hémicycle du Palais Bourbon. En parallèle, le PS devrait voir son nombre de sièges augmenter par rapport à la dernière législature. 

Un rapport de force rééquilibré entre LFI et le PS ? 

A l’issue des élections législatives de 2022, la France Insoumise avait obtenu 75 sièges à l’Assemblée nationale quand le PS, en grande difficulté après la campagne présidentielle d’Anne Hidalgo, remportait 31 sièges. Compte tenu des résultats du premier tour, les écarts pourraient se resserrer. « Je pense que dimanche soir, on aura, par rapport au nombre de circonscriptions, un avantage pour le parti socialiste par rapport à LFI. Non pas en nombre de députés, mais au regard du nombre de circonscriptions qui a été accordé », pronostique Martial Foucault, politiste et professeur à Sciences Po, invité de la matinale de Public Sénat. Ce dernier table même sur « une cinquantaine, voire une soixantaine de députés socialistes ». Si la gauche peut progresser et améliorer son nombre de sièges, c’est le Parti Socialiste qui devrait en profiter le plus. « Le PS est sur une trajectoire de renforcement significatif. Le renforcement numéraire implique aussi un renforcement de notre poids politique », confirme le sénateur socialiste de l’Oise et négociateur de l’accord du NFP, Alexandre Ouizille. 

Actuellement, et selon le comptage réalisé par Contexte, 112 candidats LFI sont qualifiés et se sont maintenus au second tour contre 99 pour le PS. Un écart relativement faible au regard du nombre d’investitures dont bénéficiait LFI (229) contre 175 pour le PS. LFI devrait bien rester le premier groupe à gauche, notamment grâce aux 19 députés élus dès le premier tour, contre 5 pour le PS. Mais talonné par le PS, ce que Raphaël Glucksmann analyse comme un changement de ligne à gauche. « Il y a eu une inversion des rapports de force à gauche. L’hégémonie politique de Jean-Luc Mélenchon a pris fin », affirmait, Raphaël Glucksmann, ce 4 juillet sur France Inter. Au lendemain des élections européennes et s’appuyant sur son score aux européennes, l’ancienne tête de liste PS-Place Publique percevait déjà une clarification entre les différentes lignes à gauche. Dans cette configuration, des dissensions pourraient apparaître, par exemple sur le sujet d’un éventuel gouvernement de coalition. « Ce qui est souhaité, c’est la cohésion du NFP pour le monde d’après, on joue avant tout la victoire. Il nous faut des principes démocratiques, le NFP ne sera pas l’hégémonie des uns sur les autres », tranche Alexandre Ouizille. 

« Je souhaite un groupe écologiste plus large, avec une assise politique plus importante, donc un nouveau groupe » 

La reconfiguration ne concerne pas uniquement les rapports de force entre LFI et le PS, mais devrait également toucher les autres partis membres de l’alliance. Le groupe communiste, présent à l’Assemblée nationale depuis 1962, apparaît en grande difficulté après l’élimination de Fabien Roussel. Seulement 18 candidats communistes restent en lice au second tour et 3 ont été élus dès le premier tour. Pour rappel, il faut au moins 15 députés pour former un groupe parlementaire au Palais Bourbon, ce qui laisse donc une marge d’erreur très faible. 

Si la barre n’est pas atteinte, la tentation sera forte d’essayer de former un nouveau groupe avec, par exemple, certains dissidents LFI ou des députés issus du parti Génération.s. « Je souhaite un groupe écologiste plus large, avec une assise politique plus importante, donc un nouveau groupe. Cependant, je pense que ce serait une erreur de multiplier les groupes à gauche et de se diviser », explique Sophie Taillé-Polian (Génération. s), réélue députée du Val de Marne. Cette ancienne sénatrice n’exclut donc pas le ralliement des dissidents LFI à un rassemblement s’appuyant sur le groupe écologiste actuel.  « Il faut que cela soit un grand groupe, central pour la gauche, qui serait une passerelle entre LFI et le PS pour éviter une polarisation trop importante entre les différentes composantes du NFP. Ce nouveau groupe peut se constituer à partir d’identités politiques différentes, pourquoi pas des gens de LFI. Il s’agit de refonder quelque chose », détaille Sophie Taillé-Polian. 

Se préparer pour la suite 

Si les différentes composantes du NFP venaient à s’écharper sur une participation ou non à un gouvernement de coalition, une voie centrale pourrait permettre de purger les conflits. « Les idées d’union nationale ou de gouvernement technique me semblent inverser les responsabilités de ceux qui les appellent. Mais s’il n’y a pas de majorité, on ne va pas dire qu’on ne veut pas gouverner. Les macronistes devront venir à notre table et si nous acceptons ce ne sera pas pour appliquer leur programme légèrement atténué. Un compromis ne peut se faire que sur tout ou partie de notre programme », résume Sophie Taillé-Polian. « On sera en tête des coalitions républicaines. Le programme du NFP est donc l’alternative au RN », confirme Alexandre Ouizille. 

Assurément, le plus grand défi du NFP sera de rester uni pour ne pas connaître la même fin que la Nupes, enterrée en octobre 2023. « Ce à quoi les partis réfléchissent, c’est l’élection présidentielle », juge Martial Foucault rappelant le fort désir d’unité chez les électeurs de gauche. Durant les négociations précédant l’accord de législature, les militants des différents partis de gauche s’étaient massés devant le siège des écologistes, où se tenaient les négociations, pour scander « ne nous trahissez pas ». Une démarche qui illustre la forte demande unitaire de l’électorat de gauche. « Tout doit concourir à une candidature unitaire pour 2027, c’est une nécessité absolue », abonde Sophie Taillé-Polian.

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